Quinze ans de guerre civile et des dizaines de milliers de victimes, une invasion israélienne en 1982, une autre en 2006, qui a duré plus d'un mois, des dizaines d'attentats qui ont coûté la vie à des personnalités de premier rang, tout cela ne semble pas suffire ni satisfaire la soif de sang de ceux qui tentent, aujourd'hui, de faire replonger de nouveau ce pays dans le chaos. Le dernier attentat, dont la victime était un haut responsable sécuritaire est venu voiler le ciel du Liban d'un nuage sombre qui n'augure que du mal pour ce pays jadis modèle de coexistence pacifique entre ses habitants aux confessions religieuses multiples. Les événements de la dernière semaine suite à cet attentat et les troubles qui ont émaillé les obsèques des victimes font craindre le pire. L'attaque du siège du gouvernement par les manifestants suite à des discours incendiaires de la part de certaines personnalités politiques prouvent si besoin est que les Libanais sont loin d'avoir retenu les amères leçons d'un passé qui n'est pas lointain.
Les blessures profondes de la guerre civile sont pourtant ouvertes avec les clivages qui caractérisent la vie politique dans ce pays où règne la suspicion et où les milices constituent des Etat dans l'Etat.
Au moindre différend, ces milices font leur apparition pour semer le trouble et mettre l'Etat dans une situation délicate, car trancher dans un sens ou dans un autre pour faire régner le calme est toujours sujet à interprétation de la part des partis politiques qui se déchirent sur la scène.
Les événements récents font craindre un retour à la violence dans ce pays qui se trouve de par sa position géographique en plein dans les conflits qui secouent le Proche-orient. Frontières avec Israël et la Syrie, présence de centaines de milliers de réfugiés palestiniens, tout ceci fait que le pays du Cèdre vit dans un équilibre précaire, d'autant qu'à l'intérieur même, les partis politiques dans leur majorité sont liés à des puissances étrangères. Des partis dont l'essence est confessionnelle, ce qui rend encore plus difficile de les faire réunir sur un minimum de consensus qui met en exergue l'intérêt national avant toute autre considération.
Cette situation explosive se trouve aujourd'hui, confortée par la quasi-guerre que connaît la Syrie. Une guerre qui ne laisse pas indifférent les Libanais qui ont leurs préférences selon qu'on est proche de ce camp ou de l'autre. Bien que le gouvernement de Beyrouth ait choisi d'observer une neutralité dans ce qui secoue la Syrie, les forces politiques sont divisées. Le Hezbollah soutient fermement le gouvernement de Damas alors que le courant Al Mostaqbal de Saâd Hariri et ses alliés maronites se rangent du côté des insurgés. Ils sont même soupçonnés de fournir des armes à ces derniers et leur assurer des points de passages à travers la frontière entre les deux pays.
Menacé par Tel-Aviv dont les avions ne cessent de violer son espace aérien, sérieusement secoué par les troubles en Syrie, le Liban se trouve malgré lui en plein dans les conflits qui agitent la région où il constitue le maillon faible.
Fragilité à l'intérieur, menace de l'extérieur, font que le Liban est vraiment aujourd'hui, au bord de l'explosion d'autant que des puissances étrangères ne ménagent pas d'efforts pour voir Beyrouth sombrer de nouveau pour ensuite parachever le dessin de la nouvelle carte proche-orientale.