Dream city est ce festival par excellence qui a commencé à être opérationnel avant le soulèvement de 2011. Il a été créé en 2007 par l'association ART-RUE et par les Ouissi Selma et Sofiène , deux chorégraphes qui ont réussi à maintenir ce festival malgré toutes les difficultés de la tâche. La cinquième édition de ce festival biennal sera organisée du 4 au 8 novembre 2015. Cette session est fortement soutenue par le ministère de la Culture du gouvernement actuel ... et c'est tant mieux! L'espace d'intervention de Dream City est celui de la Medina et quelquefois dans ses faubourgs. La Medina de Tunis et celle de Sfax depuis 2012. La session d'aujourd'hui se limite de nouveau à une intervention sur l'espace de la Medina de Tunis uniquement. La préoccupation de Dream City semble être de savoir comment identifier le patrimoine, le sauvegarder et reconvertir nos Medina par la culture et l'art, avant qu'elles ne disparaissent sous le poids de l'âge, de la dégradation, de la pollution et de la mauvaise gestion ! La discussion du projet était vive, elle l'est encore. Mais Dream City a osé dynamiser et améliorer ses interventions. Ses termes de référence, en outre, changent ou ont changé surtout après le soulèvement de 2011. Le ton du discours, la qualité des termes de références deviennent plus incisifs surtout dans l'édito introductif du Catalogue 2012 intitulé "l'artiste face aux libertés"26-30septembre2012. Ce texte introductif opère un glissement d'axe dans ses termes de références .La manifestation Dream City se place en pleine bourrasque du soulèvement populaire et s'en ressent. Cette attitude n'est plus discrète, n'est plus élitiste, elle est dorénavant clairement explicitée et assumée. Avant cet engagement auquel je rends personnellement hommage en faveur du soulèvement populaire, Dream City se rangeait avant du côté " agitation" culturelle, moderniste certes, provocatrice quelquefois mais qui est restée raisonnablement sage, voire étrangère à nos débats, à nos préoccupations. Avant 2012, nous trouvions, quelques amis et moi, que Dream City fournissait un effort mais qu'il défendait des positions européocentristes où tout au moins néo orientaliste par rapport à notre patrimoine urbain et architectural malmené par le temps, mais néanmoins encore vivant. Trop simplement, nous pensions que notre patrimoine même gravement menacé n'avait pas seulement besoin d'une belle chorégraphie ou d'une performance d'arts plastiques pour être sauvé mais surtout d'un travail de restauration, de réhabilitation qui le sauvegarderait et en même temps le reconvertirait. L'Edito de 2012 et sa transparence, notre fréquentation des manifestations de Dream City à Tunis, l'organisation idéale (un peu trop), la qualité des manifestations, l'adhésion de Dream City à la démarche progressiste ont fait que Dream city s'est "tunisifié". L'Edito en question, écrit au moment où les artistes tunisiens ont été menacés de mort (en plus des actes barbares de destructions des œuvres d'art à El Abdelliya et des tentatives de poursuites judiciaires contre les artistes Mohammed Ben Slama et Nadia Jelassi )ont posé le problème de l'art en Tunisie non plus en termes seulement de patrimoine, d'animation et de réinsertion du patrimoine dans le présent mais il est devenu d'essence plutôt politique et surtout de nature tournant autour de la liberté, Dream City a compris cela et est alors intervenu en 2012 pour poser la véritable questiondes artistes face aux libertés ...par le récit de l'imaginaire.Lafracture dans l'art...dans la culture ...dans la vie n'est pas entre tradition, modernisme ou "contemporanisme" mais elle est d'avec la "dictature" politique ou religieuse qui se profilait à l'horizon et pour la liberté de création et d'expressions. Dream City s'exprime plus clairement et avance ...