Le parti islamiste Hezb Ettahrir vient de réagir de façon très virulente aux déclarations du Président de la République Moncef Marzouki relatives à l'islamisme radical et à l'inscription de la Chariâa dans la Constitution. Dans un communiqué transmis hier aux médias, ce parti considère que les déclarations de Marzouki aux médias américains sont déplorables. « Les déclarations de Moncef Marzouki, supposé être le président de la République, à des médias étrangers sont abjectes. Elles méritent d'être condamnées et sanctionnées », précise le parti islamiste dans son communiqué. Et d'ajouter : «le fait que Marzouki parle de ses concitoyens (salafistes, islamistes) à l'étranger d'une façon irrespectueuse est une honte. Les chefs d'Etat qui se respectent et qui respectent leurs peuples ne vendent pas leurs problèmes contre une contrepartie financière ou politique, sachant que ceux qui agissent de la sorte sont considérés comme des agents à la solde de l'étranger.
Dans ce communiqué intitulé « Invitation et directe et franche à Marzouki de garder son cocon et de se taire», Hezb Ettahrir estime que «le fait que Marzouki se présente aux Occidentaux comme étant un responsable hostile à l'alternative islamiste et garant de la non-inscription de la chariâa dans la constitution du pays et dans ses lois est considéré comme étant une apostasie et une injustice ». Le parti excommunie, ainsi, de façon indirecte le chef de l'Etat laïc et le fondateur du parti du centre-gauche, le Congrès pour la République. Un précédent très dangereux dans la mesure où ce parti islamiste a été légalisé en juillet dernier en dépit de son refus catégorique des règles du jeu démocratique.
Califat islamique
Hezb Ettahrir est, en fait, une branche tunisienne d'un parti éponyme fondé en 1953 en Arabie Saoudite et en Jordanie par le cheikh Taqiuddin Al-Nabhani, un Palestinien diplômé de l'Université Al Azhar du Caire qui fut instituteur et juge islamique. Ce parti n'a pas cessé d'essaimer, depuis, de par le monde. Ses leaders s'étaient, dès le départ, résolus à créer des branches portant toutes le nom de Hizb Ettaahrir dans la plupart des pays musulmans, d'autant plus que le but avoué du parti est l'établissement d'un Etat islamique couvrant l'ensemble du monde musulman.
La branche tunisienne du parti panislamique a été créée au début des années 80. Dès sa constitution, cette branche s'est organisée en cellules appelées Halakat, (cercles). Il s'agit de petits groupes d'études voués à la propagation de l'Islam et du message du parti qui recrute aussi bien des ouvriers que des cadres et des étudiants en se basant essentiellement sur les livres et les brochures écrits par le Cheïkh Al- Nabhani. Bien qu'elle se présente comme une organisation non violente, la branche du Hizb ut-Tahrir a subi une forte répression. De nombreux dirigeants et membres du parti ont été régulièrement arrêtés et emprisonnés. Cette vague de répression qui s'est poursuivie aussi bien sous le règne de Bourguiba que sous celui de Ben Ali s'explique essentiellement par la nature de la thèse défendue par ce parti et qui remet en cause les systèmes politiques existants.
Hezb Ettahrir estime, en effet, la démocratie « n'est qu'une illusion entretenue par le capitalisme mondial ». Partant de ce principe, ce parti défend l'idée d'un changement radical en rupture avec le système capitaliste mondial et fondé sur la religion musulmane. Au plan politique, le parti prône un régime politique basé sur le retour au Califat.