Le taux moyen de participation des jeunes à la vie politique ne dépasse pas 22% à l'échelle internationale! Bien qu'elle se situe au dessus de cette moyenne mondiale, la Tunisie ne déroge pas à la règle. La proportion des jeunes tunisiens qui s'intéressent à la politique tournerait autour de 28%. Loin de ces chiffres têtus révélés régulièrement par les sondages, la période actuelle semble bien morne comparée à l'effervescence de la montée de l'engagement militant de la jeunesse au cours des années 60 et 70. Pourquoi regrette-t-on le fait que les jeunes d'aujourd'hui tournent le dos à l'action politique ? Quelles sont les obstacles à leur participation ? Leur désintérêt n'est-il pas plutôt un appel au changement afin que les structures dans lesquelles ils s'insèrent soient plus conformes aux besoins de notre temps ? C'est à ces questions lancinantes et d'une brûlante actualité à l'heure où tous les gouvernements de la planète s'efforcent de conjurer le risque de glissement de la jeunesse vers le fanatisme, la haine, l'extrémisme et le terrorisme, que la troisième séance du 22ème symposium International du Rassemblement Constitutionnel Démocratique (RCD), a tenté de répondre. Indiquant que l'aversion des jeunes à l'engagement politique ne se manifeste pas seulement par une plus faible participation aux élections, mais principalement par une désaffection à l'égard de la vie publique en général, M. Samir Lââbidi, ministre de la Jeunesse, des Sports et de l'Education physique, a révélé que la moyenne mondiale de la participation des jeunes à la vie publique se situe à environ 22%. En Tunisie, ce taux est de l'ordre de 28% selon les conclusions de la dernière consultation nationale sur la jeunesse. Les formes de cette participation ainsi que les lieux où elle s'exerce sont multiples. Elles vont de l'exercice du droit de vote à l'adhésion aux partis politiques, en passant par l'engagement dans les associations, la présence dans les institutions élues et l'implication dans les comités de classes. Rompre avec l'approche paternaliste M. Laâbidi a fait savoir que la désaffection de la jeunesse pour la participation politique s'explique par la fragilité de la situation des jeunes, qui placent, partout dans le monde, la poursuite de leurs études, la recherche d'un emploi et la constitution d'une famille au premier rang de leurs priorités. Le ministre a également pointé un doigt accusateur vers l'approche paternaliste adoptée souvent par les diverses institutions de socialisation. «Ces institutions traitent souvent la question de la jeunesse selon une logique paternaliste qui considère cette frange de la population comme étant une source d'ennuis. Partant de cette perception, les institutions de socialisation cherchent à apporter des solutions conçues par des adultes aux divers problèmes des jeunes, lesquels ont , au contraire, besoin d'être consultés, écoutés et sondés sans restrictions », précise M. Lââbidi. Une plus grande participation des jeunes à la vie publique nécessite en amont une rupture totale avec cette approche paternaliste à travers la mise en place progressive d'une approche globale qui considère le jeune comme étant acteur de développement et une solution aux divers problèmes de la société. « De la famille aux partis politiques en passant par l'école, les organisations de la société civile et les médias, les institutions de socialisation sont plus que jamais appelés à remplacer le discours langue de bois et imprégné des idéaux du passé par un discours réaliste et émanant souvent des jeunes eux-mêmes pour réhabiliter leur crédibilité auprès de cette frange de la population ». Pour sa part, M. Nader Dhabi, membre du Conseil des notables de Jordanie (parlement, NDLR), et ancien Premier ministre jordanien, a estimé que le désintérêt des jeunes pour la chose publique est en quelque sorte un appel au changement afin que les structures dans lesquelles ils s'insèrent soient plus conformes aux besoins de notre temps. «Les jeunes portent bien souvent un regard neuf sur le monde dans lequel ils évoluent et sont, à ce titre, susceptibles d'apporter un éclairage novateur sur des réalités complexes», a-t-il indiqué. Et d'ajouter : « quand il s'agit de la Palestine par exemple, ce sont ces mêmes jeunes qu'on croyait totalement démissionnaires qui se tiennent régulièrement informés et manifestent dans les rue. Certains même succombent aux sirènes du repli identitaire et religieux…Cela prouve que le problème ne réside pas dans les jeunes eux-mêmes, mais dans le discours qui leur est adressé». Les nouvelles technologies à la rescousse La rénovation du discours ciblant les jeunes passe également, selon lui, par l'exploitation du potentiel énorme qu'offre désormais la révolution numérique. En effet, le courrier électronique, les réseaux sociaux, les blogs, les web radios et le téléphone mobile se positionnent désormais comme de nouveaux espaces de débat et de participation politique très prisés par les jeunes. D'autre part, Mme Maria Rauch Kallat, ancien ministre autrichien et présidente de l'Association d'amitié tuniso-autichienne, a souligné la nécessité d'introduire les notions de la participation politique et des institutions démocratiques dans les programmes d'éducation. « Les gouvernements devraient encourager la création des comités de classes au sein desquels un seul élève élu peut devenir l'interlocuteur de l'administration de l'établissement éducatif ou de l'enseignant », a-t-elle suggéré. Mme Rauch kallat a également plaidé pour un abaissent de l'âge de vote à 16 ans, ainsi que pour la création de structures réservés aux jeunes au sein des associations et des partis politiques.