123 marchands ambulants casés; une vingtaine de candidats sans solutions La ville des roses n'est plus morose • Enquête de Larbi Derouiche - Enfin, sans casse et sans dégâts, le bon ordre est rétabli à l'Ariana. Depuis lundi dernier, la ville ayant eu longtemps mal au cœur semble guérie et sortie d'une situation pourrie. La cité, prise en otage et envahie par les étalages, vient d'être restituée aux Arianais. Puisque le transfert du marché anarchique, aux nouveaux espaces publics ( avenue Taïeb M'hiri, près du terminus du métro) est réalisée… Au bout du tunnel Pour ceux qui n'ont pu suivre nos récents reportages à ce sujet, disons quelques mots sur le « déjà dit » sur les maux péniblement endurés par la ville des roses, devenue morose, surtout depuis le lendemain de la révolution. Un tableau, à la fois exhaustif et sombre a été dressé sur le commerce anarchique ayant dénaturé la formelle ville des roses, atteinte en plein cœur par une embolie, ayant infailliblement précipité la quasi-paralysie. Côté hygiène, disions-nous, l'avenue Habib Bourguiba est transformée en immense dépotoir d'ordures infecte et nauséabonde… Après plus d'un délai de grâce, non respecté par les marchands en disgrâce, l'on a fini, la mort dans l'âme, par abdiquer et se plier aux immuables mesures décrétées depuis le 3 décembre dernier. Cela, dans le calme et la correction, sans pleurs et avec le minimum de grincement de dents. La carotte à la place du bâton Et l'on ne peut, à ce propos, que saluer la sagesse et le bon sens des édiles provisoires communaux qui ont su gérer de bout en bout l'inextricable conflit, en venant à bout de ce problème kafkaïen. Cela en tendant aux récalcitrants, la carotte de la révolution au lieu de brandir fermement le bâton de l'ex-patron poltron. Oui, lorsqu'on est nez-à-nez avec des centaines de têtes de pipe marginalisées, exposées aux intempéries, pour gagner misérablement leur vie, l'on doit impérativement leur donner un moyen de survie, avant de leur dire « Dégagez ! Au revoir et merci ! ». Avant de leur dire « Allez vous-en ! Finie la récréation ! », l'on a veillé à aménager un nouvel espace commercial avenant, quoique jugé étroit et insuffisant pour accueillir la grande foule et abriter l'ensemble des marchands en question. « Tout le monde sera casé » A la mairie, l'on se dit satisfait de ce qui vient d'être fait. « Presque tout le monde ambulant est sédentarisé. Quelque vingt sept éléments, nous apprend-on, ne sont pas encore casés. Ils auront leurs petits carrés dès que les autres marchés communaux seront réaménagés ». « Et entre-temps, M. le Maire, que fait-on pour ces gens ? lui demande-t-on. Et M. Karim Helali de nous répondre sur un ton rassurant. « On travaille sur la question. On leur trouvera d'ici peu la bonne solution ». Une descente sur terrain nous a permis de constater que l'artère centrale de la ville ainsi que les rues longeant de tous côtés le marché, sont tout à fait dégagés. La circulation automobile, longtemps bloquée est parfaitement rétablie. Elle y est plus ou moins fluide. A la différence des autres rues où le mouvement est sérieusement affecté par les fameux travaux de revêtement de chaussées, qui ont l'air de traîner et, en plein hiver, sont mal supportés par le public arianais. Aux pas de bébé, pour commencer… Au nouveau marché communal (établi dans la zone dite de l'abattoir), les ambulants, fraîchement sédentarisés, s'activent à qui mieux mieux pour monter les supports de leurs abris complémentaires, préparer leurs étals et installer et mettre au point leurs éclairages propres. L'activité commerciale a démarré à pas de bébés, en l'absence d'adultes. Seuls quelques visiteurs sont rencontrés ici et ailleurs. Ils sont intéressés par l'exploration des lieux plutôt que par la vacation à leurs emplettes. Ali, fonctionnaire, faisant apparemment l'école buissonnière, se dit peu réjoui du nouveau marché, étant donné l'extrême densité de la circulation aux alentours et les difficultés à rencontrer par les clients pour pouvoir garer leurs voitures. Entre le oui mais, et… le mécontentement des non casés Les commerçants abordés ne semblent pas tous satisfaits ! « Ils nous faut beaucoup de temps pour que les clients s'accomodent de ce nouveau marché. Entre temps, il nous faut peiner pour gagner notre pain journalier ». Mohamed, quant à lui, a perdu sa place d' « origine » sans obtenir une place de rechange. Il avait les traits tirés et était au bord des larmes et… de la déprime. « Je suis un enfant bâtard. Je ne sais pas ce que je vais faire. Encore plus, ce qu'on va me faire. Même pour être mendiant, je ne remplis pas les conditions. Retourner aux larçins et à la prison ? ce n'est pas la bonne solution ». Au marché central de l'Ariana, c'est le soulagement général. Et il semble qu'on a commencé à aiguiser les couteaux pour couper seuls le gâteau et le pauvre client, en morceaux ! Adieu ambulants concurrents ! Bonjour tarifs galopants !