C'est bien connu la chance ne sourit qu'aux audacieux, mais elle n'est jamais répétitive, donc, il faut savoir la saisir au vol quand elle se présente ! Le Front populaire, dirigé par une bonne élite diversifiée, qui a milité à ses heures et chaque tendance selon ses moyens du bord, contre les régimes dits « autoritaires » des trente dernières années, vit aujourd'hui, un déficit dramatique de mutation historique et d'évolution véritable. Sa dernière conférence nationale tenue à Hammamet les 29, 30 avril et le 1er mai, sous le thème de la nécessité d'une « initiative politique pour sauver le pays ne fait que le confirmer. Le « Front » de gauche et du nationalisme arabe fait du surplace et se cramponne dans cette attitude de rejet de tout et de rien, du capitalisme mondial, du libéralisme de « l'alliance » des islamistes avec les « destouriens » surtout les ex-Rcédistes etc... et s'acharne à soutenir la contestation « populaire » ou « populiste » pour bien des partis, qui occupent la rue, les usines, les administrations publiques, dans un pays qui a fait une « Révolution » certes, pour balayer l'oligarchie du 7 novembre mais pas pour détruire l'Etat, les institutions et l'économie toute entière du pays ! Nous disons cela avec beaucoup de regrets, parce que le Front populaire aurait pu choisir une autre voie beaucoup plus porteuse et plus dynamique avec le respect hermétique des institutions qui sont la synthèse d'un consensus global de l'ensemble du pays, ainsi que de l'ensemble des composantes sociales de notre peuple et qui ont été adoptées après toutes les manœuvres dilatoires du temps de la Troïka pour instaurer une nouvelle oligarchie d'un autre âge et d'une autre époque manipulée par l'obscurantisme moyen-oriental envahissant. Le Front populaire avec « l'entêtement » actuel de certains de ses décideurs et dirigeants n'a pu obtenir que 10% des suffrages aux dernières élections de décembre 2014, et ce, grâce en grande partie, au charisme de M. Hamma Hammami qui a pratiquement connu toutes les prisons de l'ancien régime, et au leg des martyres Chokri Belaïd et Haj Mohamed El Brahmi assassinés lâchement par les terroristes. Mais depuis, il fait du surplace et n'arrive pas à emballer les sondages, où il régresse même à bien des niveaux. On peut disserter éternellement sur la « crédibilité » des sondages et les accuser de toutes les manipulations anti-populaires comme au bon vieux temps de la propagande néo-stalinienne, mais la diabolisation des sondages ne passe plus, puisqu'aux dernières élections, ils étaient très proches de la réalité et des résultats enregistrés dans la transparence presque parfaite sur le terrain. Pourtant, le Front populaire avait et a encore, un coup magistral à jouer s'il arrive à se décider à faire la « Messe » d'Henry de Navarre pour devenir Roi de France, d'où cette expression toujours magique : « Paris vaut bien une messe » ! La « Messe » de Carthage pour Hamma Hammami et ses lieutenants, encore hésitants à franchir le pas décisif comme un certain Zied Lakhdhar,le plus modéré d'entre tous, ne peut faire du Front populaire un parti de gouvernement, ou même prétendre à la magistrature suprême, que si ce mouvement réalise une mutation profonde, réfléchie et irréversible vers le « socialisme libéral et démocratique » ou la « social démocratie » telle que pratiquée, aujourd'hui, par toutes les gauches européennes et mondiales. Le nouvel Henry de Navarre, a été de fait en France François Mitterrand, qui a su fondre toutes les gauches extrêmes dont le PSU (parti socialiste unifié) de Michel Rocard, et les trotskistes ou apparentés de Leonel Jospin, dans l'ancienne « SFIO » pour lancer le grand mouvement de « l'unité de la gauche » , devenu le parti socialiste et qui a pu porter Mitterrand lui-même, puis François Hollande, à l'Elysée ! En Tunisie, nous n'avons pas encore, justement, de « François Mitterrand » ! Hamma Hammami aurait pu le devenir, au vu de son charisme personnel auprès de la jeunesse communiste « révolutionnaire », ou au moins, faire le cheminement de MM. Michel Rocard et Léonel Jospin, en France ce qui est loin d'être négligeable. Mais, il bloque quelque part et on ne sait pas trop pourquoi ! Est-il mal conseillé, manque-t-il d'audace parce que attaché à un certain dogmatisme totalement dépassé de par le monde et ce ne sont pas les Chinois, les Russes, les Polonais ou même les Cubains et les Vietnamiens qui diront le contraire... ! A-t-il peur en faisant le pas vers le centre gauche et la social démocratie libérale, de se faire traiter de « révisionniste » petit bourgeois « réactionnaire » ou même « d'allié » de la bourgeoisie nationale et du capitalisme ! C'est vrai que les Tunisiens sont des inquisiteurs en puissance. Oui, tout cela je le pense un peu, mais, par ailleurs, l'histoire nous dit que les mouvements et les leaders qui n'arrivent pas à évoluer et à s'adapter aux nouvelles réalités mondiales et nationales n'ont aucune chance de survivre. Qui se rappelle encore de Brejnev, de Jaruzelski ou même du grand Chou-en-Lai, véritable patron de la Chine maoïste, qui a pourtant compris, en fin de parcours, comme Gorbatchev, en Russie, qu'il fallait tendre la main à l'Amérique capitaliste, d'où la brillante révolution de Deng Xiaoping qui a fait de la Chine la première 2ème puissance économique du monde avec les Etats-Unis devant la grande Europe. Hamma Hammami et ses pairs sont confrontés aujourd'hui, à des choix beaucoup plus profonds et audacieux que le rafistolage de Hammamet et des séminaires pour intellectuels « engagés » et progressistes ». Tiens, il me semble que M. Rached Ghannouchi, l'ancien ennemi irréductible de Bourguiba et des vrais destouriens (bourguibiens) a tout compris ! Dans ce pays, rien ne se fera encore sans le « Bourguibisme » qui a forgé l'âme tunisienne moderniste progressiste, spécifiquement tunisienne, libérale sociale et musulmane modérée, oui, cette synthèse que j'ai toujours désigné par la synthèse « Bourguiba-Hached-Ben Achour ». C'est la seule « messe » crédible, à mon humble avis, et le seul chemin qui mènent à Carthage ! « Si » Béji Caïed Essebsi, du haut de ses 86 ans, l'a faite (pour la messe) et l'a emprunté (pour le chemin de Carthage), et a réussi un pari extraordinaire de stabiliser le pays et de le sauver de la déconfiture. Ghannouchi, de même, est en train de bien manœuvrer pour « sa » Tunisie « erdoganienne », mais il sait qu'il ne pourra jamais le faire en faisant la guerre au « Bourguibisme ». Erdogan, lui-même, se dit encore « kémaliste » parce que Attaturk symbolise toujours le renouveau de la Turquie moderne, malgré 15 ans de pouvoir « islamiste ». Alors, faut-il que « Si » Hamma, ait l'âge de Gorbatchev, de Boris Eltsine ou de Deng Xiaoping pour décréter la grande kermesse de la gauche libérale et qui fera du « Front populaire » un parti socialiste « bourguibien », un parti capable de gagner sur le moyen terme, justement, comme l'a fait François Mitterrand , le plus « gaulliste » des socialistes français ! Mes amis, en politique, c'est comme les dinosaures, on s'adapte pour survivre, ou on disparaît.... Welfahem... yefhem ! K.G