* Le calepin des contrôles et sanctions On parle chaque Ramadan de milliers de sanctions prises à l'encontre des marchands en faute, mais les mesures punitives ne semblent pas avoir d'effet sur les contrevenants (il s'agit dans beaucoup de cas des mêmes commerçants). Du côté des cafés ouverts pendant la journée, les locaux se transforment en fumoirs étouffants où l'on sert n'importe quoi aux non jeûneurs. Mais ceux qui ouvrent le soir ne sont pas moins asphyxiants ni plus propres et servent malgré cela des préparations suspectes qui s'avarient facilement. Dans les gargotes, les règles d'hygiène habituellement peu respectées, sont insolemment bafouées pendant Ramadan. Le consommateur n'a pas non plus le choix quant aux mets servis. En règle générale, il ne peut commander que des fritures préparées dans les pires conditions ou alors des sandwiches de misère qu'on garnit avec tout ce qui tombe sous la main. Ramadan 2009 coïncide avec la campagne préventive contre la grippe A et intervient dans une année consacrée à la lutte acharnée contre les méfaits du tabac. Ne sont-ce pas deux raisons suffisantes pour mener parallèlement un large mouvement dissuasif contre les commerçants peu scrupuleux qui ne ratent jamais une occasion (fut-elle sacrée comme c'est le cas en ce mois saint) de frauder et de mettre en péril la santé de leurs clients? N'est-il pas temps de sévir plus sévèrement contre ces contrevenants récidivistes? Les petits métiers spécifiques au mois du jeûne font certes vivre des milliers de familles, mais doit-on pour autant fermer les yeux sur la qualité des produits que les vendeurs commercialisent et sur les mauvaises conditions dans lesquelles ils conservent ou écoulent leurs marchandises ? Et ces locaux soi-disant corrects qui profitent de l'affluence propre aux soirées de Ramadan pour faire fi des règles d'hygiène minimales, les sanctionne-t-on assez ? Existe-t-il chez nous des contrôleurs d'hygiène en nombre conséquent ? Le contrôle nocturne est-il effectif ou fictif ? Pour répondre à ces questions et à d'autres relatives à l'hygiène dans les commerces pendant Ramadan, nous avons donné la parole à M. Mabrouk Nedhif, Directeur de l'Hygiène du Milieu et de la Protection de l'Environnement au ministère de la Santé publique, dont nous avons réparti les réponses selon les thèmes qu'elles abordent :
1/ Petits commerces de Ramadan -" Tout en étant conscients de l'apport financier et social de ces petits métiers qui se multiplient au mois de ramadan, nous restons intransigeants sur les conditions d'hygiène minimales que les marchands doivent respecter : il s'agit essentiellement de l'exposition des produits de consommation dans un présentoir vitré et couvert qui protège contre la pollution et l'action de certains insectes, de l'installation du commerce sur un lieu propre, éloigné de toute source d'infection ou de pollution, et de l'utilisation d'emballages non toxiques. Cependant, il revient surtout au citoyen de faire en sorte que ces vendeurs ambulants observent les bonnes règles d'hygiène. Notre rôle à nous consiste à diminuer les risques d'intoxication et à contribuer efficacement au respect de l'hygiène dans les locaux de plus grande capacité et qui servent ou commercialisent des produits alimentaires. Là nous effectuons les prélèvements et les analyses qui s'imposent et à la lumière des résultats obtenus, nous prenons les mesures punitives adéquates quitte à retirer des étalages de très grandes quantités de marchandises périmées. "
2/Les équipes de contrôle -" Nous sommes loin de disposer de l'effectif conséquent en matière de contrôle sanitaire et hygiénique. Je ne vous cache pas que nous agissons en fonction de nos moyens limités ; en revanche, nos équipes locales et régionales assurent, chacune dans son périmètre, une couverture sanitaire satisfaisante. "
3/Contrôle nocturne -" Il est vrai que ce type de suivi n'a commencé que l'année dernière, et s'effectuait seulement à partir de la deuxième quinzaine du mois saint. D'autre part, il concernait surtout les marchands de pâtisseries de l'Aid. Mais ce sera plus systématique cette année et l'opération touchera plus de locaux."
4/ Cafés ouverts le jour -" Vous avez raison de les comparer à des fumoirs asphyxiants, mais ces espaces présentent des risques réels pour le client même en dehors de Ramadan. Notre action anti-tabagique ne peut-être qu'évolutive. Nous souhaitons vivement l'inscription, dans un cadre juridique contraignant, de l'interdiction du tabac dans le maximum d'espaces publics et l'obligation pour les commerçants de répartir leurs locaux respectifs en espaces fumeurs et espaces non fumeurs. "
5/ Communication dans la campagne anti-tabac -" C'est vrai, les slogans et les formules utilisées laissent parfois à désirer ; dans ce domaine, nous avons beaucoup à apprendre. Nous ne disposons pas encore d'experts en matière de communication et nous nous fions le plus souvent à l'imagination des agents publicitaires lesquels emploient sur nos affiches et dans nos spots des textes et des images parfois inadaptés. L'efficacité de nos messages tient à l'étude approfondie du public visé et des procédés et discours qui agissent le mieux sur lui. Or une telle science, cet art complexe de la communication n'est pas encore maîtrisé sous nos cieux. "
6/ Sécurité alimentaire -" Nous essayons de mettre en œuvre une stratégie autour de laquelle existe un consensus international. Cette stratégie s'effectue selon trois principes : l'évaluation des risques, la gestion des risques et la communication des risques. La sécurité alimentaire ce n'est pas seulement une question d'hospitalisation et de soins, même si certaines hospitalisations successives à des intoxications collectives ont amené les gens à des attitudes plus responsables en termes d'hygiène alimentaire. " Propos recueillis par Badreddine BEN HENDA ------------------------------ Le calepin des contrôles et sanctions Du 20 juillet dernier au 14 août 2009, 28.928 visites d'inspection ont été effectuées dans divers locaux spécialisés dans la transformation, le stockage ou la vente des produits alimentaires. Elles ont abouti aux résultats suivants : *2334 analyses d'échantillons. *119 procès-verbaux. *2660 avertissements écrits. *158 propositions de fermeture. A partir du 1er Ramadan, on engage la deuxième série de contrôles qui se poursuivra jusqu'à la veille de l'Aïd et concernera tous les types de commerce comme l'indique le tableau suivant : *Tôt le matin : les abattoirs et les marchés de gros. *Pendant la matinée : inspection des marchés municipaux, des marchés hebdomadaires, des épiceries, des boulangeries, des commerces des viandes, et enfin des marchands de produits laitiers. *L'après-midi : les lieux de restauration collective entre autres les hôpitaux, les restaurants universitaires et les réfectoires des hospices pour personnes âgées. *L'après-midi : les locaux de préparation et de vente des pâtisseries, les cafés, les espaces de loisirs et les gargotes. Toutes ces visites seront effectuées par 250 équipes réparties entre 24 services d'hygiène régionaux, et agissant en collaboration avec d'autres inspecteurs relevant des ministères de la santé publique, du commerce et de l'artisanat, de l'intérieur.