Salvatore Riina (né le 16 novembre 1930), également connu sous le nom de Totò Riina et surnommé Totò u curtu[1], est un des membres les plus influents de la Mafia sicilienne. Il a été surnommé la Bête, ou parfois le Petit à cause de sa petite taille, bien que personne n'ait jamais osé l'appeler par l'un de ses surnoms devant lui. Durant sa carrière dans le crime il a personnellement tué environ quarante personnes et est soupçonné d'avoir commandité les meurtres d'un peu plus de mille personnes. Pendant les années 1980 et le début des années 1990, Riina et sa famille de Mafia, les Corleonesi, ont fait une campagne impitoyable de violence contre les truands rivaux et l'Etat avec l'assassinat de deux juges. Cette terreur répandue dans la population par la Mafia a engendré des actions majeures des autorités, entraînant la capture et l'emprisonnement de Riina et de plusieurs de ses associés. Il a été capturé en 1993, et est en prison depuis.
Né en 1930, Riina monte progressivement dans la hiérarchie des Corleone et rejoint la Mafia locale, les Corleonesi, à l'âge de dix-huit ans après avoir commis un meurtre en leur nom. L'année suivante il est arrêté après le meurtre d'un homme pendant une dispute. Il sera ensuite condamné à six ans de prison pour homicide involontaire. Le parrain des Corleonesi était alors Michele Navarra jusqu'en 1958 lorsqu'il il fut tué sur les ordres de Luciano Liggio, un mafioso de 33 ans devenu par la suite le nouveau boss. En même temps que Totò Riina et Bernardo Provenzano, Liggio commença à accroître la puissance des Corleonesi. Les Corleonesi n'étaient pas un élément important de la Mafia sicilienne dans les années 50, sans aucune comparaison avec les principales basées dans la préfecture, Palerme. Sous-estimant les truands de Corleone, les patrons de Palerme se sont souvent référés aux Corleonesi comme "les paysans". Au début des années 60, Liggio, Riina et Provenzano, qui avaient passé les dernières années en chassant et tuant des douzaines d'hommes de Navarra encore vivants, furent obligés de se cacher, de nombreux mandats d'arrêt ayant été lancés à leur encontre. Riina et Leggio furent arrêtés et jugés en 1969 pour des meurtres commis au début de la décennie. Ces derniers furent acquittés grâce à l'intimidation des jurés et des témoins. Riina se cacha plus tard cette même année après avoir été accusé d'un autre meurtre. Il devait rester un fugitif durant les vingt-trois années suivantes. En 1974 Luciano Liggio est arrêté et emprisonné pour le meurtre de Michele Navarra seize années plus tôt. Bien que Liggio ait maintenu une certaine influence derrière les barreaux, Toto Riina était maintenant la tête pensante des Corleonesi. Pendant les années 70 la Sicile devint un lieu important dans le commerce international d'héroïne, particulièrement dans la synthèse et l'exportation de narcotiques. Les bénéfices de l'héroïne étaient importants, et dépassèrent ceux des activités traditionnelles d'extorsion de fonds. Totò Riina voulut prendre les commandes de ce trafic et entra dans une guerre avec les autres familles de la Mafia. À la fin des années 70, Riina organisa les meurtres d'un certain nombre de hauts fonctionnaires, tels que des juges, des procureurs ou des carabiniers. En plus d'intimider l'Etat, ces assassinats servirent également à porter un coup aux rivaux des Corleonesi. Les parrains de beaucoup de familles de la Mafia étaient souvent médiatisés, débattant avec des politiciens et des maires, se protégeant par des relations plutôt que par la violence. En revanche, Riina, Provenzano et n'importe quel Corleonesi étaient des fugitifs, se cachant toujours, rarement vus par d'autres truands et encore moins par le public. En conséquence, lorsqu'un policier ou un juge était tué c'était les familles les plus médiatisées