Après la boulimie des spots publicitaires diffusés anarchiquement pendant le mois de ramadan et suite aux doléances d'un grand nombre de téléspectateurs victimes de bombardement publicitaire sans répit surtout lors des feuilletons ou des séries télévisées qui subissaient plusieurs interruptions publicitaires… Un arrêté du ministre de la Communication en date du 7 septembre 2010, paru au JORT du 17 septembre 2010, vient de fixer les modalités de diffusion des spots publicitaires sur les chaînes de télévision publiques et privées. Ainsi, selon l'article 1 de cet arrêté « la durée maximale consacrée à la diffusion des spots publicitaires est fixée à 10 minutes pour chaque heure d'antenne, et de 14 minutes pendant le mois de Ramadan, étant précisé que la durée maximale d'une seule page publicitaire sans interruption ne doit pas dépasser 8 minutes. Est exempté de ces dispositions le temps consacré à la diffusion des spots publicitaires d'intérêt général qui n'est ainsi pas comptabilisé. En outre, une période minimale de 15 minutes doit séparer deux interruptions publicitaires successives à l'intérieur d'une œuvre télévisuelle ou cinématographique, alors que la durée maximale d'un seul spot publicitaire est fixée à 60 secondes. » L'article 2 stipule que « Ces dispositions qui concernent les chaînes publiques et privées entreront en vigueur à partir du premier octobre 2010 et en sont exclus les spots publicitaires diffusés pendant la retransmission en direct des manifestations sportives et culturelles qui sont assujetties à un régime spécial fixé par le ministre chargé de la communication. » Un mal nécessaire Nous sommes entourés tous azimuts de publicité. A la télé comme à la radio, dans les rues et dans les lieux publics, dans les journaux et sur Internet. La publicité est omniprésente : elle est sur nos murs, sur nos vêtements, sur nos moyens de transport publics et privés. Le matraquage publicitaire nous suit partout, nous guette dans tous les coins et nous attend au tournant, nous prend parfois à l'improviste au point qu'on ne peut pas l'éviter ! C'est que dans une société de consommation, comme la nôtre, on ne peut se passer de publicité. Les commerçants ont bien besoin de faire la réclame de leurs marchandises et d'annoncer et de vanter leurs nouveaux produits auprès de leurs clients en vue d'assurer la vente et réaliser le maximum de profit, quitte à tomber dans une concurrence exacerbée, voire déloyale, causant parfois des préjudices à certaines entreprises ou certains commerçants. La publicité est donc devenue nécessaire dans la vie économique et commerciale, c'est un moyen efficace qui aide à écouler la marchandise et promouvoir la production de tel ou tel produit et qui contribue à établir un équilibre entre l'offre et la demande sur le marché. C'est surtout sur les chaînes de télévision que la publicité se manifeste de manière plus flagrante en s'immisçant dans les différentes émissions et programmes dans le but de maximiser l'audience, le but étant de transmettre le message à tous les gens et susciter chez eux toujours de nouveaux besoins à satisfaire. C'est pourquoi les spots publicitaires sont très courants dans les feuilletons et les séries, surtout au mois de ramadan, là où la majorité des familles se trouve réunie devant le petit écran. Qui trop embrasse mal étreint Il est de l'avis de tous que trop de publicité peut nuire à certaines gens, voire à la publicité elle-même ! Abstraction faite des frustrations qu'elle peut créer parmi les familles nécessiteuses qui regardent les produits proposés à la télévision par les spots publicitaires sans jamais pouvoir se les procurer ! Si la publicité est nécessaire pour la propagande et la vente des produits, il n'en demeure pas moins vrai qu'elle peut causer des ennuis auprès des téléspectateurs surtout quand elle devient systématique et démesurée. D'aucuns pensent que la publicité télévisuelle durant le mois de ramadan dernier a dépassé les limites habituelles : selon la Société Sigma, la fréquence de la publicité accompagnant les programmations ramadanesques des chaînes tunisiennes a atteint 9200 secondes par jour. Ce qui est un chiffre très élevé ! C'est la raison pour laquelle le Ministre de la communication a pris la décision de réglementer le secteur de la publicité dans son récent arrêté. Il est à noter les performances réalisées par les annonceurs et les agences publicitaires (TV, radio, Internet, affichage…) dans ce domaine en vue d'encourager le consommateur à acheter des produits tunisiens et, par là même, promouvoir la production tunisienne et on ne peut qu'apprécier les évolutions technologiques et artistiques qu'a connues ce secteur. Cependant, le fait de précéder ou d'interrompre plusieurs fois, presque toutes les dix minutes, une émission ou un feuilleton pendant les prime time en y insérant plusieurs pages publicitaires, cela devient encombrant et énervant pour le téléspectateur toujours pressé de voir la suite des événements de sa série préférée. En faisant précéder par d'interminables spots publicitaires tel ou tel programme tant attendu par le téléspectateur oblige souvent ce dernier de zapper en quête d'une autre chaîne en attendant le passage de la publicité ; car à force d'être matraqué par la même publicité le téléspectateur s'ennuie et n'est plus intéressé par le produit annoncé ! En effet, il n'est pas toujours vrai qu'une boulimie publicitaire est le seul facteur garant d'attirer la clientèle ; le meilleur spot publicitaire demeure celui qui atteint son but (accrocher les téléspectateurs !) avec peu de choses en peu de temps. Une overdose est toujours nuisible ! Respecter la nouvelle réglementation Le récent décret est venu donc réorganiser ce secteur devenu anarchique, notamment sur nos chaînes de télévision publiques et privées. Les dispositions de ce décret sont claires et appellent les agents publicitaires et les responsables des chaînes de télévision à respecter les durées maximales destinées aux spots publicitaires et fixées par le dit décret. Ce dernier est déjà entré en vigueur depuis sa parution dans le JORT et par conséquent, le téléspectateur tunisien verra dans les prochains jours un changement dans le rythme des spots publicitaires, mais il devra attendre le ramadan prochain pour juger si vraiment les choses ont changé. Cependant, il paraît que les chaînes privées seront plus touchées par ces nouvelles mesures, d'autant plus que leurs seules ressources proviennent de la publicité. Comment vont-elles faire pour tirer leur épingle du jeu ? Par ailleurs, faudrait-il un jour supprimer carrément la publicité des chaînes publiques puisqu'elles sont financées par l'Etat et par les citoyens (redevance ERTT figure sur la facture de la Steg), comme il en est le cas dans plusieurs pays ? La télévision est avant tout - et doit rester - un moyen de culture et de divertissement et pas une source d'enrichissement par le biais de la publicité. Hechmi KHALLADI