Education : Kaïs Saïed convoque ses ministres et veut rectifier les erreurs du passé    UGTT, ambassade américaine, dette publique…Les 5 infos de la journée    Nuit froide sur les hauteurs tunisiennes : 13°C en plein été !    Japon : alerte volcanique relevée au mont Kusatsu-Shirane    France : une panne électrique perturbe fortement le trafic ferroviaire international    Photo du jour - Ahmed Jaouadi, le repos du guerrier    Italie : amende d'un million d'euros contre Shein pour allégations environnementales trompeuses    Tunisie : Peut-on se baigner à partir de demain ?    Des chauffeurs de taxi de Kasserine en marche vers Tunis    BH Assurance lance "NEXT" : un challenge technologique étudiant placé sous le signe de l'innovation et de l'Intelligence Artificielle    Docteurs au chômage : les coordinations réclament cinq mille postes pour sortir de la crise    Ces deux ministres que Kaïs Saïed refuse de limoger    Fin du sit-in devant l'ambassade américaine à Tunis    Orientation universitaire : ouverture d'une enquête sur des soupçons de falsification au Kef    La flottille "Al Soumoud" partira de Tunisie et d'Espagne pour Gaza en septembre    Soldes d'été: elles ont perdu leur attrait auprès de la clientèle et des commerçants    La Chambre nationale des Photographes Professionnels met en garde contre les imposteurs dans les festivals    Kairouan : un adolescent agressé, dénudé et filmé… sa mère réclame justice    Incendies, accidents, secours... 488 interventions en un seul jour !    Elles ont osé : Portraits de tunisiennes qui ont fait trembler le patriarcat    Tunisie : 84 % de la dette extérieure couverte par le tourisme, affirme le ministre    Production de clinker suspendue : les difficultés s'accumulent pour Les Ciments de Bizerte    À quelques jours de l'ultimatum, Trump déploie ses sous-marins et envoie son émissaire à Moscou    Soupçons de manipulation de l'orientation universitaire : le service des crimes informatiques chargé de l'enquête    Ahmed Jaouadi champion du monde à nouveau à Singapour dans la catégorie 1500 m NL (vidéo)    La Nuit des Chefs au Festival Carthage 2025 : la magie de la musique classique a fait vibrer les cœurs    JCC 2025 : hommage posthume à l'artiste libanais Ziad Rahbani    Houssem Ben Azouz : des indicateurs positifs pour le tourisme    Omra 2025-2026 : Attention aux arnaques ! Voici ce que les Tunisiens doivent absolument savoir    Interdiction de baignade imposée face à une mer agitée aujourd'hui    Séisme de magnitude 5,1 au large des îles Salomon    L'indien Tata Motors lance une OPA sur Iveco pour 3,8 milliards d'euros    À Oudhna : Walid Tounsi signe son retour sur scène lors de la première édition du Festival International des Arts Populaires    Chokri Khatoui dénonce l'arbitrage après la défaite du stade tunisien en Supercoupe    Supercoupe : Maher Kanzari salue un titre mérité malgré des lacunes à corriger    Robyn Bennett enflamme Hammamet dans une soirée entre jazz, soul et humanité    Chantal Goya enchante Carthage avec son univers féerique    Supercoupe de Tunisie – EST-ST (1-0) : Le métier des «Sang et Or»    Ahmed Jaouadi, Abir Moussi, Brahim Boudebala…Les 5 infos du week-end    Moez Echargui remporte le tournoi de Porto    Fierté tunisienne : Jaouadi champion du monde !    Au Tribunal administratif de Tunis    Najet Brahmi - La loi n°2025/14 portant réforme de quelques articles du code pénal: Jeu et enjeux?    Lotfi Bouchnak au festival Hammamet : Tarab et musique populaire avec l'icône de la musique arabe    Ces réfugiés espagnols en Tunisie très peu connus    « Transculturalisme et francophonie » de Hédi Bouraoui : la quintessence d'une vie    Le Quai d'Orsay parle enfin de «terrorisme israélien»    Mohammed VI appelle à un dialogue franc avec l'Algérie    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



La descente aux enfers du «pays des Purs»
Roman: « Le Jardin de l'aveugle » du Pakistanais Nadeem Aslam
Publié dans Le Temps le 04 - 10 - 2013

Dans Le Jardin de l'aveugle, un roman qui vient de paraître, le Pakistanais Nadeem Aslam a puisé son inspiration dans les heurs et malheurs de son pays, à la fois en marge et au cœur de « la guerre contre la terreur » que mènent les Occidentaux à ses frontières depuis une décennie.
Un récit épique qui met en scène la descente aux enfers du « pays des Purs » que les contingences de l'Histoire ont brutalement éloigné des promesses de sa fondation.
