Elle est belle, indomptable, intrépide et farouche. Elle est surtout artiste et comédienne hors-pair. Elle, c'est Leïla Toubel, un charisme et une prestation scénique à saluer. A la basilique «Saint Cyprien» de Carthage, elle ajoué, le lundi 27 juillet 2015, en plein air son mélodrame «Solwen», un texte qu'elle a elle-même écrit et une production de Resist'Art. Un projet vieux de 15 ans mais tellement fidèle à notre actualité. Un texte ébranlé, transporté et chamboulé par les méandres et les marasmes de l'époque postrévolutionnaire. Son spectacle s'inscrit dans le cadre de «Carthage extra-muros», une première au Festival International de Carthage où diverses prestations artistiques sont programmées en dehors de l'amphithéâtre. Le comité organisateur invite les spectateurs à une série de balades nocturnes où se mêlent art et Histoire dans des sites méconnus du grand public. Le coup d'envoi a été donné, donc avant-hier à la Basilique Saint-Cyprien, un monument édifié au IVème siècle. Si à quelques jours de son spectacle, l'artiste engagée, Leïla Toubel s'était déclarée désappointée par la programmation de sa représentation théâtrale hors des enceintes de Carthage, lundi soir, elle a vivement remercié les organisateurs. En effet, à J-2, les lieux n'étaient pas fins prêts à accueillir la pièce et le public. En 48h, tout a été installé. La somptueuse basilique pouvait enfin enlacer l'art et le grand public. Qu'il s'agisse de logistique, installation de la scène, qualité du matériel de sonorisation, de sanitaires, d'électricité et même de transport (les spectateurs étaient transférés par bus de l'amphithéâtre de Carthage à la basilique «Saint Cyprien»), les organisateurs ont pensé à tout ! A cette occasion, l'artiste a tenu à les féliciter à la fin de son spectacle : «Nous sommes le peuple des miracles !» Le cri de la patrie Elle surgit de nulle part, fantôme drapé de blanc. Le pas trébuchant, peureuse et déboussolée, ignorant son identité, elle avance sur scène traînant un coffre, un lourd fardeau... Au fur et à mesure qu'elle avance, son costume tout blanc immaculé, était en réalité une robe de mariée. Qui est-elle ? Que fait-elle ? Nul ne le sait. Elle-même, ignore tout. Amnésique, la mémoire clouée, bâillonnée, elle sondait son cœur, se taraudait l'esprit, se cherchait dans les poussières du passé et la précarité de son présent. Quand elle parla, ses phrases étaient saccadées, ses paroles saccagées et sa voix désarçonnée. Elle nous conta des scènes déconcertantes. Quelques bribes d'un vécu à la fois sombre et joyeux. Elle força les portes du passé. Cette boîte de Pandore, qu'elle a ouverte dans sa quête d'identité, cracha son venin sur le présent. Jaillirent de ce coffre un déferlement assourdissant, oscillant entre maux et espoir, accablement et enthousiasme. Elle parla de ce printemps pillé, de ce printemps ravagé par l'automne, de cette rose qui prit du temps naître pour éclore, cette rose fébrile qui, à peine, née, flétrie à coups de sabres. Elle évoqua ces décadences qui prennent le dessus sur la gloire humaine, ces vains espoirs qui luttent pour demeurer, cette rage féroce pour s'affranchir de tous les maux et renaître à la vie. L'histoire de Solwen c'est l'histoire de la Tunisie. Elle est celle du citoyen lambda. Un haut-le-cœur, un cri assourdissant qui surgit au beau milieu de la nuit, déchire le calme trop plat d'une soirée d'été. La basilique en est secouée ! Drapée de rouge et de blanc, Leïla Toubel était tout simplement somptueuse. Couleur de la passion, du sang, de la paix, de la patrie, elle fut applaudie pendant un long moment, aux termes de son spectacle. Elle incarna la Tunisie, la femme, l'artiste et la combattante intrépide de l'art. Après le spectacle, la comédienne organisa une séance de dédicace où elle eut la joie de recueillir les félicitations des spectateurs.