Business & Finances : Comment évaluez-vous l'évolution du secteur bancaire en Tunisie ? Mohamed El Moncer : Depuis 2011, le système bancaire a fait preuve de résilience pour continuer à soutenir l'économie, malgré un contexte difficile et plein de défis. En effet, le volume des crédits avoisinait 80% du PIB à fin 2015, un niveau respectable mais qui peut toujours s'améliorer dans les années à venir. A ce titre, les banques ont joué un rôle important aussi bien dans le financement des entreprises et les professionnels (croissance annuelle moyenne de 7% depuis 2011) aussi bien que les particuliers (croissance annuelle moyenne de 10% depuis 2011). A mon sens, le secteur bancaire a su assurer un équilibre entre une bonne dynamique de financement et une vigilance quant à l'évolution du niveau d'inflation, comme en témoigne la circulaire BCT de 2013 ayant contribué à la rationalisation graduelle des crédits à la consommation. Par ailleurs, Il est à noter que le secteur a déployé des louables efforts pour démocratiser le service bancaire et assurer une large couverture du territoire. Ceci se traduit par un niveau de bancarisation (hors poste) estimé à 65%, un niveau élevé comparé à la moyenne dans la région MENA. Néanmoins, le secteur bancaire tunisien connaît, à mon avis, une multitude de défis qui restent à relever. Il s'agit tout d'abord de consolider le secteur et diversifier l'offre. Le secteur gagnerait à se consolider pour renforcer ses fondamentaux, se concentrer sur l'amélioration du service offert au client et accompagner au mieux la relance économique attendue. Le niveau de bancarisation est appelé à être plus homogène : le niveau de bancarisation est certes élevé mais comporte des inégalités ? En effet, le réseau bancaire dessert inégalement les régions déshéritées et les zones périurbaines et rurales et nécessite en conséquence donc un équilibrage dans ce sens. La Situation et rôle des banques publiques : fragiliséespar leurs structures financières et par le poids de leurs créances accrochées, les banques publiques sont actuellement fort limitées dans leur rôle de locomotive dans le financement de la croissance économique. Ce rôle devrait s'accentuer suite à la restructuration de ces banques. L'accès excessif au refinancement de la BCT : impacté par le resserrement de la liquidité, l'encours de refinancement auprès de la BCT du secteur bancaire tunisien a atteint 7,5 Mrd de DT à mi-septembre 2016. Ceci est de nature à surenchérir le coût des ressources et mérite donc un plan d'équilibrage aussi bien à court terme que structurel. Le ratio des actifs figure parmi les autres maux du secteur. Avec 16,5% de taux d'actifs classées, un niveau relativement élevé qui exige un plan d'action pour le maitriser. Quels sont selon vous les axes stratégiques ou le plan d'actions nécessaire pour la restructuration du système bancaire tunisien ? A mon sens, le secteur bancaire tunisien gagnerait en restructuration et en potentiel de croissance en se penchant sur les aspects suivants : L'Instauration d'une courbe structurelle des taux : une courbe des taux structurels permettrait d'assurer l'équilibre entre la maturité du produit financier (crédit ou placement) et le taux d'intérêt qui le rémunère, ce qui représente un socle pour l'adéquation entre le profil de risque de l'emprunteur et le taux d'intérêt qui lui est appliqué.Dans ce sens, la réflexion relative au « Tunibor » représente une bonne initiative. La ibéralisation graduelle du cadre réglementaire : la libéralisation progressive du cadre réglementaire et l'orientation du rôle de la BCT vers la supervision des institutions financières, permettraient aux banques d'innover davantage au niveau de la gamme des produits et des canaux de distribution et d'assurer, par conséquent, une meilleure agilité vis-à-vis de la clientèle, la restructuration des banques (publiques et autres, le renforcement du rôle de l'APBT et la Mobilisation de l'épargne pour le financement de l'investissement local, sont autant de chantiers encombrants à déblayer pour voler au secours du secteur bancaire tunisien. En concertation avec la BCT et avec l'appui du ministère des finances et l'APBT, les banques pourraient développer davantage l'offre de produits d'épargne (assurance Vie, CEA, SICAV obligataires, etc.) en vue de pallier à l'asséchement de la liquidité et de canaliser l'épargne des tunisiens vers le financement de