L'Instance supérieure indépendante pour les élections vient de proroger l'inscription sur les listes électorales jusqu'au 14 août courant, pour permettre aux retardataires de s'y inscrire. Le taux d'inscription, croit-on savoir, n'a pas encore atteint les 20 % avec les 1.700.000 inscrits jusqu'à aujourd'hui (02 août) sur sept millions d'électeurs ; et on craint vraiment qu'à ce rythme le nombre d'inscrits ne réponde aux attentes de l'ISIE d'ici jusqu'à l'expiration du nouveau délai fixé pour le 14 août, quoique une légère hausse de l'affluence vers les bureaux d'inscription ait été enregistrée ces derniers jours. Cependant, on remarque une certaine réticence surtout chez les jeunes non seulement à l'égard de ces inscriptions mais aussi envers les prochaines élections de la Constituante. C'est que le doute semble planer encore parmi un grand nombre de jeunes qui affichent une certaine indifférence, voire un manque de confiance envers la vie politique en Tunisie. Avant de donner le coup d'envoi à l'inscription sur les listes électorales, on était presque convaincu que les gens allaient s'inscrire massivement et de plein gré et qu'avec l'échéance du 02 août (première date butoir), on atteindrait au moins 2,5 millions d'inscriptions ! Mais, le nombre atteint à cette date était en déça des estimations, ce qui a poussé l'ISIE à prendre la décision de reporter les inscriptions au 14 août. Toujours est-il qu'on n'est pas très sûr que les gens en âge de voter, notamment ceux qui viennent d'avoir 18 ans, aillent répondre à cet appel en s'inscrivant sur les listes. Et si on admet que ces gens vont s'inscrire, qui va assurer qu'ils vont voter aux prochaines élections. On aura alors peur du taux élevé des abstentions ! Nous avons contacté plusieurs jeunes, dont certains s'étaient déjà inscrits et d'autres ne l'ont pas encore fait, pour voir leurs points de vue sur les prochaines élections et sur la vie politique dans le pays en général. Nous avons ainsi recueilli plusieurs avis concernant les prochaines élections. En effet, certains jeunes veulent voter parce qu'ils croient que la politique de l'autruche adoptée par les Tunisiens durant les dernières décennies ne mènerait à rien et que le temps est venu pour que tout citoyen exerce son droit de choisir librement ses représentants. D'autres sont catégoriquement opposés aux prochaines élections, sous prétexte que c'est une course disputée entre les différents partis pour atteindre leurs objectifs politiques sans pour autant que le citoyen soit bien éclairé sur leurs programmes respectifs. D'autres encore, décidés à ne pas voter, ne pensent même pas aller au moins s'inscrire sur les listes électorales, observant une certaine neutralité. Témoignages : Samy, 18 ans, élève : « Je viens d'avoir ma carte d'identité. J'ai déjà 18 ans et quelques mois, j'ai donc le droit au vote. Ça me fait plaisir de voter pour la première fois ; mais croyez-moi, jusqu'à présent, je n'ai aucune idée sur les partis en Tunisie ! Pour qui je vais voter ? C'est là la question qui me ronge. Même, les gens de mon entourage, ne connaissent pas grand-chose sur les différents partis, à part Ennahdha. Or, moi, je n'aime pas ce parti, mais j'ignore tout sur les autres partis ! Le jour J, je vais renoncer au vote, car à quoi bon servir de voter pour un parti dont j'ignore le programme ! » Khaled, 20 ans, étudiant : « Franchement, je ne me suis pas encore inscrit sur les listes électorales. Pourtant, je connais beaucoup de choses sur la majorité des partis qui vont entrer en compétition car je suis scrupuleusement les informations dans les médias, j'ai même assisté à des meetings organisés par des partis dans ma ville. Et pourtant, j'ai du mal à saisir réellement les programmes de chacun. Et puis, je trouve que tous les programmes se ressemblent et leur but commun est d'arriver au pouvoir ! Il arrive aussi que le même parti tienne deux langages différents. Peut-on avoir confiance en lui ? De toute façon, si je m'inscris à ces élections, je voterai pour les partis qui ne sont ni de droite, ni de gauche ! » Samia, 25 ans, diplômée du supérieur, en chômage : « Je ne compte pas m'inscrire car je n'ai pas de carte d'identité nationale, je l'ai perdue il y a quelques semaines et pour la refaire, il me faut au moins 50 dinars pour préparer le dossier (extrait de naissance, certificat de perte, un timbre fiscal, certificat de domicile, frais de déplacementÖ) ; et moi je n'ai pas cette somme pour le moment. Pourtant, j'ai envie de voter pour le parti qui sera le plus en mesure de résoudre le problème du chômage pour ces milliers de jeunes sans emploi. Tous les partis parlent d'améliorer la situation économique pour mieux absorber le chômage. Mais franchement, je n'y crois pas trop ! Il ne faut pas trop compter sur ces partis qui vous comblent de belles promesses avant les élections et dès qu'ils seront élus, ils vous tourneront le dos. » Rafik, 30 ans, employé : « Je viens de sortir du bureau des inscriptions ; l'opération est facile et se fait très vite. Avant de venir, j'ai beaucoup hésité, je croyais que j'allais trouver une longue queue, mais pratiquement j'ai trouvé très peu de gens dans le bureau. C'est la première fois de ma vie que je m'inscris sur une liste électorale. C'est que je n'ai jamais fait confiance aux élections précédentes dont les résultats étaient scandaleux ! On nous parle aujourd'hui, depuis la Révolution, d'élections libres et démocratiques, je vais donc y participer pour voir ce que ça va donner ! C'est une nouvelle expérience que je vais vivre, quoique je n'aie pas encore une idée claire sur les différents partis. J'avouerai, cependant, que je suis le seul dans ma famille, composée de cinq membres, à venir m'inscrire sur ces listes électorales ; mes frères et súurs sont encore réticents ; comme d'ailleurs plusieurs personnes de mon entourage ; ils ne sont pas assez motivés ou suffisamment informés sur ces élections ! » Propos recueillis par Hechmi KHALLADI adeljugh [email protected]