à la proximité du territoire de l'art pour tous et propose d'enterrer les conflits artistiques entre tendances... ou styles ou démarches...Dream City abandonne ses positions élitistes, avant-gardistes pour adopter le pluralisme dans la création et dans la réalisation artistique et se prononce pour une coexistence démocratique entre adversaires créateurs :ne s'agit-il pas d'une nouvelle urgence que de défendre ensemble la liberté de tous ! La force de Dream city a été de dépasser des positions sectaires d'exclusion et d'assurer une avancée démocratique sur son propreterritoire. Dream City associe toutes les formes d'expression artistiques à son festival. Son territoire n'est plus réduit à la Médina orientaliste de Tunis ou à ses faubourgs mais il s'étend à Sfax... le territoire du rêve... s'élargit ! Il pourra englober tous les territoires libérés du despotisme et de l'obscurantisme. Dream City aiguise ses concepts, améliore sa vision et développe ses acquis et ses compétences. Ces Glissements constatés dans les termes de référence ou dans "l'édito " de Dream City ont été certainement confirmés et illustrés par la richesse des manifestations et des spectacles. Les publics nombreux, mélangés, mixtes, nationaux et internationaux cherchent les lieux, les spectacles de rencontre et identifient l'espace réel de la médina... les espaces de sa ville.. ses problèmes ... La fête peut alors commencer! Et ce fut fait. Sans aller jusqu'à imposer la généralisation de la démarche de Dream City, nous sommes persuadés qu'une extension raisonnable aux villes déshéritées de Gafsa, de Kairouan de Tozeur ... donneront à Dream City plus d'acuité et légitimeront localement, nationalement, culturellement et universellement son approche si significative:Le territoire s'agrandirait et le rêve également!... La cinquième édition : Projection Dream City gagne des galons, trouve des financements, acquiert un siège officiel et un local prestigieux en la demeure de Bach-Hamba en pleine Medina. Selma et Sofiène Ouissi, les fondateurs de Dream city continuent à assumer la direction de Dream City et présentèrent il y a quelques jours leur démarche, leur programme pour cette édition. Dream City se présente toujours comme une plateforme d'art contemporain dans l'espace public...traditionnel en l'occurrence dans l'espace d'un quartier très ancien de Tunis afin d'en connaitre la texture et d'en démêler le tissu urbain. Le dialogue qu'entraineront les artistes avec la Médina proviennent de la région MENA, d'Afrique et d'Europe. Ce dialogue devra ouvrir quelque peu les arcanes de la vielle Médina de Tunis. Les artistes impliqués dans cette édition vont certainement réussir à se familiariser avec la Médina et seront à même de connaitre l'intimité de ses espaces pour rendre "visibles et lisibles" les réalités aussi bien agréables que celles désolantes. Les moyens pour opérer une telle approche sont ceux de l'art contemporain dans ses aspects virtuels ou éphémères ! Le but à atteindre devrait permettre la sauvegarde et la revalorisation durables du patrimoine. Tous les genres artistiques vont être sollicités pendant cette cinquième session. Du théâtre, au Cinéma, à la peinture , à la photographie en passant par la dance, la musique pour aboutir aux installations et performances seront inscrits dans le programme. Les artistes qui vont déployer leurs talents sont aussi bien tunisiens qu'arabes, africains ou Européens. Au niveau tunisien, les artistes qui interviendront seront Faten Gaddes, Wassim Ghozlani, Malek Gnaoui, Sonia Kalleln Hichem Ben Ammar, Souad Ben Slimane ... Les termes de référence qui fondent et prêtent sa cohérence à l'action de Dream Coty sont de la même consistance que les précédents. L'engagement de 2012, (quatrième session) pris par l'équipe de D.C pour défendre les libertés de créations et d'expressions est aujourd'hui relayé par un autre engagement tout aussi significatif et important, qui consiste à créer un lien solide entre l'art et le social, entre l'art et la vie. L'art devrait en principe pénétrer le social et ne plus être une manifestation marginale élitiste, montré seulement dans les espaces intramuros des galeries de Sidi Bou Saïd et de La Marsa. L'art se déploiera dans l'espace public non seulement traditionnel de nos Médinas mais également de nos villes modernes. Le thème proposé par D.C pour cette édition traversera toutes les pratiques de la création pour signifier et matérialiser les rapports les plus intenses entre l'art et l'humain dans nos villes si truculentes et vivantes malgré les blessures du temps et du poids de l'histoire. Dream City quitte ainsi définitivement les positions artificielles pour s'impliquer et s'ancrer davantage dans le réel social et national peut être pour atteindre enfin l'universel.