De notre envoyé : Ikbal Zalila - Une sélection à Cannes c'est un baptême pour certains, une fatalité pour d'autres, c'est selon les années, l'actualité et le bon vouloir des multiples comités de sélection dans les différentes sections. Etre à Cannes soit mais où, c'est-à-dire dans quelle compétition. La compétition officielle n'est pas la sélection officielle, ni un certain regard son antichambre. La quinzaine c'est branché, un peu fauché, pas du tout couru par les paparazzis, Lunettes en écaille noire, verres épais, tabac à rouler, sandwichs tomate-mozza, petites robes fleuries. On n'y monte pas les marches, on y descend les escaliers qui mènent à la salle, un peu sonné par le soleil en dépit des ray-Ban fièrement arborées. « Libé » un peu froissé, on y lit les articles des copains, irrévérencieux et déjantés. Les bobos du cinéma sont tous là. On boude la compétition, mais on n'hésite pas à aller jeter un œil à la semaine de la critique ou chez les camarades de L'ACID. Rien à voir donc avec les pingouins de la montée des marches, ni avec le mètre quatre-vingt (talons compris) des stars qui montent les marches en premier, avant la procession des pistonnés, des recommandés qui ont réussi à se procurer le fameux sésame qui leur permettra d'amortir les frais engagés pour la location de l'accoutrement qui va avec le carton. De ce côté, pas gros changements en perspective en cette année 2012. Sur le plan du cinéma, la compétition officielle est pratiquement sans surprises, on y retrouve les abonnés à la compétition, Michael Haneke, Abbas Kiarostami, Jacques Audiard, Alain Resnais ( le benjamin de l'équipe à presque 90 ans), Ken Loach , Carlos Reygardes, Walter Salles , Matteo Garrone et les deux Coréens, Im Sang-sooHong-sang Soo, ( passé ces trois dernières années par pas moins de trois sections, la Quinzaine, un certain regard et la compétition en cette édition). Pour les outsiders, on compte cette année, l'hyper- réaliste cinéaste autrichien, l'australien john Hillcoat dont le scénario du film est écrit par Nick Cave apporte la touche, l'Anglais Lee Daniels, impétueux et folle à souhait, l'américain Jeff Nichols et surtout le très attendu, Andrew Dominik dont le premier long-métrage « The assasination of Jess James.. » l'a propulsé au rang des cinéastes les plus attendus. Présence arabe Yousri Nasrallah sera seul à défendre le cinéma arabe et Africain. C'est tant mieux pour un cinéaste dont le parcours en dents de scie nous a habitués au meilleur comme au pire. « Vols d'été »(1988) son premier long-métrage est incontestablement le plus abouti, pour le reste Nasrallah est un excellent réalisateur des moitiés de films, la première partie d'« Al madina », la première partie de « La porte du Soleil » dénotent d'un vrai talent de mise en scène qui a du mal à tenir sur la durée. Si « Gninet el asmek » est correct sans être transcendant, « Les femmes du Caire » son dernier opus, était décevant sur tous les plans. « Baad el Mawkea » présenté cette année en compétition revient sur un moment clé de la Révolution égyptienne, le jour où des milices de Moubarak ont attaqué à dos de chameau les sit-inneurs de la Place Tahrir. On attend de voir. Dans l'antichambre de la compétition officielle, dans la section un certain regard, sont venus se loger, deux cinéastes arabo-africains, le Marocain Nabil Ayouch avec « Les chevaux de Dieu » et le sénégalais Moussa Touré avec « La pirogue ». On aimerait penser que ces deux cinéastes ont été sélectionnés à « Un certain regard » pour la qualité de leurs films, pas sur la base du thème de leurs films, à priori et en étant un peu de mauvaise foi, aussi bien Ayouch que Touré traitent de sujets d'actualités qui plaisent fatalement à un public occidental, le terrorisme islamiste pour le réalisateur marocain, l'émigration clandestine pour son collègue sénégalais. Positivons malgré tout en attendant. Merzak Alouache qui semble s'être réconcilié avec le cinéma d'auteur, après ses « chouchouteries » alimentaires, est invité à la quinzaine des réalisateurs avec son dernier film « Attaieb ». Il y tente de décrypter les ressorts du repentir d'un djihadiste qui a décidé de déposer les armes. Gageons que ce sera le film du repentir pour un cinéaste qui a commis certains petits films légers qui paient bien sans faire rêver. Pour nous, il reste le short film corner et les océans de larmes versées par certains sur un Pavillon par qui le miracle serait arrivé et dont l'absence cette année se fera très certainement remarquer par la terre entière.