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Le patrimoine et l'argent du patrimoine
Publié dans Le Temps le 03 - 02 - 2013

Le ministère des Finances du gouvernement provisoire et peut-être d'autres organismes tous aussi provisoires, se sont mobilisés à la fois toute l'année 2012 pour vendre, au plus offrant, et avec beaucoup de publicité et gesticulations spectaculaires les biens meubles saisis au «Palais » de Sidi Dhrif de Sidi Bou Saïd espérant ainsi récupérer au moins 20 millions de dt.
Les résultats de cette action très médiatisée ont été révélés... Ils sont modestes. Un million de dt de ventes et quelques paires de chaussures de Leila Ben Ali acquises d'une manière ostentatoire par un(e) ministre ... Le «Palais» lui-même sera probablement vendu plus tard.
Il nous semble que l'affaire ne vise pas la récupération financière de ce qui a été spolié. C'est peut être la récupération politique qui est le véritable enjeu.
En quel cas le patrimoine qui est impliqué dans ces ventes est à peine évoqué alors qu'il est au centre des débats ?
Pourquoi et comment liquider des centaines d'œuvres d'art et ces objets de valeur ramassés d'une manière illégale et « exfiltrés » en général de nos propres réserves de Ksar Saïd ou achetés avec l'argent de l'Etat et offerts à l'ex- président par des zélateurs notoires ?
Que faire du «Palais» de Sidi Dhrif, va-t-il connaitre le même sort que les biens meubles saisis et malmenés dans des opérations peu convaincantes !! Pourquoi récupérer notre patrimoine sous forme seulement d'argent ?
Le cas du «Palais» de Sidi Dhrif !
Le «Palais» de Sidi Dhrif dont on parle tant, semble être, d'après beaucoup d'observateurs une villa d'envergure beaucoup plus qu'un «Palais» classique et n'est même pas un palais Beylical modeste !
C'est peut être son remplacement sur un patrimoine à Sidi Bou Saïd, face au golfe de Tunis et occupant un site extraordinaire qui fait l'intérêt de ce «Palais» et qui pourrait éveiller les convoitises des uns et des autres parmi les nouveaux maitres du pays ou de leurs amis du Golfe !!
Quel est le statut de la propriété de ce «Palais» ? Appartenant personnellement à l'ex-président Ben Ali ou à l'Etat Tunisien ?
Le «Palais» a été construit semble -t-il avec des moyens particuliers du génie militaire Tunisien sur un terrain à configuration compliquée qui a exigé des travaux très coûteux.
La propriété du terrain semble également soulever quelques problèmes.
Ce terrain étant à l'origine un terrain militaire occupé entre autres par des casemates datant de la deuxième guerre mondiale et situé sur un site naturel supposé être non constructible !
Est-ce que ce terrain a été acquis par Ben Ali ? A-t-il été déclassé afin de pouvoir être construit ? Nous ne le savons pas.
En principe est ce qu'il existe un document qui atteste que Ben Ali a obtenu le changement de vocation de ce site ; Tout président qu'il était Ben Ali, aimait s'entourer de précautions formelles légales ?
Nous pensons que ce site, indépendamment de toutes ces précautions est resté un bien de l'Etat et de la communauté nationale du point de vue de fond et de la forme et qui à ce titre, il est bien immeuble de l'Etat et tout ce qu'il contient comme biens meubles, revient à l'Etat et à son patrimoine.
Si tout cela est établi, il semblerait que ces biens immeubles ou meubles ne peuvent être rétrocédés ou vendus sans autre forme de procès.
La réparation
Il serait plus judicieux, sur le plan politique, de garder et de sauvegarder le «Palais» comme patrimoine national et comme témoignage vivant de la « Révolution ».
Pourquoi devrons-nous liquider tout un pan de notre histoire aussi désagréable qu'il puisse paraitre ? Ce palais peut-il être recouvert et être affecté à d'autres fonctions plus généreuses et moins mercantiles. La « réparation » n'est pas nécessairement sonnante et trébuchante quoique certains le pensent parmi les maitres actuels du pays.
La « réparation » au profit de notre peuple est plus juste, plus efficace et plus fondamentalement morale et politique si elle choisissait d'octroyer à notre patrimoine, la primauté de la propriété et de l'usufruit de ce palais et des autres demeures saisis aujourd'hui par l'Etat suite à la Révolution .
Passé le moment de colère contre tous les spoliateurs, il ne faudrait pas que notre ressentiment par rapport à eux à leur crime et à leur malversation devienne une raison pour liquider nous-mêmes notre propre patrimoine.
