La septième édition de « Tunis tout court » s'est tenue le Vendredi 20 Janvier à la Maison de la culture Ibn Khaldoun. Ce mini-festival dédié au Court-métrage tunisien a vu le jour à l'initiative de l'association tunisienne pour la promotion de la critique cinématographique ( ATPCC). Donner une visibilité aux formats courts boudés par les salles commerciales, accompagner dans leurs premiers pas de jeunes réalisateurs et mettre en avant la diversité qui existe dans les marges du cinéma établi, constituent les motivations principales de cette « aventure » dans laquelle s'est lancée l'ATPCC en 2005 et dont le principal mérite est de continuer à exister et de drainer un public aussi nombreux. 17 courts-métrages étaient au programme de cette édition, avec des films couvrant tout le spectre des formes courtes, la fiction, le documentaire, le film d'animation, et le cinéma expérimental. Appréhendés du point du point de vue de la production, les films programmés sont des films indépendants à très petit, voire à zéro budget. Cette tendance qui va s'affirmant d'année en année, est en passe de devenir le modèle économique « naturel » de production du court-métrage, les courts-métrages subventionnés par le ministère de la culture faisant désormais l'exception dans l'univers des formats courts. La modicité des moyens n'est plus synonyme d'amateurisme, c'est devenu presque une évidence depuis quelques années déjà chez nous et ailleurs à la faveur d'une démocratisation des moyens techniques de production mais pas seulement. Un des principaux enseignements de cette septième édition de Tunis-tout court est la profusion de films dont l'écriture intègre en amont de la contrainte budgétaire. « Foutaise » de Bahri Ben Yahmed, « D'amour et d'eau fraîche » d'Ines Ben Othmen, « Le vent a tourné » de Lyes Bessrour sont autant de films fauchés ( du point de vue de la production) dont on peut discuter la qualité intrinsèque mais dont le principal mérite est d'être adossés à des dispositifs simples qui les rendent réalisables et surtout crédibles. Ce fait mérite d'être souligné dans la mesure où il dénote d'une maturation des jeunes cinéastes indépendants tunisiens et rassure quant à leur capacité à s'adapter au tarissement des sources de financement des films appelées à devenir la règle dans un contexte où la demande de subventions dépasse de loin les capacités distributives de l'Etat. Sur le plan du cinéma, le programme proposé par « Tunis tout court » est prometteur si on l'aborde du point de vue de la diversité des propositions cinématographiques. Du côté de la fiction, un cinéma conceptuel et formaliste, aux contours flous, un tantinet prétentieux qui prend néanmoins des risques et c'est tout à son honneur ( « Le vent a tourné » de Lyes Bessrour, « Le peuple Frankenstein » de Imed Issaoui, « D'amour et d'eau Fraîche » d'Inés Ben Othman), coexiste avec un cinéma plus convenu, efficace ,qui ratisse très large, (« Pourquoi moi » d'Amine Chiboub, « Offrande » de Walid Mattar, et « Foutaise » de Bahri Ben Yahmed, probablement son court-métrage le plus abouti jusqu'ici). « Lemrayet » de Nadia Rayes, un des trois films d'animation programmés interpelle par la maturité de son propos et sa cohérence visuelle. La réalisatrice déjà auteure de « Lanbouba » il y a quelques années est arrivée à conjuguer dans son film (en animation traditionnelle) discours et forme désenclavant de ce fait le film d'animation du statut de gadget auquel on a tendance à l'assigner. Avec Mostpha Taieb, Lotfi Mahfoudh, Nadia Rayes et quelques autres dont Aleeddine Boutaleb (appartenant à une autre génération), le cinéma d'animation mérite que la critique et les producteurs s'y attardent tant ils nous paraissent porteurs de promesses par rapport à un cinéma traditionnel un peu essoufflé. Le court-métrage est un laboratoire, la pépinière du cinéma de demain. En dépit de la marginalité dans laquelle on a tendance à le confiner, il constitue une entrée à travers laquelle il est possible de porter un regard plus nuancé et un peu plus optimiste sur le cinéma en Tunisie.