Le Temps-Agences - A deux jours du Sommet du G20 demain à Londres, la tension est brusquement montée d'un cran, avec coup sur coup des menaces françaises de quitter la table si les résultats sont trop mous, et l'annonce de mesures de réglementation internationale des salaires des banquiers. "La crise est trop grave pour qu'on se permette de faire un Sommet pour rien", a lancé le président Nicolas Sarkozy en déplacement dans la Vienne. Le président français a fermement souligné qu'il avait demandé "des résultats". La ministre des Finances Christine Lagarde s'est chargée de traduire : le président quittera la table s'il n'est pas satisfait, notamment s'il n'obtient pas "l'éradication" des paradis fiscaux. M. Brown, auquel M. Sarkozy a encore "longtemps" parlé lundi soir, a semblé entendre cet appel à la moralisation en annonçant que les rémunérations des banquiers allaient faire l'objet d'une réglementation internationale. "Pour la première fois, les économies mondiales se mettront d'accord sur des règles internationales de rémunération des banquiers", a-t-il indiqué à l'issue d'un discours tenu à la cathédrale Saint-Paul de Londres, devant des leaders religieux et des organisations caritatives. "Il s'agira de règles mondiales et non simplement de règles qui s'appliquent dans un pays et peuvent être sapées dans le pays voisin", a insisté M. Brown. Le discours tout entier s'est voulu très moral. Enumérant un par un les principes altruistes des grandes religions du monde, il a remarqué que toutes prônaient "un puissant sens moral demandant la responsabilité de chacun et la justice pour tous", concluant qu'il était ainsi possible d'adopter des règles de moralisation des marchés qui conviennent dans le monde entier. Malgré ces bonnes paroles, "il reste beaucoup à faire" pour parvenir au meilleur compromis deamin, a reconnu hier le porte-parole de M. Brown, et notamment pour régler les dissensions sur les paradis fiscaux. Le Premier ministre luxembourgeois Jean-Claude Juncker a ainsi souhaité voir "les courageux en Europe", qui ont contraint son pays à assouplir son secret bancaire, "faire preuve du même courage à l'égard des Etats-Unis", du Wyoming ou du Delaware en particulier. Au même moment, l'ancien juge Eva Joly, spécialiste des affaires financières, mettait de l'huile sur le feu en remarquant que la City de Londres, où se tient justement le Sommet "est le plus grand des paradis fiscaux". Le président de la Commission européenne José Manuel Barroso a prudemment estimé qu'on ne pouvait attendre de "solution miracle" anti-crise demain, et qu'un autre Sommet international serait "utile" en 2009. La crise ne sera certainement pas finie alors, puisque l'OCDE a prédit hier pour 2009 une contraction de 4,3% du PIB des trente économies les plus développées de la planète. Dans ces conditions, le ballet diplomatique d'aujourd'hui s'annonce animé entre les chefs d'Etat. Le président Barack Obama, qui devait arriver hier soir à Londres pour ses premiers pas en Europe en tant que président des Etats-Unis, devait rencontrer les présidents russe Dmitri Medvedev et chinois Hu Jintao. La journée de mercredi s'annonce également marquée par de nombreuses manifestations anti-capitalistes. Scotland Yard, qui a mobilisé quelque 2.500 policiers, craint des débordements, notamment dans le quartier de la City, symbole du capitalisme aux yeux des manifestants. Gordon Brown a prévenu hier qu'"aucune violence ne pouvait être tolérée".