On se souviendra longtemps de ce championnat qui vient de rendre l'âme. D'abord, par sa longévité. Il lui restait à peine vingt jours pour boucler une année entière. Ensuite, par une interruption impromptue causée par un événement qui va s'inscrire dans l'Histoire. Enfin par sa curieuse fin de parcourus où tout fut contesté, âprement discuté sur fond de huis clos navrant et lamentable. Mais le plus curieux ce qui le fera le plus distingué sera cette décision de l'amputer d'une de ses deux prérogatives essentielles. Il n'aura pas à reléguer le moindre club. Quant à son autre pouvoir, celui de désigner le champion, on le lui laissa. Alors, il en abusa dans son hésitation durant trois ou quatre semaines pour finalement décider de raccourcir l'attente en prononçant son verdict 15 minutes avant sa fin naturelle. On supputait, certes, les chances de chacun avec des faveurs pour l'Espérance, mais tout était permis. On a même senti le miracle frôler la réalité quand le CSHL fut le point d'ajouter un deuxième but à son avance. C'est à cet instant que le championnat s'est lassé de jouer au suspense. L'Espérance égalisa quand l'Etoile reçut le premier but du CSS. Le leader prit une avance quand le second se fit distancer de trois longueurs. Les jeux étaient faits dès la mi-temps, le reste ne fut qu'une formalité. Une formalité comme partout ailleurs. A Gafsa et à Zarzis, on a décidé d'en rester là sans tenter de marquer le moindre but. A El Menzah, l'O.Béja, a eu raison du Stade Tunisien sans trop forcer. Le CAB a choisi le temps additif pour empocher aux dépens de la JSK. L'ESHammam-Sousse s'est facilement joué de l'ASGabès. Mais toutes ces rencontres étaient à l'évidence poussées par le manque soudain d'enjeu. Seul les matches de Radès et de Sfax retenaient à peine l'attention. Et encore, durant moins d'une mi-temps. En quelques minutes, l'Espérance a exclu la possibilité de recourir au goal-avérage, reprenant sa confortable avance de cinq points entiers. Ainsi, la page de ce championnat a été tournée sous la canicule, mais avec une certaine controverse qui va chercher ses origines dans bien de circonstances qu'on ne prévoyaient pas, il y a six mois. Le championnat est clos, mais pas la saison puisque la Coupe reste encore à se prononcer. La rivalité entre l'Espérance et l'Etoile va peut-être encore durer. On aura sans doute l'occasion de reparler de cette saison singulière. N'a-t-elle pas fantasmé des mentalités nouvelles, éveillé quelques revendications, galvanisé des clubs régionaux jusqu'à remettre en question la routine de la hiérarchie ? N'a-t-elle pas fait du huis clos une règle et non plus une exception ? et des décisions se pliant aux circonstances plus qu'aux règlements ? Ses conséquences ne sont pas seulement un 23ème titre pour l'Espérance, mais aussi et surtout l'impératif de réflexions pourquoi pas révolutionnaires pour un avenir que tout ce monde ne voit pas trop bien clairement. Saison ratée ? non quand même ; Car, l'Espérance dans ce contexte étrange a su, le mieux gérer l'impondérable, l'inédit et l'extravagant. M.ZOUBEIDI
NABIL MAALOUL « Un titre arraché, à la sueur de notre front » Ce 24ème titre de champion a valeur symbolique. L'histoire retiendra en effet que c'est à l'Espérance de Tunis qu'échoua l'honneur de remporter le premier championnat de l'ère post révolutionnaire. Un sacre au goût bien particulier pour le club de Bab Souika et d'une saveur enivrante pour le plus heureux des espérantistes l'entraîneur, Nabil Maaloul qui, au mois de décembre dernier, laissa tomber au passage un juteux contrat avec Al Jazira pour répondre à l'appel sacré de ses couleurs. Belle récompense à l'arrivée avec une première conquête d'un titre majeur en tant que premier entraîneur. Pourtant dans