La position prise publiquement par le nouveau président de la République, dans son discours d'investiture, en faveur du port du voile féminin total ou simple (niqab, bourka ou encore khimar, pour le voile total), continue de susciter des réserves de la part d'un large secteur de l'opinion publique. Au-delà des remarques sur le recours du nouveau président de la République au mot péjoratif et équivoque ‘'safirat'' pour désigner les femmes qui ne se voilent pas, certains citoyens ont préféré voir le nouveau chef de l'Etat conditionner l'acceptation officielle du voile féminin dans les établissements administratifs et publics, au port de l'habit national tunisien ‘'le safsari'', que les femmes tunisiennes , notamment dans la capitale Tunis, utilisaient autrefois pour se voiler intégralement, quand elles sortaient dans la rue. Nos interlocuteurs font remarquer, à juste titre, que le voile féminin que portent actuellement certaines femmes et jeunes filles tunisiennes est un voile d'origine orientale qui n'a rien à voir avec l'habit national tunisien utilisé autrefois comme voile féminin, en l'occurrence le safsari, couverture en soie blanc. On pourrait, selon eux, soit exiger la généralisation du safsari, à l'ensemble du pays, soit permettre, aussi, à chaque région d'autoriser, à son côté, le port du voile traditionnel féminin en usage, autrefois, dans la région. Ainsi, l'affaire du voile féminin devient une question d'identité nationale et non pas une question de liberté vestimentaire ou d'obéissance à un commandement religieux, raison souvent invoquée, par nos femmes et jeunes filles, pour justifier le port du voile féminin à l'orientale. Pourquoi ne porteraient-elles pas le safsari, si leur souci est de se voiler, se sont interrogés nos interlocuteurs. Or, un spécialiste nous a indiqué, à ce propos, que la religion est un attribut de l'identité, au même titre que la langue et autres attributs exposés, du reste, aux aléas de l'histoire, et susceptibles de changer et de disparaître. Sous le protectorat français, les citoyens tunisiens, hommes, évitaient de porter le béret et le chapeau européen pour ne pas être comparés aux Français chrétiens. Porter, alors, un chapeau ou un béret pour un Tunisien, au lieu de la coiffure nationale appelée ‘'chéchia'', était comme renier l'Islam et devenir chrétien. A cet égard, beaucoup de citoyens craignent que l'affaire du voile féminin ne prenne davantage d'ampleur et ne rejaillisse négativement sur la question de la mixité dans les écoles et les endroits publics. L'imposition de l'habit national pour ceux et celles qui ont des problèmes particuliers avec leur tenue vestimentaire, serait la meilleure solution à la question vestimentaire, selon notre spécialiste.