de la Mafia qui étaient le sujet de toutes les investigations officielles, les assassinats étant de plus volontairement commis dans leurs territoires. La guerre de la Mafia de 1981/1982 Les principaux rivaux des Corleonesi étaient Stefano Bontade, Salvatore Inzerillo et Gaetano Badalamenti, patrons de familles puissantes de la Mafia de Palerme. Le 23 avril 1981, Bontade était sauvagement assassiné, puis quelques semaines plus tard, le 11 mai, Inzerillo fut supprimé par une criblée de balles. Plusieurs parents et associés des deux hommes furent ensuite tués ou disparurent mystérieusement, y compris le fils de 15 ans d'Inzerillo, à qui Riina fit couper la main avant de le faire abattre. Badalamenti ne parvint à survivre qu'en s'enfuyant de la Sicile. De plus en plus de massacres eurent lieu au cours des deux années suivantes, illustrées par un énorme carnage : en un seul jour, le 30 novembre 1982, douze Mafiosi furent assassinés à Palerme dans douze actions distinctes. Les meurtres traversèrent même l'Océan Atlantique, avec le frère d'Inzerillo retrouvé mort dans le New Jersey après une fuite aux USA. Riina commandita les meurtres de juges, de policiers et de procureurs afin de tenter de terrifier les autorités. Un des magistrats les plus hauts placés était le Général Carlo Alberto Dalla Chiesa, qui fut muté à Palerme en qualité de préfet pour lutter contre l'action de la Mafia. Le 3 septembre 1982, Dalla Chiesa, son épouse et un de ses gardes du corps furent assassinés dans un guet-apens. On pense que le tueur était Pino Greco, l'un des tueurs favoris de Riina. Toujours muni d'un Ak-47, et portant le surnom de "petite chaussure" ( scarpazeda en sicilien car son pere etait cordonnier ) , Pino Greco est suspecté d'avoir tué environ quatre-vingts personnes au nom de Riina, y compris Bontade et Inzerillo. En 1981 et 1982, autour de mille Mafiosi furent tués pendant que Riina décimait ses adversaires. Ces derniers tentèrent de battre en retraite : au moins deux cents d'entre eux disparurent sans laisser de traces. Une des histoires les plus terrifiantes de cette période était la prétendue "salle de la mort", un appartement squatté à Palerme tenu par un des hommes de Riina, Filippo Marchese. Des hommes étaient amenés là pour être torturés afin de leur soutirer des informations, puis tués et dissous dans de l'acide ou démembrés et jetés à la mer. Un informateur ayant travaillé aux côtés de Marchese raconta que Marchese insistait pour étrangler les victimes lui-même, bien que ses hommes de main pussent s'en charger. Riina recourait souvent à la trahison durant sa guerre, se liant avec des rivaux, puis les tuant lorsqu'ils ne lui étaient plus d'aucune utilité. Il élimina même ses deux tueurs les plus impitoyables et les plus fidèles, Pino Greco et Filippo Marchese. En 1982, après avoir décidé que Marchese n'était plus utile, Riina le fit assassiner par Pino Greco, puis trois années plus tard il fit éliminer ce dernier à son tour, le jugeant un peu trop ambitieux. Tandis que les Corleonesi devenaient le clan le plus puissant de Sicile, leur tactique se modifia quand, en 1982, un double-tueur condamné nommé Tommaso Buscetta devint le premier Mafioso sicilien à devenir un informateur (repenti) et à coopérer avec les autorités. Buscetta faisait partie d'une famille en difficulté dans la guerre des Mafia, et avait perdu plusieurs parents et beaucoup d'amis, éliminés par les tueurs de Riina. Devenir un repenti était, pour lui, la seule façon de sauver sa peau et de tenir sa revanche sur Riina. Buscetta fournit beaucoup d'informations au juge Giovanni Falcone, et témoigna au procès de Maxi au milieu des années 80 qui a vu des centaines de mafiosi emprisonnés. Riina fut une nouvelle fois condamné pour meurtre mais par contumace : il était toujours un fugitif.