Secrétaire général du Parti du Travail Patriotique et Démocratique, une des dérivées de la ligne patriote démocratique qui s'est totalement démarquée de la pensée et de l'action d'El Amel Ettounsi, actuel parti des Travailleurs descendant du POCT, Abderrazak Hammami, connu pour sa grande modération et sa prédisposition à pousser le plus loin possible... les lignes jusqu'à s'allier... à tous ceux qui œuvreraient pour la sortie de crise de la Tunisie. Un des premiers à épouser la ligne de Si El Béji, lors de la création de la défunte Union pour la Tunisie, il ira jusqu'au bout de ses idées. Ses camarades de jeunesse peuvent ne pas partager sa ligne politique à l'ouverture extrême, lui ne cesse de répéter qu'il ne tient qu'à l'unification des patriotes démocratiques, sans la moindre ambition personnelle. Il s'exprime, ici, sur le budget et les questions actuelles. Détails. Le Temps : Quelle appréciation faites-vous de la situation politique actuelle ? Abderrazak Hammami : Nous sommes en guerre contre le terrorisme, ce qui nécessite une mobilisation nationale afin de la gagner. Toutes les forces politiques opposées au terrorisme doivent se mobiliser pour participer à cette guerre. Bien entendu, il ne s'agit là que des forces politiques qui croient à l'Etat national et civil, au régime républicain et aux revendications populaires légitimes portées par les jeunes tunisiens aspirant à la concrétisation de la liberté, la démocratie et la justice sociale. Toutefois, c'est avec amertume, nous sommes très loin de la réalisation effective. Nous vivons encore des tiraillements, une segmentation forte des forces en place avec des luttes intestines entre les différentes composantes du camp des Patriotes démocrates. L'instabilité règne au sein du paysage politique ainsi que la situation dans le pays et le manque de visibilité. Un large consensus national est à l'ordre du jour avec, pour objectif, la réussite dans la guerre contre le terrorisme. Le gouvernement actuel, seul, peut-il réussir ? Non ! Un gouvernement ne disposant que d'une représentativité bien réduite, ne peut vaincre le terrorisme, quelles que soient ses bonnes intentions. Nous sommes dans une étape cruciale et déterminante. Elle nécessite la présence de très forts outils de gouvernance pour sauver le pays épaulé par un grand consensus national autour des objectifs et des politiques ainsi que des formules d'exécution adéquates. Vous avez été un allié de Nidaa Tounès, quel commentaire faites-vous sur ce qui se passe, aujourd'hui, à l'intérieur de ce parti ? Nous ne permettons pas d'intervenir dans les affaires internes des autres partis. Nous considérons que ce qui se passe au sein de ce parti est une affaire intérieure. Nous nous contentons juste d'encourager les efforts orientés vers la recherche de solution consensuelle qui sauvegarde l'unité du parti, car il s'agit là d'une donnée fondamentale dans l'équilibre et la stabilité politique de la Tunisie. Cette stabilité est nécessitée par la nature de l'étape actuelle du pays, dans sa guerre totale contre le terrorisme et contre ceux qui le soutiennent, d'un côté, et toutes les formes de sous-développement et d'injustice sociale et politique, de l'autre côté. Ce qui se passe au sein de ce premier parti du pays, aura-t-il des incidences sur la carte politique du pays ? Certainement ! Si les Nidaïstes continuent à s'entretuer, ce parti cessera d'être le premier... Il dégringolera vers un rang que nous ne connaissons pas. Une nouvelle situation naîtra où une réelle compétition aura lieu pour remplir le vide laissé par Nidaa Tounès... Nous ne voulons pas voir une situation pleine de perturbation et d'anarchie dans la vie politique... Il est, de loin, préférable d'opérer au sein d'un espace politique composé de grands pôles stables qui ont des objectifs patriotiques, démocratiques, civils clairs... Car, c'est sur la base de ce genre de grands pôles que des relations politiques peuvent être fondées de manière constructive... Si