Célébrée chaque 5 octobre, la Journée mondiale des enseignant(e)s est une occasion pour rendre hommage et mettre en valeur le rôle primordial que joue le cadre enseignant pour offrir une éducation de qualité à nos enfants tous âges confondus. Il s'agit d'ailleurs, d'un sujet d'actualité, car nul ne peut nier que la formation scolaire et universitaire a changé de vocation en Tunisie depuis des années. Le quantitatif l'a malheureusement, emporté sur le qualitatif. Cette stratégie adoptée par l'ancien régime avait pour objectif de marginaliser cette structure fondamentale pour la construction et l'édification de l'intelligence humaine. En fait, « dans le monde entier, une éducation de qualité offre de l'espoir et la promesse d'un meilleur niveau de vie », alors que chez nous, l'école, c'est-à-dire le système d'enseignement dans un sens plus large, est devenu une machine de production de chômeurs non qualifiés. D'ailleurs, avec le temps, l'image de l'école a changé. Elle n'est plus une structure qui forme les futures générations sur des bases solides et des valeurs nobles. Elle n'est plus considérée comme un ascenseur de promotion sociale et ce, à cause de la défaillance de tous le système éducatif. La qualité de formation En fait, les évaluations internationales des acquis des élèves, dont le programme PISA, (Programme International pour le Suivi des Acquis des élèves) ont prouvé que nos élèves sont en dessous de la moyenne en termes d'acquis et de performances scolaires, ce qui illustre un certain déficit de la qualité de formation. Ce constat est désolant voire inquiétant, mais rien n'empêche d'avoir une nouvelle génération bien formée, intelligente et capable d'analyser les faits avec un esprit critique constructif. Tout dépend de la volonté politique. Il ne peut y avoir par ailleurs, d'éducation de qualité sans enseignants compétents et motivés. « Les enseignants représentent l'un des nombreux facteurs qui permettent de maintenir les enfants à l'école et favorisent l'apprentissage. Ils aident les étudiants à acquérir une pensée critique, à traiter des informations provenant de sources diverses, à travailler en collaboration, à résoudre des problèmes et à faire des choix informés ». Sauf que la profession est dévalorisée dans notre pays tout comme le système de formation, d'où la nécessité de redonner à la profession sa valeur en respectant le cadre enseignant et en lui offrant un environnement de travail propice en termes de moyens financiers et logistiques. Nul ne peut nier que les enseignants tunisiens exercent dans des conditions très difficiles à cause de la mauvaise répartition du temps, de l'infrastructure vétuste, de la violence qui se propage davantage dans le milieu scolaire, de surcharge dans les classes…La liste des lacunes est très longue ce qui coûte cher aussi bien au cadre enseignant, qu'aux élèves en même temps. Chaque année, des milliers d'élèves quittent les enceintes scolaires de manière précoce ou échouent dans leurs études pour se retrouver sans qualification ou dériver carrément. Notre école est malheureusement malade du système adopté jusque là. Elle est négligée à tous les niveaux. D'ailleurs les cas de gale enregistrés cette semaine dans quelques écoles situées dans des régions défavorisées témoignent de la nonchalance du ministère de l'Education et de sa négligence des zones pauvres et reculées où différents types de problèmes posent. Revaloriser la profession, est dès lors une urgence. Cela est bénéfique non seulement pour les enseignants, aux élèves et aux étudiants mais aussi à toute la société dans son ensemble. L'enseignant est un pilier pour construire l'avenir glorieux de la société tunisienne d'où la nécessité de lui accorder l'importance requise. Sana FARHAT Hussein Boujarra, secrétaire général de la Fédération Générale de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique : La réforme du système d'enseignement, une nécessité Il importe de mettre la Journée Mondiale des Enseignants dans un contexte bien déterminé en Tunisie : la réforme du système d'enseignement en général. En fait, tous les intervenants dans le domaine (enseignants, syndicalistes et même des cadres dans les ministères de tutelle sont conscients et d'accord sur la nécessité de réformer cette structure pour éradiquer les lacunes et la corruption enracinées bien avant la révolution. En revanche, rien n'a été fait sur le terrain pour concrétiser cet objectif commun. A notre niveau, la Fédération Générale de l'Enseignement Supérieur a créé une commission mixte qui regroupe la Fédération, le ministère de tutelle et les structures pédagogiques élues. Créée depuis l'année dernière la commission a organisé six rencontres régionales où quatre axes de travail ont été débattus. Il s'agit de la gouvernance de l'Université tunisienne, de la carte universitaire, de la recherche scientifique et des programmes de formation. Un ensemble de recommandations ont été formulées telle la consultation de tous les intervenants, chacun dans son domaine d'action. Cependant, ladite commission a fait face à plusieurs obstacles, essentiellement le démarrage des réunions au début de l'actuelle année universitaire et ce, à cause de l'attitude du ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche Scientifique car, il est le président de la commission et c'est lui qui doit appeler tous les partenaires à se réunir. Ce n'est pas tout. La commission ne dispose pas de moyens financiers pour organiser les rencontres dans les régions. Il importe dès lors de redynamiser cette commission car la réforme du système universitaire est une nécessité. Pour ce faire, il est indispensable d'écouter les enseignants, les étudiants, de respecter les accords conclus en ce sens ainsi que les libertés académiques. Finalement je tiens à dire qu'on regrette de célébrer cette journée mondiale alors qu'une grève est prévue d'ici cinq jours dans l'Université ». Noureddine Chemingui, secrétaire général du Syndicat Général de l'Enseignement Primaire : «Il faut rétablir l'image de l'école en tant qu'ascenseur social» « Nul ne peut nier que l'école et tout le système d'enseignement sont aujourd'hui en crise. Nous exprimons à l'occasion de la Journée Mondiale des Enseignants notre prédisposition à réviser la structure d'enseignement dans l'absolu : l'école primaire, le lycée, l'université…d'où l'importance de préparer un nouveau projet qui coupe court avec les problèmes et les lacunes hérités et créés par l'ancien régime, à savoir l'échec scolaire, l'abandon des études et « le gaspillage pédagogique ». Nul ne peut nier par ailleurs, que l'image de notre école s'est détériorée lors des dernières années, d'où l'importance de travailler sur ce point très sérieux. Il faut en fait, rétablir l'image de l'école auprès de la conscience collective en tant qu'ascenseur social, qu'espace où l'on forme les valeurs, la citoyenneté, des élèves citoyens, surtout qu'il existe une crise de valeurs, des programmes de formation en général (enseignants, cadres…). Malheureusement, l'école est devenue un espace répugnant pour l'élève ce qui nécessite plus que jamais de la restructurer à tous les niveaux ».