Vu le contexte social, économique et politique actuel, la Tunisie dépend davantage de ses voisins : la Libye et l'Algérie. Au vrai constat d'une Tunisie confrontée aux risques majeurs du terrorisme et de la contrebande, l'IACE a organisé la troisième édition du Tunis Forum autour du thème : «La Tunisie et ses Pays Voisins : risques communs et Solutions Partagées » qui s'est tenue le 04/05/2015, à la Maison de l'Entreprise. Parmi les intervenants monsieur Slim CHAKER, Ministre des Finances, monsieur Ridha LAHOUEL, Ministre du Commerce, monsieur Amara BENYOUNES, Ministre du Commerce(Algérie) Monsieur Abdallah AL DARDARI, Secrétaire Exécutif Adjoint Commission Economique et Sociale pour l'Asie Occidentale, Nations Unies et monsieur Abdulmonam ABDULAZIZ, PDG, Etelaf Drilling, Libye. Les différents points abordés dans le forum, sont : l'investissement, les zones frontalières, les relations commerciales, l'éducation, les ressources naturelles, le transport, la santé, le tourisme, et les institutions. A noter que 5 tables rondes ont été organisées, traitant le sujet des Libyens résidant en Tunisie, la facilitation du commerce tuniso-algérien, l'émergence du secteur privé libyen, le développement des investissements tuniso-algériens et le développement des zones frontalières. L'investissement intra-maghrébin s'est peu développé dans les trois pays. Il est impératif d'accélérer la modernisation et l'adaptation du cadre juridique aux exigences des marchés des capitaux et de l'investissement des pays voisins. Parmi les mesures communes on peut citer les suivantes : – harmonisation des nomenclatures tarifaires. -Activation des chambres de commerce tuniso-libyenne et tuniso-algérienne . -Amélioration du service public bancaire et facilitation des procédures administratives et des prestations accordées aux promoteurs économiques. -Activation des comités sectoriels. Et création de fonds d'investissements mixtes pour encourager les investissements dans les zones off-shore frontalières, Deux facteurs impactent négativement le financement de l'investissement entre les trois pays voisins : la lourdeur des procédures bancaires et administratives et l'atomisation des secteurs bancaires des trois pays. Ceci a handicapé les entreprises tunisiennes sur le marché des grands projets dans la région. Il existe de très nombreuses opportunités d'investissement de part et d'autre des frontières. Les facteurs handicapants sont : le poids des bureaucraties dans les trois pays, le manque total de confiance entre administrations et entre hommes d'affaires, le manque d'informations et d'études des marchés. Parmi les recommandations, il y recours à la création de conseil d'affaires entre partenaires privés avec l'appui des autorités des trois pays. A cet effet, les principales conclusions à tirer sont les suivantes : Pour les zones frontalières La situation actuelle se caractérise par des flux de contrebande assez importants aussi bien avec l'Algérie (hydrocarbures, tabac, fer, pneumatiques, produits maraichers, fruits, viandes rouges..) qu'avec la Libye (ciment, concentré de tomate, pâtes alimentaires, électroménager, hydrocarbures, textiles divers, viandes rouges) La lutte contre le terrorisme a eu pour impact de réduire relativement ces flux au cours de la dernière période. Il faut intensifier les liens de toutes sortes et faire en sorte que les intérêts soient unis, surtout que le sentiment d'implication est très faible et n'est perçu que sous l'angle sécuritaire. Actuellement, il n'existe pas de zones franches. Le projet de création d'une zone franche avec la Libye est très avancé. Une unité de gestion par objectifs (UGPO) a été créée à cet effet au sein du Ministère du Commerce. L'idée de créer une ou plusieurs zones franches avec l'Algérie existe, mais elle reste encore très vague. Les projets n'étant pas au même stade d'avancement, il n'y a pas de mesures communes mais un principe à rappeler : tout doit être fait dans la transparence totale et en concertation avec toutes les parties intéressées. Pour les relations commerciales Avec l'Algérie, les relations commerciales sont très bonnes en matière de commerce des produits énergétiques et de coopération dans le domaine de l'électricité et du pétrole. Elles sont moins bonnes au niveau de l'échange de marchandises. Bien souvent les accords commerciaux ne sont pas respectés et les deux parties se rejettent la responsabilité. Le problème de la contrebande est une question récurrente. Avec la Libye, les échanges commerciaux souffrent de la situation politique qui prévaut en Libye. Les flux de marchandises ne se sont pas pour autant arrêtés. Le problème de la contrebande est également récurrent. En dehors de l'échange des hydrocarbures, les relations commerciales avec les deux pays sont chaotiques et dépendent très étroitement des lectures bureaucratiques et des humeurs personnelles (de part et d'autre). Pour l'Education Il n'existe actuellement aucune coopération au niveau de ce domaine notamment entre la Libye et la Tunisie. Avec l'Algérie, la formation aux métiers de l'artisanat connaît quelques tentatives de rapprochement Les trois systèmes éducatifs sont très divergents : arabisés en Algérie et en Libye, bilingue en Tunisie. Il n'existe actuellement aucune coopération au niveau de ce domaine notamment entre la Libye et la Tunisie. Avec l'Algérie, la formation aux métiers de l'artisanat connaît quelques tentatives de rapprochement. Pour les ressources naturelles Les trois pays appartiennent à la zone géographique la plus aride au monde. Il n'existe pas de projets communs à l'heure actuelle. Une simple coopération en matière d'alerte et de gestion des crues existe entre la Tunisie et l'Algérie. Pour le transport A l'heure actuelle, il n'existe aucune liaison ferroviaire en fonctionnement entre la Tunisie et les deux pays. Contribuer à l'achèvement du tronçon TripoliTunis-Alger de l'autoroute maghrébine, est parmi les mesures à traiter. Pour la Santé Le financement mixte dans le secteur de la santé actuellement est complètement délaissé. Ni le secteur privé, ni le secteur public de la santé ne se voient concernés, alors que le financement peut être assuré via l'assurance maladie et via la mise en place de cliniques mixtes. Pour le tourisme Il existe un flux très importants de visiteurs libyens et algériens vers la Tunisie. Ce tourisme intra-maghrébin a des particularités (peu de fréquentation des hôtels, transport en voiture) mais n'est pas strictement identique d'une nationalité à l'autre. S'agissant des Libyens, il y a une prédominance des motivations sécuritaires et de santé. Les séjours sont d'assez longue durée. Les touristes algériens sont à la recherche d'activités de loisir et de shopping. Les intervenants M.Slim Chaker Le ministre des Finances Tunisien, a indiqué que l'histoire de la relation des trois pays ne date pas d'hier vu qu'elle les a réunis dans la lutte contre la colonisation. Pour lui, nous devons travailler ensemble, et qu'il doit y avoir une entité unique, « sauf que cette entité n'existe pas aujourd'hui » , dit-il. Il a également déclaré que « Nous nous trouvons face à un blocage qui empêche de consolider cette coopération". M.Amara Benyounes, ministre algérien du Commerce, pour sa part, a déclaré que la volonté politique des deux pays est bien réelle. Mais sur le plan économique, il faut qu'il y ait une vision cohérente des deux parties. M.Moez Laabidi, universitaire et expert en économie, estime que pour aider l'économie, il y a bien évidemment le court terme, le côté immédiat, mais il y a aussi les dimensions sécuritaires : maîtriser les flux au niveau des frontières, stopper la contrebande, harmoniser la tarification douanière, créer des zones franches et applquer la gouvernance locale...