Comme annoncé, il y a près d'un mois, le 15 janvier 2008, la Conférence nationale sur la maîtrise de l'énergie s'est tenue, hier, à Gammarth, à l'initiative du gouvernement, en décrétant la maîtrise de l'énergie en tant que cause nationale et en ordonnant, dans le sillage, le lancement d'un nouveau programme triennal, à cet effet, qui doit, à terme, améliorer, sensiblement, l'efficacité énergétique en Tunisie, de manière à réaliser une économie d'environ 30 % de la consommation nationale d'énergie, à l'orée de 2011. Donnant le coup d'envoi des travaux, Mr Mohamed Ghannouchi, Premier ministre, a indiqué que grâce à ce nouveau programme, le gouvernement entend réduire l'efficacité énergétique, en Tunisie, d'une quarantaine d'unités, et la ramener de 326 kilo équivalent pétrole, actuellement, à 286 en 2011, soit une réduction de l'ordre de 10% de la consommation, en moyenne, par an, ou environ un million et demi de tonnes équivalent pétrole (TEP). Sachant que l'efficacité énergétique représente la quantité d'énergie en équivalent pétrole, utilisée pour produire une valeur ajoutée de 1000 dollars, ou encore pour augmenter le PIB de 1000 dollars, alors que la consommation nationale actuelle d'énergie avoisine les 7, 5 millions de TEP, par an.
Mobilisation générale au service d'une cause nationale L'objectif fixé est réalisable et à la portée de notre pays, a affirmé le premier ministre, ajoutant qu'il est, même, possible de mieux faire, car des pays européens de la taille de la Tunisie , comme le Portugal, enregistrent une efficacité énergétique de l'ordre de 236 kilo équivalent pétrole, alors qu'elle s'élève à seulement 190 kilo dans les pays hautement industrialisés. En vue d'assurer le succès souhaité au projet, à travers l'organisation de cette manifestation, l'administration n'a pas lésiné sur les moyens, de sorte que la manifestation avait pris l'allure d'une véritable mobilisation générale au service d'une cause nationale. Outre les membres du gouvernement, presque au complet, plus de 1000 participants, représentant au plus haut niveau tous les secteurs d'activité et toutes les parties concernées, ont pris part à cette Conférence nationale, la deuxième du genre, puisqu'une Consultation nationale sur la maîtrise de l'énergie avait été organisée, au printemps de 2005 et avait, alors, abouti à la mise en œuvre d'un programme triennal similaire de maîtrise de l'énergie, qui a pris fin en 2007. Ce nouveau programme triennal qui s'étend jusqu'à 2011, sur toute la période du 11ème plan de développement économique et social, vient, donc, à la suite de ce premier programme triennal, pour le renforcer et le consolider, à la lumière des résultats obtenus. Cependant, comme l'a indiqué le Premier ministre, l'intérêt porté par la Tunisie à la maîtrise de l'énergie remonte à l'an 2000, lorsqu'elle avait réalisé, à l'époque, que l'augmentation des prix du pétrole brut sur le marché mondial, alors timidement amorcée, relève de causes structurelles et non conjoncturelles et qu'elle allait se poursuivre sans arrêt, de sorte, qu'en l'espace de 7 ans, le prix du pétrole brut sur le marché mondial soit passé de dix dollars le baril en 2000, à 25 dollars en 2003, puis à 29 dollars en 2003, ensuite à 54 dollars en 2005, puis, de nouveau, à 65 dollars en 2006, et enfin à 100 dollars, au début de 2008, alors qu'il est vendu, aujourd'hui, à 93 dollars le baril. Après avoir souligné que l'ère du pétrole à des prix faibles est, ainsi, à jamais, révolu, Mr Mohamed Ghannouchi a passé en revue les possibilités énormes et extrêmement pratiques qui s'offrent à la Tunisie pour économiser la consommation d'énergie et qui vont de la réduction de la vitesse des véhicules automobiles et l'emploi des lampes de basse consommation, à la cogénération qui consiste pour les entreprises économiques à réutiliser les gaz dégagés par leurs unités industrielles pour la production de l'électricité, au lieu de les laisser se perdre inutilement, et polluer l'air ambiant. Il a mentionné, également, les opportunités ouvertes par le mécanisme international dit « mécanisme pour un développement propre » qui offre la possibilité de vendre sur le marché mondial les économies locales d'émission de gaz carbonique.
Incitations encourageantes mais, aussi, réglementation stricte Toutefois, parallèlement à cet ambitieux programme national dont la réussite dépend largement de l'adhésion active de tous les acteurs de la vie nationale et de l'ensemble des membres de la collectivité nationale sans exception, le Premier ministre a annoncé le recours inéluctable, à l'avenir, à des réajustements appropriés et très étudiés des prix à la vente des produits pétroliers raffinés qui sont, encore, largement subventionnés, en Tunisie. Ainsi, l'essence pour voiture est subventionnée à hauteur de 100 millimes le litre, alors que le fuel utilisé en industrie est subventionné à hauteur de 350 millimes et que les bouteilles de gaz de pétrole liquéfié (GPL) sont subventionnées à hauteur de 12 dinars, pour la seule bouteille. Or, 90% des familles tunisiennes utilisent, encore, le GPL pour les besoins domestiques. En effet, les résultats réalisés et ceux escomptés, à l'avenir, concernant l'amélioration de l'efficacité énergétique ne permettront pas de résorber le manque à gagner occasionné par la flambée des prix du pétrole brut sur le marché mondial, car, quoique produisant du pétrole et du gaz, la Tunisie importe aussi les produits pétroliers raffinés. Ainsi, la Tunisie importe 58% de ses besoins en essence et 70 % de ses besoins en GPL. Au même moment, outre les mesures et restrictions d'ordre réglementaire, le gouvernement a prévu des incitations substantielles, sous formes de primes notamment, au profit des opérateurs économiques et des citoyens en général, pour les encourager à adopter les solutions proposées dans le cadre de ce nouveau programme national triennal de maîtrise de l'énergie, comme la réalisation d'audits énergétiques périodiques et réguliers pour les entreprises économiques consommant plus de 800 tonnes par an. Ce plafond était 1000 tonnes et il a été intentionnellement réduit à 800, mais des primes pouvant atteindre 500 mille dinars seront octroyées pour les entreprises qui réalisent des projets de cogénération, avec la possibilité de vendre à la Société nationale d'électricité et de gaz, le surplus d'énergie qu'elles peuvent produire par ce moyen. Aux côtés de l'industrie, tous les autres secteurs sont fortement concernés et impliqués, comme le bâtiment, le transport et l'agriculture. D'ailleurs, la Conférence s'est scindée en plusieurs commissions chargées, chacune, d'examiner les possibilités de maîtrise de l'énergie selon chaque secteur, en particulier. Puis, premiers pas vers la traduction des décisions dans les faits, salués par les applaudissements nourris de l'assistance, onze pactes de maîtrise de l'énergie ont été signés, par la même occasion, en présence de Mr Mohamed Ghannouchi , au cours de la séance d'ouverture, entre les départements ministériels directement concernés et les grandes Organisations nationales actives sur la scène.