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(En)jeux d'eau
Redécouvertes
Publié dans Le Temps le 15 - 07 - 2007

L'Homme naît dans l'eau, il est constitué d'eau et il meurt sans eau. La Tunisie a toujours été consciente du fait qu'une gestion maîtrisée des ressources en eau était indispensable au développement économique et social du pays.
Cependant, l'exploitation des ressources conventionnelles atteindra ses limites dans un proche avenir et la demande engendrée par la croissance démographique, l'élévation du niveau de vie et le développement économique dépassera la ressource en eau.

LA RESSOURCE EN EAU
La moyenne annuelle des précipitations en Tunisie est de l'ordre de 37 milliards de m3. Elles sont très irrégulières et varient selon les régions. L'évaporation annuelle passe de 1300 mm environ dans le Nord à 2500 mm au Sud.
Les eaux de surface sont estimées à 2,7 milliards de m3 / an. Elles représentent un peu plus de la moitié des ressources conventionnelles. Pour permettre la mobilisation totale des eaux de surface, qui contiennent en moyenne 2,5 gr / litre de sels, 42 grands barrages collinaires et 1000 petits lacs collinaires ont été prévus.
Les eaux souterraines des nappes phréatiques situées à moins de 50 mètres de profondeur et des aquifères profonds sont estimés à environ 2 milliards de m3 / an. Le volume des nappes phréatiques du Nord est supérieur à celui des nappes du Sud mais les aquifères du Sud sont bien plus importants que ceux du Nord. Cependant la salinité des eaux peu profondes est généralement élevée, celle des eaux profondes est légèrement inférieure.
A l'échelle d'un pays, le problème se pose en termes d' « eau dans la nature » et d' « eau mobilisable ». Si la quantité d'eau précipitée est de l'ordre de 37 Mm3, la fraction mobilisable par les différents ouvrages de collecte n'est que de 8 % soit près de 3 Mm3, dont plus des deux tiers sont rassemblés dans la Tunisie du Nord.
Le pays ne dispose, en tout : eau de surface et eau souterraine, que de moins de 5 Mm3 mobilisables dont un peu plus de 3 Mm3 sont effectivement mobilisées actuellement.

LA CONSOMMATION D'EAU
La Tunisie se trouve actuellement face à une évolution démographique et économique rapide qui se traduit par une forte augmentation des besoins en eau. La croissance importante des villes et des secteurs économiques gros consommateurs d'eau tels que l'agriculture irriguée, le tourisme et l'industrie entraîne une pression importante sur la ressource.
En Tunisie, la population a été multipliée par 2,5 depuis l'Indépendance alors que le volume d'eau consommé par les villes a été multiplié par 7. En l'an 2000, le tunisien a disposé de 450 m3 / habitant / an pour 10 millions d'habitants. En 2050, pour 14 millions d'habitants, il y aura encore 320 m3 / habitant / an mais dans l'hypothèse de 19 millions d'habitants, il n'y aura plus que 240 m3/habitant/an : près de la moitié ! Il faudra plus de 400 m3 / an par touriste.
Selon la FAO, un individu doit consommer, dans un régime alimentaire convenable, en moyenne, 216 kg / an / individu de céréales et 18 kg/an/individu de viande. Or, il faut 2500 litres d'eau pour produire 1 kg de blé et 4500 litres pour produire 1 kg de viande ! L'agriculture irriguée se développe très rapidement mais la moitié de l'eau consommée ne parvient pas aux cultures et les terres irriguées, trop fortement sollicitées, se dégradent rapidement du fait, en particulier, de la salinisation et de la pollution chimique.
Si, en Tunisie, le taux de branchement sur le réseau d'eau potable est de 97 % en milieu urbain et même de 68 % en milieu rural, sur terre 1 milliard d'individus n'ont pas accès à l'eau potable et près de 2 milliards ne disposent pas de système d'assainissement convenable.

L'EAU ET L'AMENAGEMENT
36000 grands barrages ont été construits dans le monde depuis 1950 dont près de 50 % en Chine ! Parmi les aménagements hydrauliques les plus importants dans le monde, on peut citer le « Nil artificiel » de la Libye qui transporte vers le Nord du pays, sur 1900 kilomètres, une eau âgée de 12000 ans puisée dans des nappes fossiles, qui ne se renouvellent pas, à plus de 1500 mètres de profondeur. Le diamètre des conduites varie de 4 à 6 mètres. Mais la durée de vie de ce « système » est estimée à 50 ans au maximum !
En Tunisie, la construction des barrages a commencé dans les années 50. En 2010, 23 grands barrages programmés auront une capacité de 2,1 millions de m3. Mais il n'y aura plus un seul site disponible ! Ces barrages ont une durée de vie limitée probablement 1 siècle environ. Le barrage de Sidi Salem, le plus grand actuellement du pays a une capacité de 550 millions de m3 mais il s'envase au rythme de 5 Mm3 par an. L'avenir de l'aménagement hydraulique en Tunisie est certainement la multiplication des barrages et lacs collinaires. Il faudra certainement en même temps économiser la ressource ou autrement dit gérer la rareté !
En Tunisie, 75 % de l'eau urbaine est consommée par les villes littorales. Tunis, Sousse et Sfax accaparent 63 % du volume distribué. De plus, la Tunisie orientale concentre 44 % des périmètres irrigués du pays. Alors que la plupart des barrages ont été construit dans le Nord-Ouest. Mais il est nécessaire de retenir une partie croissante de l'eau collectée dans le Nord du pays pour assurer un développement économique, sociale et culturel équitable de cette partie du pays.
Cependant que deviendra le plateau continental marin, les êtres qui y vivent et l'industrie de la pêche quand il sera pratiquement privé des apports du ruissellement ?


