Depuis les parutions successives des deux derniers projets de la Constitution, les débats et les indignations vont bon train. Constitutionnalistes, juristes, militants des droits de l'Homme et société civile se sont penchés dessus. Si l'on reconnaît certaines modifications positives, l'ambiguïté dans certaines formulations et l'incohérence dans d'autres ont semé la zizanie et inquiètent, désormais, les défenseurs des droits humains et de la démocratie. Depuis, un appel en direct est lancé par le juriste et expert en droit constitutionnel, M. Iyadh Ben Achour, pour lire et décortiquer la globalité du tout dernier projet de la Constitution, afin d'y remédier. Pour ce faire, deux associations ont répondu à cet appel en organisant une journée de lecture du projet de la Constitution du 1 er juin 2013. Il s'agit de l'Association tunisienne de droit constitutionnel (ATDC) et l'Association des recherches sur la transition démocratique (RTD) avec le partenariat de l'organisation Democracy Reporting International (DRI). Plus de cent personnes se sont réunies, hier, autour du dernier projet de la Constitution. Société civile, citoyens, universitaires, juristes, politiciens et constitutionnalistes ont répondu présents à l'appel de M. Iadh Ben Achour. Une dizaine d'intervenants de ce que la Tunisie peut compter de son élite en matière de lois et de Constitution ont animé la journée qui était répartie sur une multitude thématique relative à l'écriture d'une Constitution tunisienne garante des droits humains et d'un Etat démocrate. Neuf experts en droit constitutionnel ont passé au peigne fin le projet du 1er juin 2013, ses incohérences et ses lacunes. Un déséquilibre inquiétant entre les pouvoirs Des noms assez connus ont participé à cette journée à l'instar du Secrétaire général de l'Académie Internationale de droit constitutionnel, Ghazi Ghrairi, le constitutionnaliste Iadh Ben Achour, ou encore l'expert en droit constitutionnel Slim Laghmani, etc. Les points qui ont été soulevés et disséqués à la loupe du dernier projet sont : le rapport introductif, l'article 141 qui est en totale contradiction avec les articles 1 et 2 dudit projet et qui concernent les critères d'un Etat civil ; les dispositions transitoires, les droits et les libertés, le pouvoir juridique, le tribunal constitutionnel, la fiscalité, les principes généraux. Durant cette journée de lecture, les experts ont attiré l'attention sur les lacunes, les incohérences linguistiques et juridiques qui existent dans ce tout dernier projet le la Constitution. Dans le même contexte, les neuf spécialistes ont vivement critiqué une multitude d'articles dont le contenu est assez ambigu et peut prêter à confusion, ce qui représente quelque part un réel danger sur l'instauration de la démocratie et la sauvegarde des droits de l'Homme. Un réel déséquilibre entre les trois pouvoirs (législatif, exécutif et juridique) a été noté par M. Iadh Ben Achour. Il a soulevé deux points assez importants dans le dernier projet, à savoir le danger que représentent les dispositions transitoires et le déséquilibre entre les pouvoirs. Iadh Ben Achour : «Les deux problèmes majeurs de cette dernière version s'articule autour d'un véritable déséquilibre entre les trois pouvoirs et la concentration du pouvoir entre les mains de l'Assemblée constituante. Il faudrait aussi repenser et refaire la totalité des dispositions transitoires. Celles qui existent sont à refaire. Je citerai par exemple les dispositions relatives à l'adoption de la Constitution, ensuite sa promulgation puis sa publication. Celles qui existent installeront un nouveau modèle autoritaire, comme le cas du tribunal administratif jugeant la constitutionnalité des lois, ce qui ne relève normalement pas du travail d'un tribunal administratif. Par ailleurs, ces dispositions transitoires bloquent certaines compétences notamment du tribunal constitutionnel pendant trois ans !»