Poursuivi ou condamné, c'est là une précision qui vaut son pesant d'or, car on a entendu certains commentateurs affirmer que tant qu'il n'était pas condamné, l'accusé ne pouvait être extradé. Ce qui est, disent-ils, le cas pour le président déchu dont le procès vient à peine d'être intenté par la justice tunisienne. L'extradition peut donc être appliquée quand il y a des poursuites engagées contre lui. Ce qui est le cas actuellement. Le président déchu est donc tenu de se présenter devant les juridictions tunisiennes à charge pour cette dernière de lui assurer les conditions d'un procès transparent et juste, au terme duquel le verdict tombera soit pour l'innocenter soit pour le condamner. A signaler que la Tunisie a déjà demandé à l'Interpol de mettre en œuvre le processus de poursuites à l'encontre du président déchu. En principe donc tout baigne dans l'huile, sauf que l'Arabie Saoudite semble traîner les pieds. A la demande tunisienne d'extradition, elle a répondu par un silence troublant. Ni oui ni non! Motus total comme si ce pays ignorait l'existence d'une convention signée en 1983 dans le cadre de la conférence des ministres de la Justice arabes régissant le mécanisme de l'extradition d'individus présumés coupables. En fait, le Royaume, tout au long de son histoire, n'a jamais livré un réfugié au pays demandeur et il ne le fera jamais. Et peut-être le plus célèbre exemple est-il celui de Idi Amine, homme d'Etat ougandais, qui a établi dans son pays un régime de terreur et qui a trouvé un refuge peinard à Jeddah, où il a terminé sa vie! Les autorités saoudiennes excipent, pour expliquer cette attitude, du respect de la loi de l'hospitalité, une des vertus cardinales du citoyen saoudien et qui plonge ses racines dans une tradition arabe millénaire. Bien entendu, cette explication ne satisfait pas les Tunisiens qui ont envisagé un sit-in devant l'ambassade du Royaume Saoudite. C'est dire la déception d'une grande partie de la population qui exige que justice soit rendue après près d'un quart de siècle d'une implacable oppression. Non pas, bien entendu, une justice aveugle expéditive et vengeresse, mais une justice transparente sereine et qui intervient dans le cadre de la loi. Ce couple diabolique a fait trop de mal à notre pays et à ses hommes. Ne nous abaissons pas à son niveau. Donnons de notre pays l'image de la tolérance et de l'attachement aux grandes valeurs humaines, même si nous déplorons, dans notre for intérieur, le fait d'avoir été privé de la possibilité, en le voyant devant la justice, de sonder les profondeurs de l'emprise du mal sur ces deux êtres.