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Une rivière nommée AVENUE
Publié dans Le Temps le 06 - 02 - 2011

• Au poète Ridha JALLALI, qui vécut comme un paria et mourut comme une outrance - Des jours et des nuits y coulaient… roucoulaient, s'y décousaient, s'effilochaient puis ramassaient la poussière en larmes d'émeraudes de leurs yeux de minuit et se recousaient pour couvrir de leurs manteaux de velours le corps frigorifié d'un poète oublié.
Où es-tu donc passé Ridha Jallali avec ton premier cheveu blanc, tenant à ton misérable cartable de plastique pour ne pas tomber, toi qui roulais comme un vélo – et les vélos – c'est connu, quand ils s'arrêtent ne peuvent que tomber ?
Dans quel fossé dors-tu aujourd'hui toi qui n'as jamais fermé les yeux ?
Avec tes rêves de nid d'oiseaux pillé ?
Avec tes rêves de piège à dragon et tes doigts crispés sur les sexes des momies évaporées, édulcorées, puis vendues comme bonnes à tout faire chez les nouveaux sultans de la plus grande arnaque, la plus grande escroquerie qu'on nomme pompeusement liberté, ordre justice.
Avais-tu jamais eu besoin de tout cela, toi qui as respiré le mal de vivre le mal d'aimer sur cette pierre de faux marbre qu'on t'a léguée à l'entrée de la maison de la culture avenue de Paris ou avenue des chats perdus, ce gros brother frère maudit, comme toi, seul dans la nuit, que tu suppliais de venir entre tes bras chercher un peu de réconfort, un peu de chez toi que tu n'a jamais eu et qui refusait… Peut être savait-il, lui aussi, que ce n'était pas lui que tu appelais mais ta petite sœur qui tirait l'unique couverture à elle dans la nuit, les longues nuits d'hiver, le long le terrible hiver de la solitude et du besoin.
Tu avais une sœur et tu pleurais.
Tu avais des frères et peut être d'autre sœurs et tu pleurais.
Tu avais une mère un père des cousins des cousines des voisins des voisines et tu pleurais.
Peut être pleurais-tu parce que tu n'as jamais eu d'autre force que celle de te répandre en larmes pour couvrir le désert de ton âme par cette mer qui t'a toujours fait défaut ?
Aujourd'hui tu es parti comme ça comme tu es venu méconnu ou inconnu cela importe peu mais cette avenue à laquelle tu t'accrochais comme à ton misérable cartable en plastique est enfin revenue depuis les temps que tu es parti on ne l'a plus jamais revue. La révolution est passée par là mais toi tu t'en fous. Tu dors !
Que vont écrire ces milliers de poètes maintenant que les jeux sont faits que les tyrans – qu'ils ont mille fois élus – ont pris la poudre d'escampette en leur laissant les vieux meubles des maisons de culture à partager. Ils ne t'ont jamais aimé mais toi tu t'en fous. Tu dors !
Des fois tu m'appelles alors je viens te parler, te donner des nouvelles sur cette pierre de faux marbre qu'ils t'ont léguée à l'entrée de la maison de la culture avenue de Paris mais toi tu t'en fous. Tu dors…
Tu ne prends même pas la peine de me donner des nouvelles de ceux qui, depuis t'ont rejoint dans l'oubli, tous ces tordus de la citrouille qui peuplaient l'avenue ces oiseaux de nuit dont tu aurais bien voulu piller les nids et qui ne t'ont jamais écouté, jamais entendu. On n'entend bien qu'avec le cœur, et le leur était comme un fruit pourri. Seul Hammadi Laajimi avait une chanson dans le cœur, une chanson banale parlant d'un jeune homme et d'une jeune fille, une chanson de tous les temps, de tous ces Temps-Chacal, ces Temps-Crabe, ces temps où la malédiction avait le sourire narquois d'un chef de cellule au menton glabre au ventre horriblement répu ceux qui se frottent la panse et qui pensent que penser nuit à la santé… à la santé du pays. Ceux qui n'ont pas su ni quand ni comment te tuer ni pourquoi es-tu parti et tu voudrais que je te parle de l'avenue… Ils ont délogé les fleuristes, exilés derrière leur mausolée phallique du sept novembre là-bas tout là-bas au commencement de ce port où tu n'es jamais allé.
Dans le vide laissé par les fleuristes sont venus s'installer les vendeurs de cigarettes de contrebande juste après la révolution… Juste après la révolution.
Ils ont aussi changé les vieux pavés, changé les lampadaires et ils ont même appelé l'avenue les Champs Elysées… En toute légalité avec la pudeur qui s'impose sans aucune proportion gardée car ils se sont appropriés en toute légalité avec l'impudeur qui est la leur… Ils ont même tenté de teindre la lune en mauve et ils y sont peut-être arrivés. Personne ne le sait.
Nous avions tous les yeux fermés, les mains menottées, les lèvres gercées… Nous n'avons rien ressenti, rien dit, rien soufflé. Peut-être même que certains d'entre nous étaient réellement heureux jusqu'à ce jour ou la révolution a débarqué. Il y a eu des blessés et des morts mais toi tu t'en fous. Tu dors… Dors bien mon joli cœur de pigeon. Dors bien mon premier et dernier martyr de la douleur du verbe aimer.
Et tu voudrais que je te parle de l'avenue ?
Ce n'est plus une avenue tu sais c'est un zoo minable où tous les cafards, tous les rats viennent s'échouer.


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