La «Dakhla» du Bac sport est une ancienne tradition où les bacheliers célèbrent l'épreuve sportive avec différentes festivités dont, entre autres, l'affichage de différentes banderoles au sein de leurs lycées. Généralement, ces banderoles représentent les équipes sportives locales, les slogans d'Ernesto Che Guevara ou encore les couleurs de la ville et du pays. Cette année, nous avons été surpris par un nouveau type d'affichage : le fascisme. Une banderole représentant les combattants de l'Etat Islamique (Daech) et une autre d'Adolphe Hitler en train de faire le salut nazi devant le drapeau allemand ont été fièrement dressées dans différents lycées du gouvernorat de Jendouba. Les photos ont été publiées par les internautes qui n'ont pas manqué d'exprimer l'état de choc qu'ont provoqué ces images. Réagissant à cet incident, la présidence du gouvernement a publié un communiqué dans lequel elle a condamné sévèrement le contenu desdites banderoles en insistant sur la gravité de l'acte qui survient dans un cadre sensible où la Tunisie s'apprête à réunir tous les éléments afin de réussir la nouvelle saison touristique et la nouvelle saison du pèlerinage de la Ghriba. La présidence du gouvernement a estimé qu'il est impératif de faire face à ce genre de comportement. De son côté, le ministre de l'Education nationale, Néji Jalloul, s'est efforcé de limiter les dégâts de cette affaire en déclarant qu'elle a été amplifiée et exagérée. Néji Jalloul a confié qu'il opterait pour la solution de l'encadrement et du suivi plutôt que d'aller sur la voie de la censure et de la punition. Cependant, le proviseur et quatre élèves du lycée du Kairouan – l'un des lycées ayant connu l'affichage d'une banderole représentant les combattants de Daech – ont été convoqués devant le procureur de la République auprès du Tribunal de première instance de Kairouan. Ces individus ont été relâchés après avoir répondu au questionnaire de la brigade criminelle d'El Gorjani. En ce qui concerne les élèves d'un des lycées du gouvernorat de Kébili, le conseil de discipline les a convoqués, toujours à cause de la Dakhla du Bac sport. Sauf que pour ces jeunes-là, le motif n'était pas le fascisme mais ce que le Conseil a considéré comme une attaque contre les professeurs. En effet, les élèves ont affiché une banderole à travers laquelle ils ont blâmé les enseignants pour la grève qu'ils ont observée lors du deuxième semestre tout en les accusant de marchander au lieu d'assurer leur profession pourtant si noble. Des incidents qui viennent perturber l'ambiance joviale du Bac sport que les bacheliers attendent toute l'année. Mais la question est encore plus compliquée que cela. Il ne s'agit pas là que d'une simple manière d'expression. Le fascisme et l'extrémisme religieux, dans le cadre actuel que nous vivons, ne peuvent être traités avec légèreté et la méthode policière risque de ne pas être suffisante. Nous sommes confrontés à une dure réalité : l'extrémisme attire et passionne nos jeunes, ceux-là mêmes qui choisissent le djihad comme mode de vie. Cela nous renvoie à un dialogue qui s'est déroulé il y a quelques années entre Abdelfattah Mourou et le prédicateur égyptien wahabite Wajdi Ghounim, lors de sa visite en Tunisie. Un dialogue filmé discrètement au cours duquel on entend l'actuel vice-président de l'Assemblée des représentants du peuple dire au Cheikh wahabite « ne vous inquiétez pas, ce qui nous intéresse c'est leurs enfants, c'est avec eux qu'on instaurera ce que l'on veut instaurer ». Si on lie cela avec de jardins d'enfants coraniques on peut, malheureusement, s'attendre au pire d'ici quelques années...