De notre envoyée Ikbal Zalila : Avec « Les chevaux de Dieu » présenté en sélection officielle dans la section « Un certain regard », Nabil Ayouch, entreprend de donner à comprendre le terrorisme islamiste à travers la trajectoire de deux frères, Yachine et Hamdi. Leur quotidien dans le bidonville de Sidi Moumen, est fait de violence, de drogue et de marginalité. Yachine, gardien de but émérite dans les matchs de quartier idolâtré Lev Yachine, le grand goalkeeper, de l'équipe soviétique des années soixante. Timoré, Yachine survit à la faveur de la protection de son frère Hamdi un petit caïd dans le quartier. Quelques années plus tard , Hamdi devenu dealer se fait arrêter. Yachine se fait embaucher par le mécanicien du coin, grâce à l'intervention de Nabil son ami et confident de toujours dont la mère chanteuse et prostituée occasionnelle est acculée par les islamistes à quitter Sidi Moumen. Le patron est haïssable et libidineux, il lorgne sur Nabil. A la faveur d'une tentative de viol sur son ami Nabil , Yachine tue le patron. Entretemps, Hamdi le frère aîné est sorti de prison transformé en Jihadiste. Yachine , Nabil et leur troisième compère Foued sont adoubés par les salafistes de Sidi Moumen qui leur annoncent qu'ils ont été choisis pour devenir des martyrs de l'Islam. Un destin tragique, banalisé par une surexposition médiatique et une identité de causes induisant les mêmes conséquences. L'extrême pauvreté et l'ignorance constituent le terreau idéal de recrutement de candidats à la mort, pour des groupes terroristes de la mouvance Jihadiste. Toute la question est de savoir ce que peut apporter de plus une fiction à la compréhension d'un sujet aussi balisé que les racines du terrorisme islamiste ? La réponse ne réside certainement pas la reconstitution besogneuse et naturaliste de situations maintes fois représentées dans les reportages télé. C'est le piège dans lequel tombe mains et poings liés Nabil Ayouch. Multipliant les clichés, sans jamais les questionner, « Les chevaux de Dieu » est prévisible dans ses moindres circonvolutions dès ses premières minutes. La fiction est laborieuse et convenue. La sobriété de la mise en scène si elle leste le film d'un peu plus de vérité que le très clinquant « Ali Zaoua », est parasité par une musique totalement inadaptée pesante et pléonastique lors des pics dramatiques du film. Comme un mauvais bouquin qui nous tombe des mains, « Les chevaux de Dieu » nous tombe des yeux, on peut l'écouter poliment ou le voir les doigts dans les oreilles, cela ne changera rien à l'indifférence dans laquelle ce film nous installe dès ses premières minutes. Que l'on soit à Cannes et ailleurs friands de ce type de sujet admettons, mais ce faisant on donne une visibilité à un en deçà du cinéma tout en faisant barrage à des réalisateurs, rares mais précieux dans notre monde arabo-africain pour qui le cinéma relève avant tout d'un art. Creuser l'écart avec la réalité pour la transcender et la donner à voir autrement avec les moyens du cinéma, voici à côté de quoi est lamentablement passé « Les chevaux de Dieu ».