Solutions locales pour un désordre global, le dernier film de Coline Serreau, donne la parole à des agriculteurs, des ingénieurs, des économistes, des biologistes qui, à travers le monde, dressent le constat des limites et des dangers de l'agriculture productiviste et s'efforcent d'inventer des solutions pratiques. Coline Serreau est une réalisatrice populaire et militante. Populaire dans ce sens que les personnages de ses films sont des gens ordinaires bousculés par les circonstances ou les sentiments, comme dans Trois hommes et un couffin ou Romuald et Juliette. Militante parce qu'elle propose un cinéma où le divertissement n'exclut pas la réflexion sur les questions de société. L'enjeu écologique est devenu un sujet cinématographique. Il est en toile de fond des scénarii des films catastrophes quand il n'en devient pas l'élément premier. Le Jour d'après de R. Emerich (2004) montre New York figée dans la glace après la fonte de la banquise polaire. Avatar de J. Cameron est, à ce jour, l'ode la plus coûteuse de toute l'histoire d'Hollywood au retour à la nature et à la simplicité rustique. A côté des fictions, la veine écologique se diffuse aussi dans le genre documentaire. D'abord avec Al Gore qui reçoit la même année 2007, le prix Nobel de la Paix et deux Oscars pour Une vérité qui dérange sous-titré « Le film le plus terrifiant que vous ayez jamais vu » et dans lequel il se met en scène en conférencier de l'apocalypse. Depuis, on a vu d'autre documentaires d'alerte : Home de Yann Artus-Bertand ou Le syndrôme du Titanic de Nicolas Hulot. Avec son titre peu engageant, Solutions locales pour un désordre global pourrait a priori, apparaître comme une variation supplémentaire et dont on va ressortir accablé sur les thèmes de la malbouffe dans les pays riches et de la famine dans les autres. Les intervenants que Coline Serreau a filmé en Inde, en Ukraine, au Brésil et en France se rejoignent sur une thèse simple : l'agriculture intensive telle qu'elle a été pratiquée pendant le dernier siècle a finalement eu des résultats catastrophiques sur l'environnement et aussi bien pour les producteurs que pour les consommateurs. Cette agriculture, appliquée à grande échelle, oblige les paysans à quitter leurs terres, appauvrit et pollue les sols, aboutit à la confiscation des semences, nécessite des subventions ici et contraint à l'ouverture des frontières ailleurs … Certes, le bilan proposé est sombre et on peut ne pas être d'accord. Mais ce que Coline Serreau parvient à éclairer ce sont des actes de renouveau et des acteurs convaincus. Certains sont connus comme Pierre Rahbi, pionnier de l'agriculture écologique et expert international pour la sécurité alimentaire. Il a participé à l'élaboration de la Convention des Nations Unies pour la lutte contre la désertification. Ou Serge Latouche, universitaire, critique inlassable de l'économisme et de la notion de développemtent durable qu'il considère comme une imposture. Dominique Guillet fondateur d'une association qui préserve et distribue les semences anciennes. Il y aussi des figures humbles : Maran Rehdi, un fermier indien, qui nourrit sa famille sur un minuscule acre de terre. L'ensemble compose un film chorale vivant et pédagogique ponctués par les conclusions drolatiques de Lydia et Serge Bourguignon, deux microbiologistes des sols, qui ont développé des méthodes permettant de réhabiliter les sols et de réinstaller des hommes dans des endroits abandonnés. En 1996, Coline Serreau avait réalisé La Belle verte, une fiction, discrètement accueillie, qui montrait trois personnages tombés d'une harmonieuse planète verte en plein Paris pollué. Elle revient sur le sujet de la terre nourricière de manière plus concrète, tout naturellement terre à terre.