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Des Martyrs sont tombés, des Martyrs sont nés
Chronique commémorative - Morts pour la Tunisie
Publié dans Le Temps le 17 - 10 - 2010

• Evénements, réflexions et hymne à l'héroïsme - C'est jeune, très jeune de tomber en plein champ de bataille, pour un jeune et brillant officier d'à peine 35 ans.
Martyr de la bataille de Bizerte, le Commandant Béjaoui est Saint-Cyrien, artilleur, et un des premiers fondateurs de l'armée nationale.
Le Commandant et ses Compagnons sont tombés héroïquement pour leurs idéaux d'indépendance.
Dans l'air du temps et en se promenant du côté du vieux port de pêche de Bizerte, rénové et fort agréable ; la curiosité du flâneur que je suis, avide d'art et d'histoire, s'est portée sur la place du Martyr Commandant Béjaoui.
A ma surprise, la réponse fut précise et élogieuse, émanant justement de l'antiquaire d'art du coin, Monsieur Hédi Turki, de son vrai nom. Hédi Turki de Bizerte, non l'éminent peintre justement apprécié de Tunis. Il y en a deux ! Le Tunisois et le Bizertin ; Le connu et l'anonyme. C'est l'anonyme antiquaire de Bizerte, que concerne le propos et ce qui suit.
Un Monsieur unique en son genre. Très cultivé, amateur d'art et d'histoire.
Oui mais, quel est le rapport avec le Commandant Béjaoui ?
C'est Monsieur Hédi Turki l'antiquaire qui m'indiqua la place commémorative du Commandant Béjaoui. Et en revenant de suite, après la visite de la place, une discussion s'engagea :
- Am Hédi, la plaque et la place commémoratives ne reflètent pas ce que vous m'avez dit d'élogieux sur le Commandant Béjaoui.
- Comment ça ?
- Le monument, la place commémorative et le petit jardin qui l'entourent ne sont pas bien entretenus. Le Commandant a donné sa vie à la nation et il est tombé pour ses idéaux d'indépendance.
Récit de la scène de l'époque :
« Et c'est le face à face ; sur une petite place stratégique à proximité de la ville arabe. Dans un recoin de la place, des paras français tirent rageusement à la mitrailleuse, le Commandant Béjaoui est touché à mort. Un sous-officier tunisien rampe pour s'enquérir de son état et récupérer son arme automatique. Le Commandant Béjaoui s'en empare, se relève et riposte. En avançant blessé, pour juger de la situation et riposter encore ; un half-track (tank) apparaît au bout de la ruelle et tire une longue rafale qui touche encore mortellement le Commandant. Toutes les armes des Tunisiens tirent en même temps. Devant l'intensité du feu, le half-track rebrousse chemin. Le Commandant est à terre. Deux soldats se portent à son secours et le transportent vers une mosquée-centre de soins toute proche. Le Commandant, encore conscient, demande à ses hommes de retourner au combat. Une bataille terrible se déroule sur la place. Appuyés par les blindés, les Français n'arrivent pas à forcer le passage. L'un des officiers retourne à la mosquée pour s'enquérir de l'état du Commandant qui venait de rendre l'âme. C'était un vendredi après-midi, le jour et le moment de sa naissance !»
- Dieu soit loué; ceci est véridique. Mais cher fils, je ne suis pas en tort, vous vous limitez aux symboles.
Et voilà l'homme d'art et d'histoire, qui est parti dans ses discours historiques et les hautes sphères intellectuelles…
-Am El Hédi, soyez réaliste ! Moi, du temps où j'étais étudiant à Paris, j'ai vu de mes propres yeux, le 14 juillet, un char défiler sur les Champs-Elysées, portant le nom du Commandant Béjaoui en tant que Saint-Cyrien et en commémoration à la bataille de Bizerte et aux soldats qui ont tenu tête à la France et morts pour leurs idéaux. Quelle leçon !