l'allégresse générale qui suivit cette belle consécration Maaloul est demeuré un homme lucide, évitant de céder à l'euphorie « Nous fêterons plus tard ce titre car le groupe doit se mettre aussitôt au travail dans le but de bien préparer nos deux prochains challenges : le match d'ouverture de la phase des poules de la ligue africaine le samedi contre la MC Alger et la demi-finale de la coupe le 21 du mois face au ST » nous a-t-il fait remarquer au tout début de l'entretien qui suit : * Quelle signification revêt pour toi ce titre ? - Ce sacre est le fruit de la conjugaison des efforts de toute la famille espérantiste. C'est le couronnement de beaucoup de travail et de persévérance. Et là je dois reconnaître que la Révolution du 14 janvier nous a été d'un grand apport dans le gain de ce titre. •Pour être plus explicite. - La révolution a entraîné un arrêt de la compétition pendant un peu plus de deux mois. Durant ce repos forcé nous avons eu l'opportunité de procéder aux rectificatifs et autres ajustements techniques, tactiques et physiques qui ont valu au groupe de rebondir de nouveau. •Ceci est d'autant plus vrai que l'arrêt de la compétition est survenu au lendemain de la lourde défaite essuyée face à l'Etoile du Sahel. -Le groupe a été, en effet très affecté moralement par cette défaite il a fallu beaucoup d'efforts pour renflouer le mental des joueurs qui ont fait preuve d'un solide caractère. •Justement, cette défaite a amené à tort, une partie des supporters à douter de l'opportunité de ta nomination au poste de premier entraîneur. - Je ne vois comment pouvait-on m'assumer la responsabilité de cette défaite alors que je n'étais que depuis une semaine à la tête de l'équipe. Il faudrait aussi rappeler que ce jour-là, l'Espérance a joué sans un joueur clef dans son dispositif, Eneramo, parti sous d'autres cieux et qu'elle a joué à dix les deux tiers du match après l'expulsion de Darragi. Les chiffres sont bien évocateurs de notre mérite * Dans le camp étoilé ils sont fort nombreux à considérer que l'Espérance a bénéficié des faveurs du bureau fédéral notamment la décision de supprimer la relégation pour remporter le titre. Qu'en dis-tu ? -Aux détracteurs de l'Espérance, je dirais que les chiffres parlent d'eux-mêmes. L'Espérance a terminé première avec cinq points d'avance sur son poursuivant. Elle n'a pas quitté la première place au classement général depuis la 4ème journée. Elle possède aussi l'attaque la plus percutante avec 50 buts inscrits et la défense la plus moins perméable avec 18 buts encaissés. Ces statistiques ne sont pas suffisantes pour faire valoir le mérite de l'Espérance ? * Soit, mais tu ne redoutes pas les retombées de l'euphorie du titre sur vos prochains rendez-vous en CI africaine et en Coupe de Tunisie ! - C'est un élément dont nous sommes totalement conscients. Aussi, nous allons faire tout le nécessaire pour assurer une concentration sans faille de tous les joueurs sur leurs prochains sujets. Ils seront appelés à reprendre les entraînements aujourd'hui, même, après avoir bénéficié d'un seul jour de repos. De même, nos déplacements Alger était prévu le vendredi soit 24 heures avant le match mais nous avons jugé plus utile de faire le voyage le jeudi pour entretenir la concentration au sein de l'effectif. Ne pas s'arrêter en si bon chemin * Toujours est-il que le gain du titre est bénéfique pour le moral des joueurs en prévision de leurs prochains rendez-vous ? - Bien sûr que le titre de champion remporté de haute lutte est de nature à pousser les joueurs à aller toujours de l'avant vers d'autres conquêtes et tout le monde est bien mobilisé pour ce titre de champion soit le prélude à d'autres sacres. L'Espérance ne compte pas s'arrêter en si bon chemin, en effet.