l'investissement local public et privé. Quoi de neuf pour les crédits à la consommation ? Les crédits à la consommation représentent aujourd'hui environ 60% des crédits accordés aux particuliers. Un niveau estimé relativement élevé. Je pense qu'il convient d'équilibrer cette tendance pour éviter le risque d'inflation. En revanche, j'estime qu'il est primordial d'améliorer la qualité de service pour cette catégorie de crédits à travers le développement du scoring, la réduction des délais de réponse et l'amélioration de la prise en charge des clients. Dans ce sens, on s'attache au sein d'Attijari bank à équilibrer la distribution de l'offre entre crédits à la consommation et crédits immobiliers. A ce titre, nous avons enrichi notre offre de crédits immobiliers et avons spécialisé et renforcé nos équipes pour un traitement plus rapide des dossiers. Attijari Bank a réussi son positionnement sur la place en tant que l'une des premières banques privées en Tunisie. Quels sont vos avantages compétitifs ou encore vos ingrédients clés de succès? Attijari bank a entamé son ascension graduelle depuis 2005 avec des plans structurés. Aujourd'hui notre institution se distingue essentiellement par le plus large réseau de la Place avec 203 agences et centre d'affaires et une couverture géographique équilibrée qui assure une réelle proximité de nos clients. Nous disposons de filiales spécialisées, dans tous les métiers financiers : leasing, gestion d'actifs, intermédiation boursière, capital risque, conseil et assurance vie. Autres atouts : un siège social moderne et ergonomique qui favorise les interactions et la communication entre tous nos départements et qui soutient les synergies entre les métiers de la Banque, un système d'information performant, polyvalent et souple, des équipes étoffées de manière équilibrée entre les métiers de la Banque. La Banque accorde un intérêt aigu au capital humain. D'où les investissements conséquents en formation du capital humain et une perfection des équipes et surtout des lignes commerciales pour une meilleure réponse aux attentes des clients. Nous misons par ailleurs sur la Qualité de Service ce qui nous a valu le prestigieux titre Bank Of the Year pour 2 années consécutives. Nous proposons une offre diversifiée et adaptée aux différents segments de clientèle aussi bien pour les particuliers que pour les professionnels et les entreprises. Attijari peut également compter sur le Groupe Attijariwafa pour assurer à sa clientèle Entreprises un accompagnement et des opportunités de développement intéressantes à l'international, et en Afrique en particulier. Quelle serait donc la stratégie d'expansion de la banque à l'intérieur comme à l'extérieur du pays ? Attijari bank vient de boucler son plan stratégique pour la période à venir. En vue de soutenir son positionnement à l'intérieur, Attijari bank misera sur le renforcement de la Qualité de Service, la dynamique commerciale ciblée, les synergies Groupe et l'accélération de la Banque à Distance En ce qui concerne son positionnement à l'international, Attijari bank compte développer une offre panafricaine intégrée et renforcer ses activités avec les Tunisiens Résidant à l'Etranger. Quelles sont les réalisations de la banque en chiffres au terme du 1er semestre 2016 ? A fin juin 2016, Attijari bank compte 203 agences et plus de 830 milles clients. Les dépôts clients ont atteint la somme de 5,2 Mrd de DT. Les encours crédits totalisent une enveloppe de 4,2 Mrd de Dinars pour u Produit net bancaire de 276 Mdt, soit en hausse de 10% par rapport au PNB réalisé au cours de la même période 2015. Comment se comportent les branches assurances et leasing chez vous? Le volume des primes émises par Attijari Assurances s'élève à 47 MDT à fin 2015 ce qui propulse notre compagnie d'assurance à la tête du secteur de l'assurance vie. Le montant des Mises en Force de Attijari leasing a atteint 216 MDT à fin 2015 ce qui classe notre compagnie de leasing parmi le top 5 de la Place. Ces performances témoignent de la complémentarité de l'offre du groupe Attijari bank et des synergies au sein du Groupe pour assurer à notre clientèle le meilleur service. Qu'en pense Attijari Bank de la finance islamique. Etes-vous en train de prospecter cette branche de la finance ? Actuellement, Attijari bank ne développe pas d'activité « Finance Islamique ». Néanmoins, nous attacherons actuellement à réfléchir dans ce sens.