« Hier encore j'avais vingt ans » et le régime Bourguibien également. A cette époque, la Tunisie manquait de moyens mais pas de compétences. La prise de conscience, a vite gagné aussi bien les intellectuels que les prolétaires, voire les analphabètes. Les ouvriers, étaient encouragés par le syndicat des travailleurs, le seul sur la place à l'époque, et qui avait fait déjà ses preuves avant l'accès du pays à l'indépendance, en menant une lutte acharnée contre les autorités coloniales pour défendre les droits des travailleurs autochtones. Il était donc déjà rodé, pour mener le même combat, avec le même courage et la même ferveur, dès l'accès de la Tunisie à la souveraineté. Le combattant suprême ne pouvait tolérer que quelqu'un d'autre pût lui tenir tête, pour quelque motif que ce soit. C'est à partir de là que la répression qui commença déjà à sévir contre les yousséfistes, alla crescendo, avec l'usage de moyens de plus en plus sophistiqués de la torture, devenue au fil du temps, d'un usage courant, notamment à l'égard de tous ceux qui osaient exprimer leurs idées ou dénoncer les abus et les injustices. Le vent du printemps arabe qui avait pour but réveiller le monde arabe de sa torpeur, n'a pas encore emporté certains usages du passé, restés ancrés, comme des réflexes innés chez quelques personnes, lesquelles n'ont pas pu, jusque là s'en débarrasser aussi facilement. Parmi ces réflexes, la torture, qui serait encore d'usage courant dans certains postes de police, centres de détention, et perpétrée par certains agents de l'ordre. Le prétexte : Elle est utilisée seulement pour assurer la sécurité dans le pays.
La torture de retour ?
Qui n'est pas en effet, pour la paix et la sécurité publique ? Mais lorsque ceux qui sont arrêtés pour des actes de violence ou même des délits mineurs, subissent des violences et des agressions dans des commissariats de police, on se pose des questions. C'est du moins ce qu'ont prétendu certains responsables, appartenant à différentes composantes de la société civile. Parmi ces derniers, Mondher Cherni, responsable à la section tunisienne de l'organisation mondiale contre la torture, a affirmé, il y a quelque temps, que la torture persiste encore dans les prisons et les postes de police. Quant à la militante Me Radhia Nasraoui, présidente de l'organisation tunisienne de lutte contre la torture, a affirmé récemment que les victimes de la torture sont de plus en plus nombreuses, et qu'elle est perpétrée sous différentes formes, le dernier acte en date, souligna-t-elle, a été celui au cours duquel une jeune fille a été violée par deux agents de police. Certes, aussi bien le gouvernement que les responsables au sein du ministère de l'Intérieur, ou au sein de la présidence de la République, oeuvrent à combattre la torture sous toutes ses formes. Mais le problème est toujours le même : dès qu'on dénonce l'usage de la torture quelque part, on ne prend pas la chose avec le sérieux qui s'impose et surtout, on ne jette pas suffisamment la lumière sur ces cas, qui paraissent isolés, mais dont la gravité est considérable. Ce qui fait que le citoyen reste plutôt dans l'expectative au point de ne plus savoir à quel saint se vouer.
La Tunisie honorée par l'ONU, mais....
Le ministre de la Justice transitionnelle a pour sa part affirmé, que la lutte contre la torture est parmi les priorités, en vue de consolider la Justice transitionnelle. Celle-ci n'est pas encore concrétisée, mais là c'est une autre paire de manches. En attendant, la Tunisie postrévolutionnaire bénéficiant de l'intérêt mondial pour l'attitude héroïque de son peuple qui est parvenu à déboulonner un régime de dictature et de répression, où la torture a sévi durant près d'un quart de siècle, a été proposée pour être candidate au sein du sous comité de lutte contre la torture à l'ONU. Or, suite à cette proposition, le chef du gouvernement et le président de la République ne se sont pas mis d'accord sur le candidat devant représenter la Tunisie au sein du comité Onusien. En effet, alors que le chef du gouvernement a avancé le nom de Me Saida Akremi, le président de la République a opté pour Me Radhia Nasraoui. En fait, ces deux candidates sont aussi valables l'une que l'autre. Me Saïda Akrémi est connue pour son militantisme inconditionnel contre la répression sous toutes ses formes. Elle a subi pour cette raison des exactions, sous le régime de Ben Ali. Elle est comme elle a été décrite dans un article de Jeune Afrique intitulé, « Saïda Akrémi, l'avocate redoutable », affable et débonnaire. Elle a elle-même déclaré dans cet article : « Quand les brimades allaient jusqu'à m'empêcher de travailler, j'ai menacé d'établir mon cabinet dans la rue ! » Quant à Me Radhia Nasraoui elle a toujours milité avec courage et conviction pour les droits de l'Homme, et n'a jamais manqué de prendre fait et cause de tout acte d'injustice perpétré contre ceux dont le seul tort a été d'exprimer leurs opinions et de dénoncer les injustices au cours de l'ancien régime. Elle avait entre autres entamé plus d'une fois la grève de la faim et a été victime elle-même de toutes sortes de persécution et de violence. Les deux candidates auraient pu être proposées, dans l'intérêt général, en laissant le choix à l'ONU de choisir l'une d'entre elles. Il n'y a aucun empêchement à cela sur le plan juridique, et cela aurait été peut-être plus habile sur le plan diplomatique. Mais maintenant que chacun des deux membres de la Troïka est resté sur sa position, la Tunisie perdra probablement ce poste à l'ONU, et une occasion supplémentaire pour la Tunisie pour s'affirmer, au sein de ladite organisation mondiale.