Que font les enseignants Cette année, c'est dans un contexte morose que commencent les vacances d'hiver : après les dépenses de l'Aïd el Kébir, peut-on vraiment au sein des familles moyennes tunisiennes, penser à s'offrir un séjour même court dans l'un des innombrables hôtels du pays. Une excursion dans le Sud ou bien une virée du côté des montagnes enneigées d'Ain-Draham sont-elles possibles avec la baisse généralisée du pouvoir d'achat, les factures à payer, les crédits à honorer, la hausse du prix de l'essence et la cherté des transports et surtout avec les salaires. Il est rare en Tunisie qu'on pense à consacrer un budget spécial pour des vacances autres que celles de l'été. L'hiver, on préfère le passer chez soi et ne déranger personne même pas parmi les plus proches parents. Tout le monde d'ailleurs pense de la sorte et se prive même des grandes sorties en famille. Mais ce sont surtout les enfants petits et grands qui harcèlent les parents, qui pour une excursion avec les élèves ou étudiants de sa classe, qui pour une visite de quelques jours chez un ami habitant la côte ou une ville du Sud, qui pour un voyage à l'étranger !
C'est trop cher Les familles de fonctionnaires relativement aisés peuvent néanmoins supporter les frais d'un séjour à l'hôtel si les prix sont abordables ; mais à étudier ceux que proposent nos hôteliers, il y a peu de chances cet hiver que ce soient les familles tunisiennes qui en bénéficieront ! Pour la seule nuit du réveillon, et en demi pension, les prix ne descendront pas en dessous de 160 dinars par personne. A Tabarka, à Sousse, à Hammamet et à Jerba, les prix qu'on dit promotionnels sont du genre à faire fuir le client tunisien. Pourtant, dans leurs toutes dernières déclarations, les responsables du secteur promettaient, tous, de favoriser le tourisme intérieur en privilégiant les formules promo-vacances et en offrant leurs services à des prix raisonnables qui tiennent compte du budget des foyers sensiblement touchés par la crise. Il était même question de relancer l'activité touristique orientée vers la clientèle locale notamment dans le Sud et le Nord-ouest. C'est vrai qu'à Hammam Bourguiba, la nuit est proposée à 52 dinars seulement, dans le cadre d'une promotion valable pour les vacances d'hiver. Pour une seule personne, c'est peut-être concevable ; mais quand on y va en famille la facture devient trop lourde, surtout que l'hôtel n'offre à ce prix que le logement et le petit déjeuner ! Même à 24 dinars la nuit comme l'annoncent certains autres hôtels, le séjour de trois jours seulement reste au-dessus des moyens de nos familles.
Quelques conseils Que faire face à toutes ces difficultés et surtout que dire aux enfants qui tiennent à passer au moins une partie des vacances dans une ambiance décontractée, festive qui détend de la pression subie sur plus de 15 jours de tests et d'examens ? On peut leur proposer à la place une majoration substantielle dans leur argent de poche habituel, leur permettre de sortir plus souvent en banlieue avec des amis, les accompagner au stade, au cinéma, dans les parcs de loisirs, organiser avec eux des pique-niques à la campagne, en montagne ou en forêt. Tolérer quelques courtes veillées chez leurs amis ou en ville, cela leur ferait également oublier la frustration de devoir patienter pour « les grands » voyages. Concernant les étudiants qui passent, presque tous, les examens du premier semestre juste après la reprise, il est préférable de leur accorder au tout début des vacances un répit de trois ou de quatre jours pendant lesquels ils auront le temps de se changer les idées, question d'aérer leur esprit et de le préparer à l'épreuve des dernières révisions : cinéma, café, parties de football, promenades en dehors de la cité etc., tout est bon pour les soustraire à l'ennui de l'oisiveté, au stress et à la fatigue. C'est dommage que les organisations de jeunesse et les établissements scolaires ne puissent pas programmer davantage d'excursions et de voyages pendant les vacances, car, en général, les prix qu'ils proposent restent malgré tout cléments pour les bourses tunisiennes. Mais eux-mêmes manquent de moyens et dépendent de partenaires non moins déficitaires.
