« Si on ne fait pas de bêtises, on est là pour trente ans ! ». Cette citation est de Peyrefitte, à l'aube de l'état de grâce du Gaullisme, (on l'avait rappelé, précédemment)... Il y a lieu de transposer cette réflexion - qui avait, aussi, valeur d'avertissement. Dans la situation actuelle de cette Etoile du Sahel que rien, ni personne n'est en mesure de déranger dans cette « soudaine » béatitude et en cette période de grâce où tout devient possible, même le meilleur. Oui, tout réussit au club de Moëz Driss. Une « Baraka » impromptue, capricieuse, cynique qui s'installe après s'être refusée à un Jenayeh qui l'avait, pourtant, ardemment, pieusement, dramatiquement invoquée. Hemingway, (l'un des auteurs préférés de Jenayeh, justement), se mettait en colère lorsqu'on attribuait ses écarts de conduite, sa vie tumultueuse au « manque de veine ». « Non, rageait-il, la chance, il faut savoir la provoquer ! ». Là, nous sommes dans ce chapitre, plutôt dans cette ambivalence qu'est l'audace. Driss, en a-t-il eu plus que Jenayeh ? Plutôt restons dans le pragmatisme : il a su anticiper, et il a pris le risque de se laisser soi-même « diaboliser », avec ce relents d'impopularité, certes, mais quand même, avec ce satané titre que le tout Sousse attendait dans le désenchantement et entrevoyait même comme un mirage. Mais, par ailleurs, est-on certain que Jenayeh était une colombe et qu'il ne se battait pas, ne conférait pas cette dimension - celle dont l'Etoile récolte actuellement des fruits - sans laquelle le club se serait banalisé ? Par malchance (là c'est vrai), il a eu une certaine Espérance (le contraire de ce qu'elle est de nos jours) sur son chemin... Il aura tout tenté, jusqu'à imiter le rival : rien n'y fit. Sauf que Jenayeh ne s'est pas exclusivement occupé de résultats : il a réfléchi le club dans ses constantes, dans ses structures et, sur ce plan précis, il n'a pas agi seul, simplement parce qu'il devait toujours rendre compte et répondre des résultats qu'induisaient dans le meilleur (parfois dans le pire), ses décisions. Moëz Driss a bien rappelé le rôle joué par Jenayeh dans cet impressionnant édifice qu'est l'Etoile. Mais le tournant, l'adéquation entre les moyens et les résultats, c'est tout de même l'actuel président étoilé qui les a marqués et, même, « provoqués »... Et, alors, on ne comprend pas que les uns, à Sousse, pleurent dans les chaumières et que d'autres ruent dans les brancards. Qui a parlé de rupture ? Qui a parlé de cassure ? Qui a oublié ce qu'a fait Jenayeh pour le club ? Et qui a sublimé Moëz Driss ?... Il ne s'agit pas d'un conflit de générations. Ce n'est même pas une affaire de personnes. Jenayeh, autant que Driss, et comme ceux qui les y ont précédés et ceux qui viendront après, restent infiniment petits face à la pérennité de l'Etoile et à sa grandeur... Ceux qui vénèrent les personnes, autour de l'Etoile, ne se rendent pas compte que c'est un cycle qui s'ouvre et que si l'Etoile fait des bêtises, ce sera aussi de leur faute. Voyez l'Espérance...