Il suffit de rappeler que l'université tunisienne compte 370.000 étudiants et qu'elle emploie 20.000 enseignants dans près de 200 établissements supérieurs qui placent chaque année 70.000 diplômés sur le marché de l'emploi pour avoir une idée objective de l'apport de l'enseignement supérieur dans la société tunisienne et, plus particulièrement, son rôle dans la croissance économique. Cette université est en plein chantier pour réussir l'internationalisation des cursus universitaires à travers la réforme Licence-Master-Doctorat « LMD » généralisée en 2008-2009 dans les parcours concernés. Les études médicales et la formation d'ingénieurs, font l'objet d'autres réformes pour optimiser les dites formations et certifier leurs qualités. Cette réforme en cours permettrait aux diplômes tunisiens d'obtenir des équivalences systématiques à l'échelle internationale et permettrait aux diplômés tunisiens de poursuivre leur cursus universitaire à l'étranger. Mais, s'il est encore très tôt pour évaluer cette réforme, il est possible d'évaluer les conditions dans lesquelles travaillent les enseignants et les étudiants pour la réaliser et, notamment, l'encadrement des étudiants et le dialogue entre les différentes composantes au sein de l'université.
L'encadrement M. Lazhar Bououny a affirmé que la massification de l'enseignement supérieur a créé des problèmes d'encadrement : « Seuls,16 % des enseignants appartiennent à la catégorie A. Ceci pose un véritable problème d'encadrement surtout lorsqu'on sait qu'il y a 33.000 étudiants en Master en plus des doctorants. Nous reconnaissons que ces enseignants font de grands efforts pour réussir dans leurs tâches. C'est ce qui explique la sollicitude de l'Etat à leur égard et l'institution de nouvelles indemnités pour valoriser l'encadrement. La rémunération de l'encadrement ne fait plus partie de la prime d'encadrement et de recherche. L'étude d'un dossier de recrutement dans le cadre d'un jury est désormais rémunérée à part tout comme l'encadrement d'un Master ou d'un doctorat. L'encadreur perçoit 400 dinars pour un Master et entre 1700 dinars et 2500 dinars pour un doctorat. L'indemnité de transport est de 80 dinars par déplacement. De telles mesures encouragent les autres enseignants à emboîter le pas à leurs collègues dans un esprit de saine concurrence». Dans le même esprit de valorisation de l'encadrement, le ministre a présenté le projet de loi en cours d'études sur le prolongement de la vie active de cette catégorie A d'enseignants du supérieur : « Ils n'obtiennent leur doctorat qu'à des âges avancés et ils ont encore beaucoup à donner pour leur pays. Les juniors ont besoin de leurs compétences et de leurs expériences», explique-t-il. Le ministre de l' l'Enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et de la Technologie a expliqué que la décision de ne plus exiger des Projets de Fin d'Etudes « PFE » pour les licences est due, entre autres, au manque d'encadreurs « La tendance n'est pas endémique à la Tunisie. Même, dans plusieurs établissements universitaires en Europe, on n'exige plus ce PFE », poursuit-il.
Le dialogue interrompu Concernant la question du dialogue entre les différentes composantes de la scène universitaire pour optimiser l'apport de chacune dans la réforme, le ministre a expliqué qu'il y en a plusieurs sous lesquels on peut poser cette problématique. D'abord, et concernant les étudiants, le ministre a précisé que l'administration n'a jamais fermé les portes au dialogue : « loin de là, ce sont les représentants de l'Union Générale des Etudiants de Tunisie qui ont opté pour la politique des chaises vides en refusant le dialogue. Ils ont notamment boycotté les diverses commissions LMD auxquelles ils ont été invités. Leur motivation est loin d'être l'amélioration de la situation dans laquelle se débattent les étudiants ». Il a poursuivi : « Cette situation ne plait guère à l'administration qui considère que notre université mérite mieux et que les étudiants ont besoin d'être encadrés par leurs disciples et, non par des professionnels de l'action syndicale. Les résultats des élections des conseils scientifiques ont montré l'impact de chacun sur les masses estudiantines» Ensuite, et en rapport avec les réflexions émises par les enseignants sur les programmes de la réforme LMD, M. Bououny a précisé en réponse à une question sur l'éventuelle imposition de ces programmes : « Mais l'aval de ces programmes n'est pas du ressort de l'administration. Les commissions LMD sont composées par des enseignants spécialisés qui synthétisent les projets qui leur sont présentés. 75 % des programmes de chaque licence sont pratiquement unifiés entre les différents établissements universitaires dispensant cette licence », s'exclame-t-il. Enfin, et à propos des réclamations des étudiants de l'Institut Préparatoire des Etudes Scientifiques et Techniques « IPEST » concernant les études à l'étranger, le ministre a expliqué que l'administration a reçu à plusieurs reprises les délégués des étudiants et leurs parents pour leur expliquer que « l'argent du contribuable doit servir la cause du développement du pays. Il n'est pas question que l'on débourse de l'argent pour prendre en charge des études à l'étranger alors que nos institutions « ENSI, ENIT, ENIM, ENIS, etc. » en dispensent des études meilleures. Les résultats le prouvent nettement. L'Etat est prêt à financer l'excellence ».
Les nouvelles équivalences Concernant l'impact de la nouvelle diplômation « LMD » sur les recrutements et, notamment, l'accès au CAPES, M. Bououny a précisé qu'une commission est en train d'étudier la question au niveau du premier ministère. Son département en fait partie et les résultats des différents travaux seront, en principe, annoncés d'ici le mois de juin.