La Révolution tunisienne réalisée essentiellement par les jeunes en quête de travail et de dignité, a été récupérée (c'est désormais une Lapalissade) par les tribuns politiques, forts de leur opposition à Ben Ali et dont beaucoup ont connu les geôles ou l'exil. Mais notre regard se pose aujourd'hui sur un mécanisme bizarre ; aux commandes du pays, des temps de la Troïka, les exilés qui ont vécu au sein des démocraties occidentales, là où les libertés sont sacro-saintes, se sont métamorphosés s'érigent même contre les libertés elles-mêmes. Ni Ghandi, ni Nehru La campagne électorale de Marzouki est révélatrice de ce changement radical du discours. D'un défenseur acharné des droits de l'Homme en France, Marzouki, candidat à la présidentielle en Tunisie, multiplie les discours tendus et les propos agressifs à l'encontre de son adversaire. En effet, l'ancien président provisoire n'hésite pas à employer des termes forts dans ses discours à savoir : ‘'Taghout'', ‘'hégémonie'', ‘'corrompus ‘','' Fascistes'' et ‘'Taghaouel'' ! Un discours trotskiste violent qui remet en question sa formation démocratique et ses idées progressistes. De plus, sa campagne électorale est surtout marquée par une haine totale contre son rival. Le président sortant n'hésite au moindre instant dans les plateaux télévisés ou même lors des meetings populaires à dénigrer le second candidat à la présidentielle en l'accusant de sénilité et d'inaptitudes physique et mentale. Avant même l'annonce des résultats définitifs du second tour, l'homme accuse l'équipe de Chafik Sarsar de truquages et de falsifications des élections. Des propos qui divisent les Tunisiens en deux clans : Les soi disant ‘'révolutionnaires'' et les ‘'contre révolutionnaires''. Des discours chargés de violence qui ne sont pas dignes ni d'un adepte de Ghandi ni d'un humaniste honnête. Ces maladresses persistent après les présidentielles. Huit recours d'oppositions ont été signalés après le premier tour. Un chiffre inquiétant qui démontre l'acharnement de l'ancien président et de son équipe à perturber coûte que coûte le processus démocratique récent en Tunisie. Le ton de Marzouki dans les conférences de presse et dans les interviews à la télévision est amer et agressif. Cerise sur le gâteau !: l'annonce maladroite de la création du Mouvement du Peuple des Citoyens risque de signer, prématurément, la fin de sa carrière politique. Le choix du nom est chargé de significations périlleuses : qui sont ces citoyens ? Nous, vous ou les autres ? La question demeure sans réponse. Ajoutons à tout cela, son atermoiement au sujet de la démission avant les élections. Marzouki semble chercher tous les prétextes possibles pour saborder la transition démocratique. Pourtant MMM a passé plus de vingt ans en France, où il a appris les abc de la démocratie. Il devait, à la limite, imiter le modèle démocratique occidental. Malheureusement, ce n'était pas le cas, sous son règne, on en a vu de toutes les couleurs ! ‘'Sous son règne...'' Sous le règne de Mohamed Moncef Marzouki, connu pour être le démocrate patriote par excellence, les libertés individuelles et collectives ont été menacées. Tout le monde se rappelle les vagues de contestation qui ont suivi la diffusion du film Persépolis et l'exposition artistique à l'Abdellia. Le président, contre toute attente, se range du côté des extrémistes religieux et ne défend nullement la liberté de l'Art et de l'artiste. Sous son règne, des assassinats politiques ont été commis, des menaces d'attentat se sont propagées partout sur le territoire tunisien et beaucoup d'hommes politiques sont jusqu'à présent sous protection policière rapprochée. Besma Khalfaoui, Samir Taïeb, Hamma Hammami et Béji Caïd Essebsi sont privés de leur liberté. L'ancien président garde, pourtant, une position ambiguë voire flasque par rapport à l'émergence du terrorisme. Sous son règne..., le salafisme intolérant s'est amplifié. Le comble c'est que Cheikh Khamis Mejri, était reçu au palais présidentiel ! N'est ce pas là une reconnaissance implicite de l'extrémisme religieux ! Sous son règne..., le peuple était divisé, le terrorisme contre les institutions de l'Ordre (police, armée...) est de plus en plus menaçant et le tourisme en déclin. Sous son règne et sous celui de la Troïka, la constitution a failli être inspirée de la Chariaâ. Heureusement que le groupe démocrate a su réagir à temps pour débarrasser le pays des menaces ayant pesé sur le caractère civique de l'Etat. Sous son règne, le parti C.P.R a refusé de participer au dialogue national. Sous son règne... aucune réalisation politique concrète n'a été réalisée, l'économie est en perpétuelle dégringolade, la corruption est en hausse et la répression des manifestations est toujours présente (9 Avril, ‘'Rach'' à Siliana...). En bref, sous son règne, les libertés étaient mises à mal. Les militants d'Ennahdha: la nostalgie du temps passé Ayant côtoyé les plus vieilles démocraties dans le monde (les USA, l'Allemagne, la France, la Grande Bretagne, la Belgique..) les dirigeants ‘'nahdhaouis'' semblent étrangement peu influencés par le système démocrate occidental. La preuve, ces mêmes dirigeants ont voulu instaurer un Califat(le sixième Califat clamé par Hamadi Jebali lors du meeting qui a suivi la victoire de la Nahdha à Sousse).Quant au leader du parti islamiste, il n'hésitait pas à défendre les extrémistes allant jusqu'à les considérer comme :''ses enfants''. Quelques mois après ces déclarations, le mont Châambi s'est embrasé et le terrorisme y a campé. Signalons, également, les multiples dénigrements du modernisme, de la laïcité et l'émancipation féminine au sein de l'Assemblée Nationale Constituante(ANC) par le groupe islamiste qui s'attaque à tout élan progressiste. Rappelons, enfin, le retour des ‘'medersas'', les écoles coraniques et les crèches salafistes ; un islam radicalisé contre une démocratie naissante ! De ce fait, Le processus démocratique tunisien a failli ne pas voir le jour. Heureusement que le scrutin final s'est déroulé dans de bonnes conditions ! En guise de conclusion, la démocratie qui nous sied le mieux doit être authentique et issue de chez nous, de nos politiques formés sous nos cieux et sur notre sol, aux côtés des citoyens, enracinés dans leurs réalités sociales et économiques mais en même temps ouverts sur le progrès et l'apport bénéfique des autres civilisations. L'Occident ne nous veut pas toujours que du bien. Certains dirigeants sont nostalgiques des périodes coloniales ténébreuses et à jamais révolues.