- Vous êtes relativement jeune par rapport à ces événements. Je vais vous apprendre quelque chose :
Les idées nobles et la mémoire sont éternelles, l'artificiel et le symbolique sont éphémères.
- Am El Hédi, vous en avez dans la tête !
- Cher fils, vous n'avez rien vu ! Il suffit de me provoquer. Mais pas souvent, ces temps je me sens un peu fatigué et l'âge commence à me peser un peu.
Concernant le Commandant Béjaoui, savez-vous qu'il a participé activement aux négociations de Rambouillet avec Le Général de Gaulle ?
Avec la délégation nationale, il a pesé de tout son poids, de son amitié avec le Général de Gaulle et de sa persuasion, afin d'infléchir la position française concernant le statut d'indépendance de notre jeune République tunisienne d'alors.
Am Hédi raconte :
A cette époque, j'ai vécu la bataille de Bizerte, j'ai combattu et j'étais présent lorsqu'on a soulevé Le Commandant Béjaoui tombé sous la rafale foudroyante. Soldats et civils le transportèrent à la hâte, à la Mosquée avoisinante, criblé de balles, mouillé de sang, la chair déchirée de haut en bat de la poitrine par l'impact de la rafale froide, paralysante et mortelle. Soulevé et amené, ainsi, pour lui accorder un privilège de reconnaissance de dernier instant : Rendre l'âme dans un lieu sain et vénéré dans la Mosquée avoisinante.
Accomplissant sa mission jusqu'au dernier soupir, Le Commandant Béjaoui n'a pas voulu céder les documents et les cartes militaires opérationnelles, qu'en mains sûres ; murmurant dans l'ivresse de la mort, le serment coranique et les noms de ses enfants dont le nouveau né Abderrazak.
Et puis, il y a eu les obsèques officielles à la Kasbah avec les Compagnons tombés avec lui. Par la suite, l'enterrement à Carthage Byrsa, lieu de sa naissance.
La sortie du cercueil du domicile, a été terrifiante.Le cercueil était enveloppé du drapeau national et sur lequel il y avait ses galons et ses bottes de combat tachées de sang noirâtre.
En ce moment, était présent un jeune officier distingué et plein d'avenir; affecté, serein, ému, très ému et malgré la réserve de son rang militaire, il n'a pas pu retenir ses larmes chaudes venant du cœur. En effet, son meilleur compagnon le quitte; lui promettant certainement à cet instant et sous serment posthume que désormais cette nation demeurera libre et indépendante. Le temps est passé et promesse tenue ; le serment s'est concrétisé et se concrétise fortement de nos jours en mémoire du sacrifice des martyrs. Le brillant jeune officier d'alors, n'était autre que notre futur et distingué Président de la République Zine El Abidine Ben Ali.
Le cortège s'est ébranlé en silence, accompagné de versets coraniques ; tout âge, toutes races et religions confondues ; en compassion et unis, vers la destinée inévitable de chacun.
Je suis rentré à Bizerte, le soir même ; un œil qui pleure un œil apaisé, triste, endeuillé, épuisé; cependant, la tête haute et fier : J'ai accompagné, ce jour-là, un Martyr et ses Compagnons soulevés au ciel et une nouvelle nation commence à naître.
Et Tous Cela, ça s'inscrit sur votre plaque commémorative si souhaitée ?
- Non, je ne pense pas! Au fait, pendant que j'y pense, combien ça coûte le vieux tableau accroché en face?
- Décidément, vous ne pensez qu'argent. L'argent c'est bien, mais il n'y a pas que ça dans la vie, il y a d'autres valeurs. Payez ce que vous voulez, prenez-le gratuitement mais pour l'amour du ciel, écoutez ce que je raconte, pour une fois que le sujet est sérieux et me tient à cœur. C'est vous qui êtes venu me voir, non ?
- Oui, je ne sais plus !
