La manœuvre bat son plein et à tous les niveaux et si les Tunisiens étaient aussi doués pour l'économie que pour la politique, il y a longtemps qu'on aurait été devant la Corée du Sud ou Singapour ! On fait de partout la chose et son contraire, nous sommes passés tous ou presque maîtres du double, voire du triple langage ! Ou alors qu'est-ce qui pousse des partis antinomiques et à des distances idéologiques en termes d'années lumières, sur le social, l'économique, le modèle culturel et identitaire à « faire semblant » et à se positionner ensemble pour cautionner des démarches peu convaincantes et non productives ! Les exemples abondent et il n'est plus surprenant de voir un M. Tarak Kahlaoui « main dans la main... yeux dans les yeux » comme le suggère la célèbre chanson d'amour, avec M.Mongi Rahoui. Le CPR de la « discorde », des rebellions fabriquées au Sud à la recherche du pétrole des mirages désertiques (Finou El Pétrole), va-t-il sceller la « sainte alliance » avec le Front Populaire, plutôt réservé sur la question, mais comme happé par l'hameçon de la justice transitionnelle et la volonté commune de faire capoter le projet présidentiel de M. Caïd Essebsi, sur la conciliation nationale. Mais, tout cela peut être à la limite compréhensible. « L'ennemi de mon ennemi... est mon ami », dirait le proverbe et l'opposition des « extrêmes » peut trouver jonction naturelle contre le pouvoir et ses composantes toutes aussi différenciées que celle de l'opposition. A ce propos, j'écoutais hier matin, à l'émission matinale de notre ami et bien talentueux Hatem Ben Amara de la Radio Nationale, Mme Mehrezia Laâbidi, son invitée de marque, députée à l'ARP, ancienne vice-présidente (ou présidente bis) de l'Assemblée nationale constituante et membre influent du Parti islamiste Ennahdha, nous dire son bonheur de donner le nom de la grande militante féministe Radhia Haddad à une des chambres de l'ARP, celle justement qui a vu l'adoption de la première Constitution tunisienne, le 1er Juin 1959. Jusque là, tout baigne, sauf que Mme Laâbidi explique cette reconnaissance posthume à Mme Radhia Haddad pour s'être opposée à Bourguiba après le Congrès de Monastir « 1 », en 1971, puisqu'elle a fait partie du groupe libéral qui voulait démocratiser le RCD sous la houlette de M.Ahmed Mestiri, ancien ministre de l'Intérieur de Bourguiba. Radhia Haddad devait subir, d'ailleurs, bien des tracasseries pour son acte de résistance démocratique, la levée de son immunité parlementaire, sa condamnation en justice, en première instance, sans application de la peine puisque l'Appel puis la Cassation n'ont pas suivi le premier jugement, etc... D'ailleurs, il faut lire absolument ses mémoires pathétiques et d'une insolente actualité ! Mais, Mme Mahrezia Laâbidi n'aura retenu de Radhia Haddad, première présidente de l' UNFT, première femme députée de l'indépendance en 1964 sur une liste du Néo-Destour, devenu RCD, Radhia Haddad une des plus grandes militantes de la lutte pour la libération nationale avec Bchira Ben Mrad, Wassila Bourguiba-Ben Ammar, Chedlia Bouzgarrou et beaucoup d'autres femmes tunisiennes émérites, que sa discorde avec Bourguiba ! Décidément, les Nahdhaouis, hommes et femmes, portent bien, je dirai un peu trop Bourguiba dans leurs cœurs, même si c'est bien lui et personne d'autre au niveau de l'audace et de la conviction, qui a libéré la femme tunisienne de l'esclavagisme du Moyen-âge, en imposant (je dis bien imposant), le Code du Statut Personnel, ce fameux 13 Août 1956, soit à peine cinq (seuls) mois, après la proclamation de l'indépendance. Mon ami, Hatem Ben Amara, d'ailleurs, malin et subtil, le lui a fait remarquer mais à mon humble avis, il n'est pas allé jusqu'au bout pour poser à Mme Mehrezia Laâbidi la vraie question : Mme Radhia Haddad, grande militante d'une très haute pointure, femme de caractère et de tempérament, aurait-elle pu faire le Code du Statut personnel sans la volonté farouche et décisive de Bourguiba ! Et c'est bien cela qu'on la traité de tous les noms déjà l'époque par l'obscurantisme médiéval d'inspiration orientale ! Rendre à César ce qui est à César et rendre à Didon ce qui est à Didon c'est ce qui s'appelle faire œuvre de vérité historique. Mais, Bourguiba n'est pas à sa première « ingratitude ». Il en a vu d'autres et tous les obscurantistes de la terre ne pourront effacer son œuvre immuable de libérateur-combattant contre le colonialisme, de libérateur et protecteur de la femme tunisienne et de l'enfance déshéritée et démunie et enfin, de bâtisseur de l'Etat national moderne avec une grande probité et un amour infini pour la Patrie ! Alors, quand on parle de « consensus » (Tawafouk) avec les Nahdhaouis... ça veut dire quoi !... qu'on doit, peut-être, dire que la Tunisie doit jeter à la mer tout l'héritage culturel bourguibien et que tout est bien dans le meilleur des mondes si on renvoie Bourguiba aux oubliettes de l'Histoire ! Mais, alors, que faire de Hannibal qui a perdu sa guerre punique contre Scipion, de Kheïreddine Pacha qui s'est exilé à Constantinople, après avoir vendu le Henchir d'Enfidha (domaine national) qu'il a eu comme présent du Bey) à une société de colonisation française, la « Marseillaise du Crédit » ! Que dire de tous ces « leaders » qui rêvent de faire de la Tunisie une province « califale » du Moyen-âge soumise à l'Orient des pétrodollars et de la décadence ! Que dire, sinon que l'Histoire est tranchante et sans compromis politique ni d'allégeance aux partis ! Bourguiba, libérateur de la femme contre vents et marées du conservatisme rétrograde, personne ne peut l'effacer car les textes sont là, les écrits sont là, les débats parlementaires sont là et les voix de l'obscurantisme qui ont décrié Bourguiba à l'époque, sont là, répertoriées et sans équivoque ! Alors : « Ya Jebal Ma Hezzik Rih » ! Sans Bourguiba, sans Taïeb M'hiri, Mongi Slim et sans Radhia Haddad et ses camarades de l'UNFT, la Tunisie serait, aujourd'hui, soumise à nouveau à l'obscurantisme du Moyen-âge ! On a été sauvé par le gong ! Revoyez vos statistiques. Plus d'un million de femmes ont voté Béji Caïd Essebsi aux dernières élections présidentielles ! Tiens, est-ce par hasard ! B.C.E était bel et bien le fils spirituel de Bourguiba ! Elles, les femmes libérées, « Hraïr Tounès » ne l'ont pas oublié ! K.G