Le Temps-Agences - Le roi Abdallah d'Arabie saoudite dispose de revenus pétroliers suffisants pour éviter un mouvement comme ceux qui ont soulevé les masses en Egypte et en Tunisie, mais ce monarque âgé va devoir intensifier les réformes pour contenir les dissidents, estiment analystes et diplomates. Si le premier pays exportateur de pétrole a placé plus de 400 milliards de dollars pour répondre aux revendications sociales, il lui faut traiter des questions comme l'emploi, le logement et les aspirations d'une "cybergénération" impatiente de se faire entendre. Pendant que, rivés à leurs écrans de télévision, ses compatriotes assistaient à la chute de Ben Ali puis à celle de l'Egyptien Hosni Moubarak, Abdallah a passé les derniers mois en convalescence à l'étranger, laissant les réformes entre parenthèses. Dans un pays de 19 millions d'habitants très contrôlé et à peu près dénué d'opposition politique, les Saoudiens commencent tout juste à bougonner sur Twitter contre la corruption. Voici peu, des islamistes ont créé un parti d'opposition. A Djeddah, deuxième ville du royaume, un vent de colère a soufflé après des inondations qui se sont soldées par dix morts. Fait rare, des manifestations ont eu lieu tandis que des éditorialistes s'interrogeaient sur l'impréparation des services compétents et l'état des infrastructures. "Les habitants comptent maintenant (sur les autorités pour) s'attaquer sérieusement à leurs problèmes", commente le politologue Khaled al Dakhil en citant comme questions à traiter le chômage, le logement, le recours nécessaire à une main d'œuvre étrangère et la corruption. Depuis son accession au pouvoir en 2005, Abdallah, qui est âgé d'environ 87 ans, n'a presque rien entrepris pour modifier un régime de monarchie absolue, et il s'est très peu employé à réformer un code social qui impose des restrictions exceptionnellement sévères au comportement individuel. Des réformes limitées, par exemple l'ouverture d'universités de technologie ou le lancement de programmes de formation pour enseignants et juges, se sont heurtés au scepticisme dans certains cercles religieux conservateurs. Les absences répétées du roi et de son frère et successeur désigné, le prince héritier Sultan, pour raisons de santé, ont bloqué les réformes au cours des deux dernières années. "Les progrès sur toutes sortes de dossiers politiques sont très lents à l'heure actuelle", note Jane Kinninmont, analyste chez Economist Intelligence Unit. "Dans un système où les prises de décision sont habituellement très 'verticales', l'absence de ces dirigeants ralentit beaucoup l'activité politique." Des élections municipales ont eu lieu dans le royaume wahhabite en 2005, avant qu'Abdallah monte sur le trône. Mais une autre série de scrutins auxquels les femmes espéraient participer ont été suspendus en 2009 du fait de l'opposition des milieux conservateurs, indiquent des diplomates. Riyad assure à ses alliés que le gouvernement travaille normalement pendant qu'Abdallah se rétablit au Maroc après avoir été opéré d'une hernie discale à New York. Certains s'attendaient à voir le souverain rajeunir son cabinet, mais le mandat du gouvernement a expiré il y a plus d'une semaine sans qu'une nouvelle équipe soit annoncée. Certains ministres sont en poste depuis trente ans ou plus.