les choses évoluent dans un autre sens, on en parlera. Nous sommes aux portes d'une nouvelle année administrative, pour laquelle l'équipe gouvernementale a présenté à l'ARP, un projet de budget - le 1er pour Essid -, que pensez-vous des grands choix du budget 2016 ? C'est un budget qui reproduit l'ancien modèle de développement qui a une très faible capacité de réaliser les revendications du développement... C'est un budget qui manque de véritable avancée vers une authentique et effective réforme fiscale, lutte décisive contre l'évasion fiscale... Malheureusement, ce budget continue à compter de façon exagérée sur l'endettement... Il faut avouer que ce budget hérite d'une situation déjà détériorée... En première conclusion, nous n'y trouvons aucun changement profondément positif. Le budget d'équipement est resté le même depuis 4 ans de l'ordre de 5,2 milliards de dinars, soit seulement 18,5% du budget global avec uniquement un taux de réalisation inférieur à 50%. Le chômage avec 15,3% est à son plus haut niveau durant les deux dernières années... Les chiffres sont nombreux, à prouver que la crise est très grave. Le déficit budgétaire dépasse 50% tout en suivant une courbe ascendante. L'amateurisme et les hésitations sont perceptibles. La détérioration de la situation économique et sociale ne fait que s'accélérer, en dehors de solutions définitives et tranchantes. Si vous étiez à la place d'Essid, qu'aurez-vous fait de différent ?... Et concrètement, M. le secrétaire général et non des généralités. Nous aurions changé le système de récupération des ressources budgétaires, renforcer les ressources budgétaires, légiférer afin de lutter contre l'évasion fiscale, la corruption liée à l'évasion et à la contrebande... Le budget perd en moyenne 10 mille milliards de dinars annuellement à cause de l'évasion fiscale et la corruption... D'un régime forfaitaire on passera rapidement au régime né, sans injustice et sans tergiversation dans la protection des droits de la communauté nationale. Nous aurions combattu le chômage et la pauvreté en généralisant les services de santé, d'enseignement et de logement en augmentant les ressources de l'Etat, à travers la création de richesses nationales et la gestion saine de la collecte des impôts... Nous irons vers le rééchelonnement des dettes des familles pauvres et moyennes en leur épongeant les intérêts de retard de leurs crédits impayés. Enfin, beaucoup de choses peuvent se faire dans un esprit constructif, visant le développement et non seulement la croissance au profit de l'Etat et des couches laborieuses sans léser les investisseurs. Que doit faire la Gauche en vue des élections municipales ? La Gauche a devant elle une occasion historique pour unir ses rangs lors des élections municipales avec des listes ouvertes aux différentes forces patriotiques progressistes et civiles au service d'objectifs non encore réalisés et auxquels le peuple est très attaché en dépit des déceptions. Si la Gauche va aux municipales, divisée, ça sera la perte finale pour le dernier carré, défendant la liberté et la démocratie directe. Ce sera un coup fatal à la représentation de la Gauche et à sa présence à l'échelle locale... Il s'agit d'une présence dont la Gauche a énormément besoin pour retrouver la confiance en son projet prometteur et réalisable. Et les Patriotes démocrates, à quand leur union ? Le chemin de l'union est pavé d'embûches... La conscience de la nécessité de l'unité est générale chez les fondateurs de la ligne patriote démocrate. C'est une unité qui a encore besoin de davantage d'effort, sinon des efforts exceptionnels, pour en élaborer le contenu, le formaliser avec des mécanismes en termes de programme et d'organisation... Aujourd'hui, de nobles et honnêtes tentatives sont là, pour réaliser cette unité. J'y crois... La volonté de dépasser tous les obstacles existe... la réalité objective impose cette unité... la pomme de l'unité a mûri. Il faut savoir la cueillir... Propos recueillis par