Et les télévisions ? Les parents, eux, n'en seront pas à leur premier sacrifice. Et puis, il n'est pas toujours dit que le congé qu'ils demandent pour les vacances d'hiver leur sera accordé d'office par leurs employeurs respectifs, car il faudra autrement continuer de travailler pendant que leurs enfants garderont la maison ou erreront d'une rue à l'autre et d'un café à l'autre. Si au moins la télévision ou la radio récompensaient leurs concours multiples par des billets gratuits pour deux personnes ou plus et permettaient ainsi, comme cela se fait quotidiennement en Europe et sur plusieurs chaînes à la fois, de voir du pays, de partir en amoureux dans les contrées dont on ne peut que rêver si l'on manque d'argent. Mais pourquoi nos chaînes locales sont-elles aussi radines ? Sont-elles à ce point affectées par la crise ? Cela fait maintenant des décennies qu'on n'offre plus aux gagnants des voyages gratuits. Pas même un week-end, pas même une nuit en demi pension ! Quelle misère ! Badreddine BEN HENDA
Que font les enseignants Quand on voit la fébrilité avec laquelle les enseignants attendent l'avènement des différentes vacances de l'année, on ne peut qu'être sûr qu'ils envisagent de les passer de la meilleure manière possible. Pour en avoir le cœur net, nous avons interrogé quelques uns de nos instituteurs et professeurs du secondaire pour savoir quelle serait la destination de leurs prochaines vacances. Voici ce qu'ils nous ont répondu : Pour Moncef, les prix des hôtels étant trop bas en Tunisie, il est fort possible qu'il parte aux îles Hawaï pour les fêtes de fin d'année. Sa femme l'accompagnerait et deux de ses enfants ; quant au troisième, il préfère les Iles Baléares où il compte beaucoup d'amis parmi les stars d'Hollywood ! Hichem se prépare depuis maintenant une semaine à partir en Suisse dans une station de ski qu'il fréquente depuis qu'on a augmenté de 35 dinars son salaire et de 7 dinars sa prime de rendement. Ridha a choisi de réveillonner avec sa petite amie, secrétaire dans une étude d'avocat ; ils hésitent encore entre Les Seychelles et Tahiti. Si leurs traitements, à moitié grignotés par les différents créanciers, sont versés avant le 25 décembre, ils comptent prendre l'avion au plus tard ce mercredi. Mouna, suppléante dans une école primaire, passera avec sa mère, veuve d'un ancien employé municipal, deux semaines à Londres et la nuit du jour de l'an à Vienne. Samir a déjà réservé une suite dans un luxueux hôtel de la Côte d'Azur : il a choisi de ne pas trop s'éloigner de la Tunisie pour pouvoir retirer les 50 dinars d'avance sur salaire qu'il a demandés à sa banque. Noureddine ira en famille successivement au Danemark, au Canada et en Espagne et rentrera fin décembre juste pour emprunter à son frère de quoi payer la facture d'électricité d'Octobre et de Novembre. Les autres enseignants rencontrés attendent pour aller qui à Charm el Cheikh, qui à Bora Bora qui à Sydney, que le ministère leur verse le rappel des dernières augmentations salariales, c'est-à-dire un peu plus de cent dinars ! Avec une telle somme, ce sera une quinzaine de folies et de nuits dansantes qui se prolongeraient jusqu'à l'aube, exactement jusqu'à l'instant où maman ou bien la tendre épouse viendront interrompre leurs rêves et leur rappeler le retour à la sordide réalité! B.B.H
NDLR : N'exagérons rien. Trêve de misérabilismes. Que font beaucoup d'enseignants avec les « honoraires » juteux et non imposables des heures supplémentaires ?