La « feuilletonite » bat son plein sur nos chaînes télévisuelles en ce mois de Ramadan. Peut-être, ou certainement le seul moiS de l'année où un chauvinisme certain, ou plutôt un certain chauvinisme s'empare du téléspectateur «lambda », qui, sitôt la rupture du jeûne amorcée, se jette sur la télécommande pour faire son choix et « slalomer » d'un programme à l'autre, quitte à se rabattre sur une seconde partie de soirée, pour ne pas avoir à sacrifier un feuilleton au profit d'un autre, prenant un plaisir fou à suivre scrupuleusement, quasi-religieusement même les péripéties d'une fiction ou d'une autre, il faut l'avouer généralement, bien menée. Les cartes maîtresses cette année, en la matière seraient l'apanage de la chaîne « El Watania 1 », avec le feuilleton « Yawmiyatou Imraâ », réalisé part Mourad Ben Cheikh, et de la chaine « Ettounsia T.V » qui diffuse actuellement sur les fréquences «d'El Hiwar Ettounsi », avec un feuilleton, également à caractère social, signé Khaled Barsaoui. Le constat qui s'impose à cet égard, c'est que le choix des réalisateurs, venant du cinéma, mais qui ne sont pas étrangers au monde de la télévision non plus à l'instar de Mourad Ben Cheikh qui a cumulé une certaine expérience à la télévision italienne, s'est avéré et c'est le moins que l'on puisse dire, autrement heureux. Les thèmes traités se chevauchent un tant soit peu, actualité oblige, comme il est vrai qu'il arrive qu'on s'emmêle les pinceaux en passant d'un feuilleton à l'autre, puisque l'on y retrouve les mêmes figures-phares, les mêmes comédiens qui jouent de concert, dans les deux fictions. Du coup, l'on a du mal parfois à retrouver les repères et la distance nécessaire, pour passer d'une histoire à l'autre. C'est donc, la manière de traiter le sujet, sur le plan visuel, qui fait la différence. Et c'est ce qui nous vaut un feuilleton très abouti, particulièrement du côté d' « El Watania 1 », avec ce « Journal d'une femme » de très belle facture, et pas du tout à ras les pâquerettes, comme on pourrait s'y attendre de prime abord. D'abord, il faut le concéder, avec un casting aussi performant, la prise de risques est minime. Wajiha Jendoubi, Sawsen Maâlej, Najoua Zouhour, Fethi Haddaoui, Hichem Rostom et nous en passons et des meilleurs, c'est déjà un cadeau en soi. Wajiha, c'est de l'or en barres, époustouflante, c'est le moins que l'on puisse dire, dans ce rôle de femme blessée à vif, qui découvre, après des années de mariage que son mari la trompait avec une autre femme, avec laquelle il avait signé un contrat de mariage « orfi », et dont il a eu un enfant de surcroît. Maâlej n'a plus rien à prouver, côté performance de comédienne, avec un jeu tout en finesse, tout en sobriété, toujours sur le fil, en veuve éplorée et ex-femme battue par un mari alcoolique et qui retrouve le goût de vivre après avoir fait connaissance avec un veuf, éploré comme elle (Fathi Haddaoui est sublimissime dans ce rôle), Najoua Zouhour est digne d'un opus d'Almoldovar, et c'est le moins que l'on puisse dire ; craquante dans un rôle secondaire où elle s'impose avec tout son allant, sa fraîcheur et sa fougue et nous en oublions, car, dans ce feuilleton, les cartes sont tellement bien distribuées qu'il n'y a qu'à se laisser guider, et c'est un vrai plaisir… Pas besoin de souligner que toute la trame de l'histoire, offre en palimpseste, comme un kaléidoscope de la société tunisienne, observé par un regard féminin, qui se pose sans faux-semblants, sur la réalité des femmes intra-muros, mais pas seulement. Et c'est un regard qui ne triche pas. Du coup, « Yawmiyatou Imraâ » ne peut laisser indifférent ; Il pique au vif, et frappe de plein fouet !