Nous acceptons le réquisitoire mais pas ses conclusions dévastatrices pour notre patrimoine. Un peu de retenue messieurs les liquidateurs, vous êtes provisoires et notre patrimoine est quasi-éternel ! Ne le bradez pas.
Les biens spoliés sont enfin de compte les biens de notre peuple ! Personne n'a le droit d'en user comme bon lui semble comme une sorte de butin de guerre. La réparation pose quelques problèmes, comment les résoudre ? Est- ce que la récupération de quelques millions de dinars suffit pour « réparer » les crimes commis par les spoliateurs, crimes qui ne sont pas d'ordre seulement financier mais surtout moraux et politiques.
L'exemple de la récupération des pièces archéologiques volées ces derniers années des réserves de l'Etat à Ksar Saïd et d'autres lieux et l'organisation d'une très belle exposition à Carthage sous le titre « Patrimoine spolié, patrimoine récupéré », montre la voie à suivre pour illustrer la solution qu' on devrait adopter ...Montrer au peuple son propre patrimoine, sa grandeur et sa valeur, spirituelle ancestrale . Les spoliateurs ont voulu s'isoler avec notre patrimoine, le masquer à notre peuple.
Le meilleur moyen pour démasquer cela a été trouvé par l'INP en organisant une exposition de stèles néo-puniques apparemment de facture populaire mais très suggestive de la conquête d'une figuration schématique et hiératique. Tous les autres objets comme les chapiteaux de toutes sortes constituent une collection originale qui a été mise en valeur indirectement parce qu'ils ont été volés...
La collection de deux coffres italiens et des imitations est également un exemple pour dire que les objets volés acquièrent une nouvelle valeur surtout après leur récupération par le patrimoine. Ne peut-on pas opérer de la même manière avec ce qui a été trouvé dans les palais et demeures des ex-maitres du pays !
Nous héritions d'une histoire plusieurs fois millénaire et d'un patrimoine très riche constitué de milliers et de milliers d'objets, de sites, de monuments, d'inscriptions innombrables ; que pourrons-nous faire ?
Dans le cas qui se pose aujourd'hui
Vouloir vendre ou liquider ce patrimoine ou un de ses éléments peut signifier qu'on veut nous débarrasser d'une période considérée comme « bonheur » de notre patrimoine...à la subrepticement, d'une manière peu cavalière et semble ignorer que notre histoire n'est pas toujours glorieuse et qu'elle comporte des périodes encore pires que celles des 23 dernières années. Espérons qu'on ne vive pas dans l'avenir proche, d'événements pires encore.
L'histoire arabo-musulmane, à l'est comme à l'ouest de ce vaste empire, regorge de ces exemples où les nouveaux venus au pouvoir monarques, Emirs, princes ou président aujourd'hui héritent d'une manière légitime ou autre le pouvoir et aimaient souvent effacer jusqu'au moindre signe, symbole, trace ou palais, ayant appartenu aux précédents détendeurs du pouvoir fussent-ils du même parti de la même dynastie...cette tradition qualifiée « d'orientale » signifie que le pouvoir politique...nouveau, fusse-t-il provisoire refuse de considérer l'histoire comme continuité mais aussi comportant des ruptures et que les ruptures conservent quelquefois ce qui a été nié.
Sommes- nous en train de vivre une transition violente et qui est en fait pacifique, où ce qui a été édifié comme palais et demeures, biens culturels, meubles, objets d'art, tableaux de peinture, objets de collection et d'autres doit être anéanti ou tout au moins vendu comme c'est le cas aujourd'hui !!
Il me semble qu'une position pareille n'est pas acceptable, il reste que tous les biens, bien ou mal acquis l'ont été avec l'argent du peuple et qu'ils reviennent à ce même peuple à son patrimoine et à son histoire. La coupure avec le régime déchu est politique, économique et morale. L'histoire est une continuité qui implique la rupture ou vis-versa. Elle implique l'ancien et le nouveau dans un rapport dialectique, le positif et le négatif forgent le mouvement dans ses continuités et ses ruptures.
La révolution française qui s'est opposée à une féodalité autrement plus sanguinaire et plus violente, a retenu les leçons de l'histoire puisqu'elle n'a pas bravé les biens, les richesses, les objets d'art, les palais de la royauté et qu'elle les a sauvegardés comme patrimoine de la France. Le Louvre, Versailles, Fontainebleu et autres châteaux plus imposants que ce modeste palais de Sidi Dhrif, sont exploités aujourd'hui et leurs collections autrement plus riches sont montrées à des millions de visiteurs...des milliards d'Euros entrent dans les caisses de l'Etat et financent la maintenance de ces espaces aussi que les collections qui les animent.
