Ce qui se passe en Libye était prévisible. Seuls les Occidentaux et les moins avertis caressaient l'espoir d'une possible réconciliation des fractions libyennes et d'un processus proche du nôtre, avec l'institutionnalisation du dialogue politique social et tribal-régional. Tout le monde a laissé faire, avec la bénédiction du Qatar et de la Turquie qui font « autorisé » pour ne pas dire encouragé un tête de ont du jihadisme international le plus dur vers la Syrie, l'Iraq et d'autres foyers en cours et à venir. La Révolution du 17 février 2011 qui a permis le démantèlement d'un régime autoritaire personnalisé, autour de Mouâmmer El Kadhafi, a été totalement détournée de son lit et de ses objectifs, comme cela a été le cas en Tunisie, pour enfanter une milicisation de la société et de l'Etat en Libye. On y compte aujourd'hui, plus de trois armées, celle régulière très affaiblie depuis l'ancien régime, celle du général à la retraite « Haftar » et celle de « Fajr Libya » sans compter d'autres groupuscules autour de Ansar Achariaâ et maintenant « Daëch ». L'ONU, les chancelleries occidentales et la communauté internationale ont observé, impuissantes, l'établissement, ça fait plus de deux, d'un « Emirat » islamique à Derna, à l'Est et Misrata au centre-Est, avec des camps d'entraînement supervisés par Ansar Achariaâ et d'autres jihadistes durs, qui sont venus, de toutes parts, pour se rallier et consolider le nouvel Etat islamique. Jour après jour et devant l'indifférence généralisée, ces groupes ont pris du volume et ont conquis Tripoli, la capitale et toute la Tripolitaine Ouest jusqu'à nos frontières Sud. Aujourd'hui, ils sont certainement la première puissance de frappe armée en Libye, car l'armée régulière appuyée par le général Haftar n'a pas repris un pouce de Tripoli ni de l'Est, y compris Benghazi qui demeure très fragile et pénétrable par les assauts des groupes jihadistes, aguerris. La Libye est un véritable cadeau du ciel (et de MM. Sarkozy et Bernard Henry Levy) pour le nouvel Etat islamique, plus que l'Irak et la Syrie, car dans ce pays il n'y a tout simplement plus d'Etat fonctionnel. Par conséquent, le jihadisme lié à Al Qaïda et à Daëch a pris trois bonnes longueurs d'avance sur les plans naïfs et « surréalistes » de l'envoyé spécial des Nations Unies pour permettre une sortie pacifique de crise laquelle passe par une démilitarisation des milices, ce que Daëch n'acceptera jamais. Entretemps, l'Egypte perd patience après la décapitation de 21 de ses citoyens chrétiens (coptes) et semble décidée à franchir le rubican de l'escalade contre cet « Etat islamique » à ses frontières. Y aura-t-il accélération, côté occidentaux ! L'Italie est bien partante, mais qui vivra verra ! La Tunisie qui n'a pas beaucoup de choix parce que nous n'avons ni l'armée de trois millions d'hommes de l'Egypte , ni les mêmes intérêts stratégiques et géographiques que le pays des Pharaons se doit d'être attentive et vigilante sans intervenir dans les sables mouvants d'un magma prévisible. D'ailleurs, avec plus de frappes égyptiennes, Daëch sera obligé de se replier à l'Ouest donc, autour de Tripoli contrôlée par « Fajr Libya », ce qui le rapprochera davantage de nos frontières et alors, bonjour... les dégâts « collatéraux » ! Notre pays ne peut résister à ce sérieux cataclysme qui s'annonce, que par un front intérieur uni et solidaire. A mon humble avis, toute la mobilisation sociale excessive, toutes ces grèves cycliques à la chaine et toutes les perturbations régionales doivent cesser et se faire traiter par le dialogue dans le cadre d'un nouveau contrat social-citoyen entre l'UGTT, l'UTICA et le gouvernement. Plus une minute à perdre ! La Libye nous interpelle, et toute dérive interne aura des conséquences graves sur la sécurité nationale. Oui... soyons unis et solidaires plus que jamais. Une guerre à la syrienne se prépare à quelques kilomètres de nos frontières sud ! Et j'espère me tromper ! K.G