« Le troisième parent, c'est l'histoire. » Ainsi commence le quatrième roman du Pakistanais Nadeem Aslam Le jardin de l'aveugle qui vient de paraître en français. C'est un roman à la fois profondément politique et intime, sensuel et brutal, qui brasse les thèmes chers à son auteur: grandeur et décadence de l'islam, confrontation dévastatrice entre l'Occident et l'Orient, l'amour qui protège contre les turbulences de la politique et de l'histoire.
Avec ce nouvel opus, Aslam revient à son Pakistan natal où il avait situé son premier roman Season of the Rainbirds (non traduit en français) paru au début des années 1990, avant de partir explorer les tiraillements identitaires de la diaspora pakistanaise en Angleterre (La Cité des Amants perdus, Seuil 2006), puis le chaos afghan (La vaine attente, Seuil 2009).
De Mohammed Atta à Mohammed Bouazizi
Le Jardin de l'aveugle, qui est sans doute l'un des romans étrangers les plus poignants de cette rentrée littéraire, renoue avec le thème de la guerre et de ses soubresauts, mais raconté cette fois du point de vue pakistanais. « On a oublié, explique l'auteur, le lourd tribut en termes de vies humaines que le Pakistan a dû payer à cette guerre insensée qui se déroule de l'autre côté de sa frontière. Plus de 30 000 hommes, femmes et enfants pakistanais ont perdu la vie depuis 2001 dans la violence perpétrée par les fondamentalistes musulmans qui veulent punir le Pakistan pour s'être allié aux envahisseurs occidentaux. D'autre part, les bombardements effectués depuis 2004 par des drones de la CIA visant les zones tribales pakistanaises frontalières avec l'Afghanistan, font beaucoup plus de victimes parmi les citoyens innocents que parmi les terroristes visés. »
Le récit de Nadeem Aslam débute au lendemain des attentats islamistes du 11-Septembre sur le sol américain. Les représailles américaines ont commencé avec l'invasion de l'Afghanistan par les armées occidentales. L'ambition du romancier était de raconter la décennie fatidique qui s'ouvrait alors pour le monde musulman, commençant par les événements du 11-Septembre et débouchant dix ans plus tard sur le printemps arabe. « Du suicide du pirate de l'air Mohammed Atta jusqu'à l'immolation par le feu du Tunisien Mohammed Bouazizi. Entre ces deux morts, se déploie la terrible guerre occidentale contre l'Afghanistan, dont l'onde de choc a failli emporter le Pakistan. » Le jardin en déshérence - titre du roman d'Aslam - est la métaphore du Pakistan fragilisé : ce jeune pays sexagénaire, situé au carrefour des civilisations et où l'idéalisme des origines a cédé progressivement la place au mélange explosif d'extrémisme religieux et de corruption politique.
Le Pakistan, né de la partition de l'Empire des Indes en 1947, se voulait terre promise des musulmans du sous-continent indien. Le jardin de l'aveugle, tout comme ses protagonistes, sont empreints de la nostalgie de cette promesse fondatrice du « pays des Purs ». Le patriarche Rohan dont la présence enjambe les 400 pages du roman, est animé par cet idéalisme originel, mais ses idéaux ne résisteront pas longtemps à la marche destructrice de l'Histoire.
Ré-enchanter le jardin de l'enfance
La défaite de l'idéalisme de Rohan commence lorsque les fondamentalistes musulmans transforment en madrasa pour futurs jihadistes l'école qu'il avait fondée avec sa femme pour les enfants pauvres et où les salles de classe étaient nommées d'après les hauts lieux de la culture islamique : Cordoue, Bagdad, Grenade… La tragédie touche le vieil homme de très près lorsqu'il voit ses deux fils Mikal et Jeo partir en Afghanistan, moins pour participer au jihad que pour porter secours à la population afghane prise entre deux feux.
Emportés par la spirale des violences et des brutalités que le romancier a mise en scène avec un sens consommé de la dramaturgie de la guerre et avec empathie pour ses victimes, les fils de Rohan ne reviendront pas, laissant à leur vieux père menacé de cécité la mission impossible de ré-enchanter le jardin de leur enfance.
Si le récit de Nadeem Aslam ne sombre pas pour autant dans la noirceur et le désespoir, c'est parce qu'il est porté par des figures de femmes, les unes plus lumineuses que les autres. Elles ont pour nom Naheed, Tara, Yasmine, Sofia. Amantes, mères, sœurs des idéalistes fauchés par l'Histoire, elles héritent du monde. A elles incombent la tâche de transmettre aux générations futures le goût de leurs ancêtres pour la beauté et la pureté que ni les bombardements des drones ni l'intolérance des religieux fanatiques n'ont su réduire au néant. « Elles incarnent l'espoir. Et peut-être même la possibilité de renouer avec le rêve des pères fondateurs du Pakistan », ajoute le romancier.
(MFI)
Le Jardin de l'aveugle, par Nadeem Aslam. Traduit de l'anglais par Claude et Jean Demanuelli. Paris, Le Seuil, 2013. 412 pages.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.