Am El Hédi m'a déstabilisé. Je suis bouleversé. Décidément, les personnes âgées m'ont toujours étonné ; sûrs d'eux et humbles. Am El Hédi n'a pas apprécié ma réflexion d'interruption inopportune, de sens figuré, précipitée, non réfléchie et non mûrie. Il est un peu énervé ; ça se voit dans ses yeux bleus. Des yeux d'habitude bleu clair, brillants de lumière ; devenus soudainement rouges, couleur bleu foncé, étincelants d'éclair. Changement de couleur sous l'effet de l'énervement apparent mais maîtrisé.
Sa réponse fut immédiate et sans appel. Une réponse de remise à l'ordre et constructive. La voici :
- Justement, vous ne savez pas et vous avez beaucoup à apprendre ! Dans vos raisonnements vous oubliez parfois l'essentiel, l'humilité et la dignité. Autre chose à vous autres les bien pensants : La critique constructive et fructueuse est toujours la bienvenue, la critique futile et destructrice, non ! Ceci dit ; je suis persuadé que vous êtes prédisposé et de bonne volonté, comme toute votre génération. Un peu de clarté dans vos idées, vous y arriverez, Inchallah. N'oubliez pas, c'est aux générations montantes qu'est transmis le flambeau ; responsabilité vénérée, de génération en génération, pour la Tunisie éternelle.
Enfin un éloge, ça remonte le moral dans pareille situation de chagrin et de questionnement.
- Am El Hédi, que faire ? Je suis troublé.
- Pensez à lui, bénissez son âme et n'ayez crainte. C'est un Martyr du paradis. Du temps du Jihad-Imededdine, c'était même une mort souhaitée. S'il y a prise de conscience commémorative c'est tant mieux, sinon le bien est fait et la mémoire est intacte.
Partez en paix, que Dieu soit avec vous.
Dans ses lancées oratoires convaincantes, Am El Hédi s'est fatigué, il s'est assis. Il veut le silence et la paix. Il veut être seul. Maintenant, c'est sûr, il pleure. Il pleure sans larmes, c'est plus éprouvant. Ça se voit toujours dans ces yeux bleus ; devenus lentement, couleur bleu sombre, bleu nuit, sans lumière, obscur, presque noir.
En repartant après le salut, avec des larmes sèches, réconforté néanmoins chagriné, mes pensées sont allées à tous les Martyrs de notre pays, égaux les uns aux autres, représentant la fierté et l'identité patriotique de notre nation montante.
Oui, à tous ceux qui sont tombés pour la Tunisie; à tous ceux qui ont donné leurs sangs chauds ; en récitant des versets coraniques tout en agonisant en silence, avec douleurs et sans larmes. Comme ravis, ainsi, de monter aux cieux.
Quel héroïsme et quel courage !
Sommes-nous capables de ça, de nos jours ?
Question pertinente qui nous interpelle et particulièrement les générations montantes, fleuron de la Tunisie moderne et de l'Ere nouvelle.
Certainement, je reste résolument confiant dans les générations montantes.
Moralité de l'histoire :
Et depuis, Am El Hédi et moi, sommes devenus amis. C'est l'amitié de deux générations sans oublier aucune. Chacune avec son passé et son avenir, ayant en commun divers événements et valeurs pour continuer ensemble le chemin de la vie, dans le respect.
Et avec le temps, je me rends compte que Am El Hédi a un destin privilégié ; il a vécu l'époque du bon vieux temps et de l'indépendance.
Nous aussi, avec lui, nous vivons actuellement l'époque du bon temps de la Tunisie de l'Ere Nouvelle et de l'Avenir.
Maintenant, c'est sûr, il est joyeux. Ça se voit, comme d'habitude, dans ses yeux bleus ; devenus progressivement, bleu magnifique, couleur bleu ciel, teinté d'un Beau Mauve Azur, plein de lumière.
Sacré Am El Hédi ! Le Combattant, La mémoire collective, l'homme d'art et d'histoire. Et puis, quels yeux et quelles couleurs avec les nuances du bleu !


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