Un autre exemple aussi plus radical est constitué par la Révolution Russe, la Révolution bolchevique beaucoup plus radicale que la Révolution française ou que la nôtre, n'a pas détruit les palais tsaristes et ne les a pas vendus non plus. Elle n'a pas non plus vendu les objets, les meubles, les collections d'art des tsars. Cette Révolution a sauvé le Kremlin et d'autres palais de Leningrad (St Petersburg)...etc.
Le palais de St Petersburg est devenu le plus grand musée d'art moderne et contemporain du monde. L'Ermitage a survécu à toutes les vicissitudes de l'histoire et mieux que cela, a créé des collections prestigieuse enviées par tous les grands musées du monde. Les Russes sont fiers aujourd'hui des milliers d'œuvres d'artistes de l'école de Paris (avec ses Picasso, ses Matisse, ses Chagall...) de l'école formaliste et de la période révolutionnaire russe mais aussi des porties arts de tsars et tsarines qui y sont gardés et sauvegardés. Tout cela pour dire que la révolution la plus radicale a été la plus belle, la plus humaniste et qu'elle n'a pas été destructrice. Notre révolution ne devrait pas non plus liquider ce qu'elle a hérité. Elle ne devrait pas garder dans de mauvaises conditions les 11000 travaux artistiques entreposés à Ksar Saïd. Elle devrait terminer la construction du musée d'art moderne et contemporain projeté dans la future cité de la culture de Tunis, le viabiliser, le rendre fonctionnel et l'équiper convenablement afin qu'il puisse jouer son rôle de conservation et de mise en valeur de l'art dans notre pays.
Au lieu de pouvoir garder le «Palais» de Sidi Dhrif pour son éventuelle reconversion en faveur de la culture (les espaces manquent aussi à Sidi Bou Saïd), d'aucuns pensent le vendre et vendre même ce qu'il contient comme œuvres d'art ou même ses collections d'objets mêmes ceux de mauvais goût !!
L'iconoclasme se niche quelquefois même dans les recherches apparemment innocentes de financement de budgets mal bouclés et en mal de ressources.
Notre Révolution ne devrait pas faire table rase de notre passé proche et le considérer indigne d'intégrer notre histoire, une histoire que personne ne peut effacer par une décision administrative ou idéologique.
Notre devoir de mémoire doit accepter de traiter avec notre histoire aussi peu reluisante qu'elle soit et d'une manière positive nous devons garder ces palais et demeures même ceux qui ont été mal acquis et projeter des reconversions afin de les aménager en centres culturels modernes dont notre pays a tant besoin.
Nous pouvons plus concrètement ouvrir les débats à ce sujet et suggérer comment reconvertir ces lieux tellement décriés par certains qui n'envisagent que de les liquider sans autre forme de procès.
Il nous semble qu'une opération d'inventaire des biens immobiliers et mobiliers en question et ayant été spoliés par les anciens maitres du pays, s'impose. Une commission nationale se chargera de l'exécution de cet inventaire et proposera ensuite des reconversions de l'ensemble de ces palais et demeures.
Cette reconversion devrait être opérée en faveur des opérateurs dans l'art ou des métiers d'art. Nous suggérons la création d'un musée spécifique de la céramique artistique à la Soukra, une maison d'hôtes ou une cité internationale de l'art au Mornag, une maison ou un musée pour les métiers d'art (fer forgé, verre, bois, tapisserie artistique, soie) à Mahdia ou à la Medina de Tunis.
Le Palais de Sidi Dhrif pourrait être reconverti en lieu d'exposition de la collection découverte dans ce palais pouvant ainsi accueillir peut être une nouvelle collection de la peinture qui a tenté exclusivement de la représentation artistique de Sidi Bou Saïd durant la période contemporaine.
Nous suggérons également de sauvegarder tout ce que contiennent ces demeures, objets de valeur, tableaux, œuvres d'art comme patrimoine national et de récupérer tout ce qui a été dérobé dans ces palais et demeures de Sidi Bou Saïd, de Carthage, de la Soukra pendant la Révolution. Il faudra seulement enquêter sur les œuvres disparues de la villa Slim Chiboub et des autres villas.
D'autres suggestions peuvent être apportées par cette commission, l'essentiel, c'est de ne pas faire subir à notre patrimoine l'injure du temps en le faisant disparaitre ou en le maltraitant comme indigne d'être sauvegardé ou mis en valeur.
Mais qui pourrait écouter mes suppliques. Le Ministre de la culture ou peut être son nouveau conseiller pour l'art plastique?


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