La coopération tuniso-hongroise et les moyens de la développer ont été au centre d'un entretien, lundi 27 mars 2017 à Tunis, entre le secrétaire d'Etat aux affaires étrangères Sabri Bachtobji et son homologue hongrois chargé de la diplomatie économique, Levente Magyar, en visite de travail en Tunisie. A cette occasion, le secrétaire d'Etat hongrois aux affaires étrangères, nous a accordé cette interview en saluant la réussite de l'expérience tunisienne en matière de transition démocratique et en soulignant la volonté commune de renforcer et de développer la coopération bilatérale dans les domaines d'intérêt commun. La Hongrie est pratiquement l'unique pays au monde à se doter d'un Secrétaire d'Etat chargé de l'économie sous tutelle du ministère des Affaires étrangères. Qu'est ce qui a motivé ce choix ? Réponse : L'économie de la Hongrie est intimement liée à son commerce extérieur, avec une valeur d'environ 200 milliards de dollars d'échange international chaque année et une intégration totale à l'économie mondiale, avec la quasi-totalité des entreprises multinationales présentes sur le territoire du pays. Nous estimons donc très important de pouvoir concentrer nos forces et harmoniser les moyens de la diplomatie traditionnelle avec la diplomatie économique pour mieux réussir dans le monde contemporain. Comment évaluez-vous cette expérience et pensez-vous que l'on peut généraliser cette approche sur d'autres pays particulièrement la Tunisie ? L'organisation actuelle de la diplomatie économique au sein des affaires étrangères a maintenant trois années d'expériences. Le modèle reste très bon, le meilleur que je connaisse et devrait pouvoir être repris par d'autres états, notamment par la Tunisie aussi. L'objectif de ma visite récente en Tunisie est exactement ceci : présenter notre modèle de la diplomatie économique en détail et ensuite vous pouvez décider quels sont les éléments que vous voudriez adapter. Dans le cadre de la coopération tuniso-hongroise, les échanges économiques restent en de ça des attentes des deux peuples. Comment expliquer cet état des lieux et comment peut-on y remédier ? Le volume total des échanges commerciaux entre la Tunisie et la Hongrie avoisine 300 millions de dinars tunisiens par an. Les exportations ont doublé durant les cinq dernières années, alors que la tendance est plutôt à la baisse avec les autres pays d'Afrique du Nord. Pour des économies d'environ 10 millions d'habitants tant en Hongrie qu'en Tunisie, je ne trouve pas ce volume, et surtout pas cette progression linéaire en de ça des attentes. Il est cependant toujours possible de faire mieux. Le devoir des gouvernements est de donner les cadres législatifs propices au développement des affaires. A cela s'ajoute le travail des agences de promotion et des ambassades à informer les opérateurs sur le climat des affaires et les opportunités de partenariat. Le travail des conseillers commerciaux consiste à aider la recherche de partenaires et à la prise de contact entre les entreprises. Le plus gros du travail revient cependant aux entreprises qui vont finalement traiter entre elles. Pour augmenter les échanges, je dirais donc que tout le monde doit prendre sa quote-part de travail et les entreprises qui vont par la suite bénéficier des nouvelles opportunités ne doivent pas attendre le résultat uniquement de leurs gouvernements respectifs. Selon vous, quels sont les secteurs sur lesquels on doit focaliser nos efforts pour améliorer les échanges entre les deux pays ? Pays de plaines, la Hongrie a historiquement toujours été un pays agricole et innovant. Le résultat est – en dehors des produits agroalimentaires disponibles à l'export – toute une série d'industrie liée à l'agriculture telles que les techniques d'irrigation et de gestion des eaux, les techniques d'élevage et de reproduction du bétail, y compris celle des poissons, les techniques de machinisme agricole ainsi que les techniques «intelligentes» de gestion des stocks ou des systèmes de distribution, y compris les chaines de distribution à froid et les systèmes d'abattages du bétail. Ce qu'il faut aussi comprendre à propos de l'économie hongroise, c'est qu'on est passé d'une économie socialisante à une économie de marché libre il y a 26 ans. Du jour au lendemain, les grandes entreprises étatiques ont été reprises par des multinationales étrangères. Ces dernières ont cependant tout intérêt à diminuer leur coût de production repris en Hongrie. D'abord, elles ont restructuré les entreprises, puis elles ont commencé à sous-traiter de plus en plus de leurs activités à des entreprises réellement hongroises. C'est grâce à ces 26 ans d'expérience de sous-traitances que certaines entreprises hongroises peuvent actuellement voir au-delà des frontières. A l'échelle internationale, ce sont toujours des PME, mais elles sont déjà suffisamment expérimentées pour diversifier leurs marchés, notamment en Tunisie.