L'EAU ET L'ENVIRONNEMENT
Les barrages petits et grands remplissent des rôles économiques - et sociaux : fixation des populations rurales, par exemple - incontestables et multiples mais ils provoquent de violentes controverses sur le plan écologique et parfois social : déplacement de population, parfois.
On peut limiter l'envasement des barrages et allonger leur durée de vie en reboisant et en protégeant les sols du bassin versant. Cela suppose des investissements importants et une adhésion des populations locales. Le déboisement, le surpâturage mais aussi la sécheresse, qui empêche l'infiltration de l'eau dans les sols trop secs, sont responsables non seulement de l'arrachement de la couche arable du sol par l'eau de ruissellement, mais aussi des inondations par l'écoulement très rapide de l'eau et des alluvions vers les fonds de vallée. De ce fait, le lit des oueds, celui de la Medjerda, en particulier, depuis la construction du barrage de Sidi Salem, se rétrécit en se colmatant.
De plus, l'emploi intensif, souvent irraisonné, au sens propre, de produits et d'engrais chimiques associé à la salinisation des terres par une irrigation importante en eau d'une salinité supérieure à 1,5 gr / litre, avons-nous écrit, entraîne d'une part l'assèchement des nappes surexploitées et d'autre part la pollution et la salinisation de celles qui « survivent ». Or, il faut plus d'un millénaire pour qu'une eau souterraine se renouvelle complètement ! Dans certaines régions, au Sud-Ouest du lac Ichkeul ou au Sud de Kalaat Andalous, par exemple, l'eau de mer s'infiltre dans les nappes d'eau douce surexploitées.
Enfin, si le réchauffement climatique se confirmait, le climat de la Tunisie au Sud de la ligne Sfax-Thala arriverait au Nord du pays et couvrirait la riche vallée de la Medjerda ! Que se passera-t-il alors ?

L'EAU ET L'ECONOMIE
En Tunisie, l'agriculture utilise 82 % de la consommation d'eau. La consommation domestique est de 13 %, l'industrie 4 % et le tourisme (actuel) 1%. L'eau ne peut plus être considérée comme bien naturel (donné par Dieu !) et surtout inépuisable. Il faudra admettre qu'il s'agit d'un bien marchand qui va coûter de plus en plus cher. Quand les eaux « naturelles » seront mobilisées au maximum, et sans doute bien avant, il faudra « fabriquer » de l'eau « artificielle » en particulier par dessalement et ... la facture d'eau est appelée à augmenter régulièrement et sans cesse.
Il faudra nécessairement lutter contre les déperditions dans les réseaux de distribution, contre les gaspillages en matière d'irrigation en particulier, économiser l'eau dans l'industrie et la consommation urbaine et enfin retraiter les eaux usées pour pouvoir s'en resservir. Seuls 11 millions de m3 d'eaux usées traitées sont effectivement utilisées actuellement pour irriguer 6500 hectares !
Plus d'une centaine de millions de m3 d'eaux usées traitées est potentiellement disponible à bas prix.
Les réutilisations possibles sont multiples : terrains de golf, espaces verts, agriculture, recharge des nappes phréatiques. Mais ces emplois très différents entraînent des traitements très variés. Les investissements dans les stations d'épuration et dans la mise en place d'infrastructures de distribution sont très importants. L'aspect sanitaire est primordial. Toute une stratégie de l'utilisation des eaux usées traitées est à élaborer de façon à pouvoir les intégrer dans la gestion des ressources en eau du pays. Le faible coût actuel des eaux de surface devant augmenter rapidement, celui des eaux retraitées deviendra très bientôt compétitif en particulier pour les gros consommateurs.

L'EAU ET LES ETATS
L'eau est devenue un bien marchand très demandé. Or, les coûts d'eau, les lacs et les bassins versants des barrages ignorent les frontières. 50 % des eux des pays arabes proviennent de pays non arabes : 85 % des eaux du Nil proviennent d'Ethiopie. La Turquie exploite 89 millions de m3 des eaux de l'Euphrate alors que l'Irak n'en reçoit que 11 millions de m3 et la Syrie 14 millions. Les traités internationaux et la coopération devront devenir des règles si on veut éviter les conflits, au pire, les tensions au minimum surtout entre pays pauvres en eau dans des régions que le réchauffement climatique possible rendra encore plus secs.
L'eau : source de vie ne doit pas devenir source de conflits ou même d'inégalité entre les citoyens d'une même pays. La Tunisie a déjà anticipé : la production mondiale d'eau par dessalement est de l'ordre de plusieurs dizaines de millions de m3. Dès les années 80, une station a été construite à Kerkennah puis une autre à Gabès. Actuellement les installations de Zarzis et de Jerba ont une capacité de 50.000 m3 / jour. Elles devraient produire plus de 4,6 millions de m3 / an. Même si le coût de dessalement est encore élevé, quel est le prix de la vie ?


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