Le Temps-Agences - Au deuxième jour d'un sommet européen tendu, la chancelière allemande menait d'intenses discussions avec le président polonais Lech Kaczynski dans l'espoir de rallier Varsovie à un projet de nouveau traité remplaçant la Constitution. De l'aveu même de Mme Merkel, les premières discussions la veille n'ont pas permis d'avancer sur les contours d'un nouveau texte destiné à tourner la page de deux ans de crise institutionnelle provoquée par les "non" français et néerlandais à la Constitution. Après une première rencontre dans la nuit avec M. Kaczynski à laquelle participait aussi le président français Nicolas Sarkozy, Mme Merkel a encore eu deux séances de discussions avec le dirigeant polonais hier avant le déjeuner des 27. Elle essaie de lever les objections polonaises à l'adoption dans le nouveau traité d'un nouveau système de vote à la majorité qualifiée, une question très technique mais politiquement ultra-sensible dont les jumeaux Kaczynski au pouvoir en Pologne ont fait une obsession, menaçant de mettre leur veto à un accord au cas où le système ne serait pas revu. La Pologne juge trop favorable à l'Allemagne le système de double majorité prévu par la Constitution et qui doit être repris dans le nouveau traité. Il prévoit qu'une décision est prise lorsqu'elle réunit 55% des Etats membres et 65% de la population de l'UE. Selon un diplomate polonais, la proposition présentée dans la nuit par le président français Nicolas Sarkozy qui permettrait à un petit groupe de pays, même s'ils sont trop peu pour former une minorité de blocage, de bloquer certaines décisions adoptées à la majorité qualifiée, n'est encore qu'un "slogan" qui n'aura de la valeur que si "on y ajoute des paramètres". Parmi ces "paramètres", il a cité la possibilité de retarder l'entrée en application du système de double majorité. A l'aube, une autre source polonaise a cité un report jusqu'à 2020, alors que le nouveau traité doit entrer en vigueur en 2009. Selon une source diplomatique autrichienne, la possibilité a été présentée de retarder son application jusqu'en 2014, ce qui coïnciderait avec le début d'une nouvelle période budgétaire européenne (2014-2020). "Il y a manifestement un mouvement sur cette question, et quand il y a du mouvement, il y a l'espoir d'un résultat en fin de course", a commenté le président du Parlement européen, Hans-Peter Pöttering. Outre ses efforts côté polonais, Mme Merkel a eu des entretiens avec le Premier ministre néerlandais Jan Peter Balkenende et le Premier ministre eurosceptique tchèque Mirek Topolanek, deux pays pas encore complètement convaincus par le projet d'acccord allemand. Elle a également reçu le Premier ministre britannique Tony Blair, qui a menacé de bloquer un accord s'il n'obtenait pas "pleine satisfaction" dans plusieurs domaines. M. Blair, qui cédera sa place mercredi à un Gordon Brown moins euro-enthousiaste que lui, demande que la Charte des droits fondamentaux - 54 articles sur les droits politiques et sociaux des citoyens - ne soit pas contraignante pour son pays et que les pouvoirs d'un futur "ministre" européen des Affaires étrangères soient limités. Il refuse aussi une augmentation du nombre des décisions européennes prises à la majorité plutôt qu'à l'unanimité. "Je crois que dans la nuit, les gens ont mieux compris que ces lignes rouges n'étaient pas pour nous un simple jeu de négociations", a indiqué le porte-parole de Tony Blair.