La formation professionnelle ouvre des perspectives d'emploi prometteuses pour des milliers de jeunes. Un intérêt particulier doit être porté à ce secteur, si bien qu'une mise à niveau des centres de formation professionnelle est primordiale pour garantir la bonne qualité de la formation et familiariser les élèves stagiaires à la culture de l'entreprise et de l'initiative privée, notamment avec les stages d'insertion à la vie professionnelle (SIVP) qui sont d'une importance capitale pour les stagiaires. Les diplômes sont délivrés par ces centres, (BTS, BTP, CAP…) selon les spécialités et le niveau des élèves inscrits. Jusqu'à fin 2010, on compte plus de 100 mille stagiaires, toutes spécialités confondues, inscrits dans ces centres professionnels. On y trouve des non-bacheliers, des bacheliers et des étudiants ayant Bac + 1 ou Bac + 2 et même des maîtrisards qui, faute d'emploi, ont changé de cap en s'inscrivant dans ces centres professionnels pour apprendre une spécialité plus apte à les intégrer dans le marché de l'emploi que celle qu'ils ont obtenue à l'université. D'ailleurs, ces derniers sont nombreux à fréquenter ces centres professionnels en vue d'être recrutés par reconversion, d'autant plus qu'avec une spécialité professionnelle, les opportunités d'emploi sont plus grandes. Il existe actuellement plus d'une centaine de centres de formation professionnelle dans plusieurs spécialités, répartis sur plusieurs régions de la Tunisie. Cependant, la quantité peut nuire à la qualité dans la mesure où pas mal de ces centres connaissent des carences au niveau de l'administration, de l'infrastructure et des conditions de travail.
Et le plan pédagogique ?
Parmi ces centres qui souffrent de déficience sur le plan pédagogique et administratif, on peut citer le Centre sectoriel de formation aux métiers du tertiaire d'Hammam-Lif, l'un des plus anciens du gouvernorat de Ben Arous. Formateurs, administratifs et stagiaires se plaignent d'une situation précaire qui n'a que trop duré et qui a empiré depuis le 14 janvier quand leur centre fut l'objet d'actes de pillage et de destruction : des dégâts importants ont été enregistrés: des ordinateurs volés, du matériel audio-visuel saccagé ou brûlé, des documents administratifs disparus, des fils téléphoniques arrachés... Depuis ce jour-là, les études ont perdu leur rythme habituel, la formation est devenue théorique en raison du manque de matériel informatique nécessaire à toute pratique. « Ce n'est que dernièrement qu'on a remplacé le matériel perdu par un autre, nous a déclaré un élève stagiaire, mais ce sont des ordinateurs déjà utilisés et dont le nombre est très insuffisant ! » Les cours ont dû s'arrêter à plusieurs reprises durant ces derniers mois en raison des protestations organisées soit par les stagiaires soit par les professeurs. Les uns et les autres semblent avoir des problèmes avec le nouveau directeur qui a été désigné juste après le départ forcé de l'ancienne directrice : « Comment peut-on accepter un tel directeur qui a déjà été refusé à plusieurs reprises dans d'autres centres professionnels, nous a expliqué l'un des formateurs. Nous exigeons un directeur compétent et non un acolyte de l'ancien RCD. Sa présence peut entraver la bonne marche de l'institution. Et puis, depuis sa désignation, rien n'a changé : nous travaillons dans des conditions lamentables ! » La majorité des formateurs se tournent plutôt contre l'ATFP (Association Tunisienne de la Formation Professionnelle) qui semble être à l'origine de cette situation du fait qu'elle n'a pas agi efficacement pour apporter les remèdes nécessaires aux différents problèmes qui se sont accumulés, notamment après la mise à sac du centre, ce qui a créé un climat d'instabilité durant ces derniers mois. Les administratifs, eux, ont leur lot de doléances : « Imaginez, nous a affirmé un agent administratif, que nous travaillons depuis quelques mois sans téléphone ni fax, pas d'Internet non plus ; de plus, nous n'avons plus de photocopieuse pour fournir les polycopiés aux stagiaires. »
Revendications des stagiaires
Quant aux stagiaires, ils demandent de l'administration de donner satisfaction à leurs revendications qu'ils jugent raisonnables et très utiles pour leur formation. C'est que depuis des semaines les rapports entre les stagiaires et l'administration deviennent de plus en plus tendus. Les uns reprochent aux agents administratifs le manque de respect et le mauvais accueil. D'autres soulèvent le problème des emplois du temps qui sont mal conçus. A ce sujet, un stagiaire a tenu les propos suivants : « Il y a une mauvaise organisation au niveau de l'élaboration des emplois du temps. Imaginez que dans la majorité des spécialités, il y a des séances de quatre heures à la file, si ce n'est six heures parfois (4h le matin, 2h l'après-midi et inversement), c'est très accablant ! Pourquoi ne pas organiser le temps sur la base de 2 heures pour chaque séance ? Ainsi, on peut travailler sans se lasser ! » Un autre stagiaire a attiré notre attention sur l'infrastructure du centre qui laisse à désirer : « Nous n'avons pas de buvette, ni de salle de permanence, on est obligé de sortir lors des heures creuses pour acheter des en cas. De plus, le centre ne dispose pas d'un rétroprojecteur ni de vidéoprojecteur alors qu'on en a besoin lors des exposés; et il n'y a pas assez d'ordinateurs, pas de réseau pour Internet qui est d'ailleurs très utile pour notre formation. » Un troisième nous a parlé des procédures et des conditions requises pour l'octroi du diplôme : « Selon le règlement, le stagiaire ne doit en aucun cas dépasser 4h d'absence pour une compétence de 40h sous peine d'être éliminé à l'examen final; or, un stagiaire peut facilement totaliser ces 4h en une seule journée, vu que certaines séances durent 4h. C'est vraiment aberrant ! Ajoutons à cela que l'administration refuse de nous livrer des cartes de stagiaires pour nous faciliter l'accès aux différentes entreprises qui exigent de nous cette carte lors d'une enquête ou une recherche. » Par ailleurs, les stagiaires demandent l'annulation de l'examen « cible » qui consiste à passer des épreuves portant sur toutes les compétences des deux années de formation. De même, la période de formation, fixée préalablement à deux ans, a été arbitrairement prolongée de six mois, en tant que projet de fin de formation que le stagiaire doit passer sous forme de stage. Bref, ce lundi (09 mai), les stagiaires ont décidé de boycotter les cours en se rassemblant dans la cour du centre en signe de mécontentement pour exiger de meilleures conditions pour la poursuite de leur formation. D'ailleurs, les formateurs ont déjà observé quelques heures de grève les derniers jours pour contester les conditions dégradantes de leur travail dans ce centre. Hechmi KHALLADI