La nouvelle création mise en scène par Noomen Hamda, se veut une pièce qui dénonce dans un langage circonstanciel toutes les absurdités larvaires tricotées au quotidien. Cette pièce place des personnages dans des situations différentes dans un hôpital lors d'une soirée exceptionnelle, le Nouvel An. Les personnages ? Ils sont cinq. Le patient, le médecin, l'infirmière (épouse du médecin), l'infirmier et une jeune femme qui attend des nouvelles de sa jumelle. Tous les cinq sont à la recherche d'une part d'eux-mêmes perdue ou enfouie. Chacun d'entre eux vit dans un corps inhabité. « Un cas comateux est –il là parmi nous ou autre part… explique le metteur en scène Nooman Hamda. J'ai pu constater moi-même cet état auprès des médecins. Le sort du comateux est lié en fait à quelques fils et à certaines machines. Plusieurs interrogations s'ensuivent et notre pièce propose de regarder la mort en face, selon un parcours qui retrace symboliquement la prise de conscience progressive de la mortalité de l'être au fil de la vie et les questionnements qui en découlent. La mort interpelle. Le caractère aléatoire imprévisible de sa survenue, élément marquant d'une incertitude et d'une finitude que l'on s'efforce d'oublier, déstabilise profondément l'individu ou la communauté qui lui est confrontée. D'autres problèmes surgissent surtout que ces médecins vivent quotidiennement des cas comateux ». La pièce explore par ailleurs, les lieux réels ou imaginaires qui lient les vivants et les morts ainsi que les frontières mouvantes entre ces deux mondes, domaines d'élection des fantasmes les plus universels. Il s'en suit des situations complexes. Chacun a ses soucis. Ainsi l' infirmière qui défend ses droits à elle d'exister. Le médecin tient à sa vie professionnelle jusqu'à la perte. Un autre infirmier n'arrive pas à s'exprimer. Il est étouffé . Une jeune fille à la recherche de sa soeur jumelle depuis 14 ans qui ne reviendra jamais. Le metteur en scène explique : « cela m'est arrivé quand j'ai décidé d'écrire cette pièce . Je n'imagine pas que je serai, trois ans plus tard, plongé quinze jours durant, dans le coma,. Quand j'en sors, j'ai mis du temps à me remettre à ma pièce. Auparavant, j'avais fait tout un travail auprès de médecins dont j'ai suivi particulièrement l'un des patients. Entre ce que j'avais pressenti et ce que j'ai vécu dans ma propre chair, il y a des correspondances troublantes. Partout dans le monde, des milliers de rescapés rapportent des témoignages bouleversants. Le scénario est souvent le même : déclarée cliniquement morte, la personne se sent sortir de son corps. Son "âme" s'engage alors dans un tunnel au bout duquel resplendit une lumière extraordinaire. Ainsi « la vie à corps perdu » reflète le mystère de la vie après la vie. Sur scène, on voit des personnages déchirés poursuivant leurs moitiés perdues et introuvables. Un décor très sobre avec quelques perfusions, le passage d'hommes et de femmes en blanc et en vert. Le patient( Sadok Halwes), l'infirmière ( Jamila Chihi), le médecin ( Ghazi Zaghbani), l'infirmier( Abdelmonôem Chouayet), et la parente, ( Amina Dachraoui), vivent des moments pénibles de doute. Les minutes, les heures, les jours et les nuits passent. De leurs conversations anodines, surgissent peu à peu, leurs blessures profondes, les questions et les désirs trop longtemps tus. De la souffrance à la douceur paisible, leurs mots hésitants et leurs corps ébranlés, s'unissent dans un poème scénique empreint de vie et d'indicible. On a recours à l'expression corporelle à la danse, à la suggestion, à l'humour, à la musique et aux mots. Bref, ce nouveau spectacle sur le thème de la vie dans le corps sort des sentiers battus. La vie à corps perdu, c'est peut-être l'histoire de chacun de nous, une création qui pose tant d'interrogations sur le mystère de la vie.