Ils sont venus, ils étaient tous là, y compris les éternels retardataires et autres absentéistes, pour vivre l'événement à pleins poumons et la passation d'armes et de témoin de M. Habib Essid, chef du gouvernement, devant le Parlement qui siégeait à « guichets fermés » ! Le Premier ministre savait que les carottes étaient cuites depuis le paraphe du « Pacte de Carthage » et a tenu juste à sauver la forme en attendant le fond. Pour le fond, un discours ni d'adieu, ni d'au revoir, puisque les deux ne dépendent pas de lui, mais d'une réalité implacable moulue dans un processus constitutionnel parlementaire, fragmenté au plus haut point par cette représentativité né d'un rapport de forces qui remonte à décembre 2014. M. Habib Essid s'est limité au strict minimum, la réussite sécuritaire dans la lutte anti-terroriste, objectif primordial dans le contrat de gouvernement passé par B.C.E et la présidence de la République et de Nida Tounès, de manière concomitante. Pour l'économie et les programmes, tout le monde s'est accordé pour dire que les circonstances étaient défavorables, avec ce manque de soutien flagrant des forces sociales et l'expansion de l'économie parallèle qui a privé le Trésor de ressources importantes dans la mise en œuvre du processus du développement souhaité et non réalisé par le gouvernement dans les proportions attendues. Maintenant, il fallait ménager les formes et pour cela, les Tunisiens sont champions hors normes. Le Parlement est servi en premier lieu. Il se donne une petite fraîcheur pour affirmer qu'il existe encore comme force déterminante et comme mécanique de désignation des gouvernements, selon le régime parlementaire. L'opposition est servie pour dire à haute voix que tout le système est à revoir ainsi que les choix économiques et sociaux ainsi que l'ensemble des moyens légaux pour lutter contre la corruption et les « cellules » mafieuses qui la protègent. Enfin, les forces de stabilisation du système autour d'Ennahdha, Nida Tounès, Afek et l'Union libre qui n'ont pas tari d'éloges sur le chef du gouvernement, tout en faisant remarquer que le pays aspire à une nouvelle étape plus dynamique et plus « agressive » sur le plan économique et de la promotion des investissements et du climat des affaires, avec cette fois-ci, la paix sociale, comme élément essentiel du nouveau processus. Le gouvernement Habib Essid a vécu. Mais, qu'en sera-t-il du prochain. Va-t-il faire table rase des acteurs-chefs de département dans leur ensemble comme le crie l'opposition radicale au Parlement ! Difficile à prévoir dans la mesure où nous ne sommes pas dans une étape de changement, radical, mais de « changement dans la continuité ». La grande discorde doit être évitée à tout prix et le consensus sera à notre humble avis, consacré par une recette bien mijotée entre les deux « cheikhs », BCE et Rached Ghannouchi. D'ailleurs, ce dernier est allé en personne, donner les « instructions » à ses protégés pour ne pas « renouveler » la confiance à Habib Essid et son gouvernement, et pour éviter toute interprétation « d'insubordination » avec le président de la République. Morale de tout cela... la Tunisie roule au top au niveau politique politicienne, mais ne sait pas quoi faire pour désengraîner la machine économique qui bloque à bien des niveaux, surtout la confiance des opérateurs économiques et sociaux. Plus on diabolisera la conciliation nationale et plus, le monde des affaires persistera dans la méfiance et la peur des lendemains incertains. Plus on agitera le pouvoir de la « Rue » et la mobilisation sociale excessive et plus l'investissement ira chercher des terres plus clémentes et moins périlleuses pour les investisseurs, les promoteurs en tous genres et le capital, en général. Le député Adnène El Hajji, surnommé « le lion rebelle de Gafsa » et du Bassin minier, n'y est pas allé avec le dos de la cuillère... il a même annoncé une possible « guerre civile » et a promis de faire face à « leur » police et « leur » armée, en cas de conflit avec les grévistes qui « défendent leurs droits », dit-il ! A vous d'apprécier où les choses vont dans ce pays, quand de pareils propos sont tenus à l'hémicycle du Bardo ! Habib Essid, dans un baroud d'honneur légitime, s'est mis en réserve de la République à l'horizon 2020 ! Mais, d'ici là, beaucoup d'eau coulera sous les ponts de la Médjerda (au fait, on en a grand besoin pour l'agriculture et l'eau potable). M. Mehdi Jomaâ a, lui aussi, joué la même recette... mais, les sondages ne lui sont plus favorables et l'oubli est bien le pire des virus en politique. Entretemps, M. Habib Essid est soulagé de tant d'ingratitudes, y compris parmi ces anciens ministres, mais il part, quand même, en ayant tout essayé dans un pays de plus en plus ingouvernable. Encore une fois... la critique est aisée... l'art est difficile et il faut s'excuser, parfois, de bien faire. La Tunisie dans son ensemble, doit revenir sur terre si elle veut rattraper le temps perdu... le temps de la vadrouille révolutionnaire... celle des illuminés qui ont tout perdu, sauf... la folie des grandeurs ! K.G