Dans le viseur des autorités depuis l'attaque de Sousse, le parti islamiste « Hizb Ettahrir » a organisé, hier, une conférence de presse. Alors qu'elle devait initialement se dérouler à l'hôtel « Africa », les dirigeants du parti ont été informés, le matin même, par la direction de l'établissement qu'en raison d'une panne technique, le point presse ne pouvait se tenir dans le dit hôtel. Selon Ridha Belhaj, porte-parole de « Hizb Ettahrir », la raison évoquée n'était qu'une façon diplomatique de signifier que le parti et ses partisans étaient persona non grata au sein de l'hôtel, situé au cœur de la capitale, dont la direction aurait, toujours selon lui, subi des pressions. Attroupés devant l'« Africa », ils ont également été empêchés par les forces de l'ordre d'accéder à l'intérieur de l'hôtel et la conférence de presse a finalement s'est déroulée au local du parti, situé à Bab El Khadhra. Dans son allocution, Ridha Belhaj a considéré que l'attentat de Sousse était une catastrophe et un scandale international, dus à plusieurs défaillances. Il a par ailleurs annoncé qu'un procès sera bientôt intenté contre la personne de Béji Caïed Essebsi pour diffamation et incitation à la haine et ce parce que dans ses déclarations, le Président de la République avait laissé sous-entendre que le parti islamiste était fondamentalement lié au terrorisme sans pour autant apporter des preuves concrètes sur ses accusations à peine voilées. Le porte-parole de « Hizb Ettahrir » a également pointé du doigt l'incompétence du chef de l'Etat qui n'a pas su, selon lui, établir une politique étrangère et sécuritaire efficientes. Il l'a ainsi invité à se focaliser exclusivement sur sa mission à la tête des ministères de la Défense et des Affaires étrangères et à ne plus s'occuper des partis politiques, un dossier qui ne fait pas partie de ses prérogatives, toujours selon lui. Revenant sur la décision d'interdire la levée de tout autre drapeau que celui de la Tunisie, Belhaj a déclaré que l'étendard noir faisait partie intégrante de l'identité de « Hizb Ettahrir » et qu'il était même inscrit dans l'agrément qui lui a été délivré, arguant que tous les organismes et les partis politiques avaient leurs propres drapeaux. Depuis l'attaque meurtrière de Sousse, une menace de dissolution plane sur le parti « Hizb Ettahrir ». Lors de son allocution tardive, tenue vendredi dernier pour annoncer une dizaine de mesures d'urgence, le Chef du Gouvernement avait déclaré que des mesures seraient prises contre tous les partis et associations ne respectant pas les principes de la constitution avant d'ajouter qu'un dossier répertoriant les dépassements et infractions du parti « Hizb Ettahrir » avait été constitué et que la loi sera appliquée à son encontre. Créé dans les années 80 en Tunisie, ce parti est la branche tunisienne du mouvement Hizb Ettahrir, fondé par Taqiuddin al-Nabhani à Amman. Peu après la révolution, le parti a déposé un premier dossier d'autorisation en mars 2011, essuyant un refus pour non conformité à la loi du 3 mai 1988 relative aux partis politiques. Ce n'est que le 17 juillet 2012, à l'ère de la Troïka, que le parti, prônant le retour du califat et ne reconnaissant pas la constitution tunisienne, obtient son visa. Le parti islamiste est aujourd'hui menacé de dissolution. Pourtant, il y a moins de deux semaines, les autorités ne semblaient rien lui reprocher et lui ont même accordé une permission pour tenir son 4ème congrès à Tunis, plus précisément à la Coupole d'El Menzeh, sous le thème «L'Afrique du Nord, noyau d'un grand Etat». Au programme de ce meeting, largement médiatisé: chants liturgiques, étendards noirs, non mixité et présence massive des partisans. A aucun moment de ce congrès, la Tunisie n'a été évoquée comme étant un état démocratique et le drapeau tunisien levé. Qu'importent les dangers qui planent sur la Tunisie et l'urgence d'instaurer une unité nationale entre toutes les composantes politiques du pays ! Pour « Hizb Ettahrir », seul le califat compte et ses dirigeants ont, à maintes fois, promis qu'ils useront de tous les moyens pour y arriver.