Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.
Ces écrans qui font peur Conférence-débat avec Serge Tisseron et Noureddine Kridis à la Médiathèque Charles de Gaulle : «Faut-il avoir peur des images ?»
« La perception des images par la jeunesse tunisienne d'aujourd'hui, prise dans son contexte familial et social » tel a été le thème de la conférence-débat qui a eu lieu vendredi 23 avril à la Médiathèque Charles de Gaule entre Serge Tisseron, psychiatre et psychanalyste et Noureddine Kridis, professeur de psychologie, spécialiste en communication et lien social. La séance s'est ouverte par une conférence « Faut-il avoir peur des images ? » donnée par Serge Tisseron qui a commencé par définir le monde virtuel et les relations que nous entretenons aujourd'hui avec l'image. En effet, nous vivons dans une tourmente d'images et les technologies nous en fournissent chaque jour davantage. Que répond Serge Tisseron ? Il n'y a rien à craindre de l'image, nous dit-il ! Dans le virtuel, on est le spectateur de ses propres actions, ce n'est pas comme au cinéma où on regarde l'œuvre de quelqu'un d'autre en la subissant. Avant d'avoir peur de l'image, il faut tout d'abord s'en rapprocher et s'y intéresser, les jeux vidéo sont un lieu de métissage des cultures où sont représentés de nouveaux espaces, de nouvelles images et de nouvelles esthétiques. Ils ont de nombreux points positifs en dehors du mauvais usage que certains en font. Or, on ne parle d'images qu'à travers les dangers qu'elles présentent, a-t-il annoncé. On s'inquiète de leur pouvoir sur les esprits et les comportements, notamment chez les enfants en bas âge et les adolescents qui deviennent des drogués de l'écran en passant le plus clair de leur temps aux jeux vidéo et à Internet. Ces habitudes deviennent chez la plupart de jeunes une sorte d'addiction dont il est difficile de se débarrasser. Aussi peut-elle se répercuter sur les relations familiales et sociales. Pour le conférencier, les images, en tant que telles, ne sont ni bonnes ni mauvaises, c'est la répercussion qu'elles peuvent avoir sur notre vie quotidienne, notre mémoire, notre inconscient qui est à craindre. Le leurre des images, a-t-il souligné, nous ne le subissons pas, nous le fabriquons sans cesse. Dès que l'être humain s'habitue à une forme d'image qui ne crée plus de trouble chez lui, il en invente une autre qui le fait renouer avec l'angoisse de confondre l'image et le réel. C'est parce qu'à travers les images que nous choisissons, nous essayons de rendre visible et compréhensible, nos images du dedans. Mais à côté des images que nous sélectionnons, il y en a malheureusement d'autres qui s'imposent à nous sans que nous puissions nous y préparer, au risque de nous perturber gravement. Et c'est là où commence le danger. La solution ? Eviter les dangers de l'image et l'utiliser à bon escient. Ce qui nécessite d'adopter une nouvelle attitude devant ce flux d'images. Pour ce faire, « il faut qu'elles deviennent une occasion de nous informer les uns sur les autres par les échanges que nous avons sur elles. Elles permettront du même coup à chacun de mieux se connaître. Savoir les digérer et les utiliser pour enrichir sa personnalité. » Il faut être devant l'image et non pas dedans, a-t-il indiqué, de sorte que les images que nous craignons pourraient nous aider. Quant aux rencontres virtuelles, M.Tisseron ne s'y oppose pas et considère que « le passage par le Net est souvent un prélude à la rencontre réelle». Il a par ailleurs mis l'accent sur le fait qu'Internet, abstraction faite de son contenu reconnu valable ou non, est un moyen d'enrichissement mutuel des contributions de plusieurs participants d'un forum de discussion qui parviennent peu à peu à construire une pensée cohérente sur telle ou telle question, ce qui est un bon exemple d'élaboration de la pensée par la confrontation et les échanges. M. Tisseron a répondu au fur et à mesure aux questions posées par M. Noureddine Kridis qui ont porté sur les différentes stratégies de prévention à suivre pour lutter contre cette addiction et sur les pratiques qui consistent à minimiser cette hantise des images surtout chez les parents. Il a également donné des clarifications sur la théorie qu'il préconise quant au traitement de cette problématique de l'image. M. Tisseron a présenté au public sa propre méthode dans le domaine de la prévention des dangers des images ; c'est ce qu'il a appelé la règle de « 3, 6, 9, 12 ». En effet, pour Serge Tisseron, il convient de respecter quelques grandes règles de prudence pour le bon usage de l'écran par les enfants. Ces règles sont : pas d'écran avant l'âge de trois ans. Cela ne veut pas dire que l'écran, notamment la télévision, est toxique pour cette tranche d'âge. Mais, à cet âge, il faut privilégier les jeux manuels dont l'enfant a vraiment besoin en cette période de croissance. Ces jeux donnent libre cours à la créativité de l'enfant et l'aident à mieux se représenter l'espace. A six ans, on peut permettre à l'enfant d'accéder à l'ordinateur ou d'utiliser une console de jeux ou de regarder la télévision. Mais le temps imparti à ces différents écrans ne doit pas dépasser un seuil raisonnable. A partir de 9 ans, l'enfant peut être autorisé à naviguer sur Internet mais doit être amplement informé par ses parents. Dès l'âge de douze ans, l'enfant, devenu adolescent, peut revendiquer un ordinateur personnel que les parents sont appelés à lui accorder. Sans oublier de le protéger.