A côté des crises économiques et financières à répétitions, le monde est frappé depuis quelques années par des virus et des pandémies qui ont ralenti le rythme de sa croissance. Ces maladies qui touchent l'être humain et l'animal ont un impact économique négatif, qui se propage à travers le monde par le biais d'une mondialisation plus accentuée. En pleine crise financière et économique, nous sommes en train de vivre une réelle pandémie qui risque de retarder la reprise économique. La grippe porcine, ou communément appelée la grippe A(H1N1) touche aujourd'hui plus de 130 pays et a causé la mort de 2837 personnes dans le monde. L'organisation Mondiale de la Santé a depuis quelques mois élevé le niveau d'alerte au niveau 6 soit le plus haut niveau. Suite à plusieurs crises sanitaires et grippes survenues durant les années précédentes, les institutions économiques, essayent d'évaluer l'impact de la grippe porcine sur l'économie mondiale. La Tunisie, qui a connu quelques cas depuis des semaines, a pris plusieurs mesures sanitaires à la frontière et pour la prise en charge des malades, afin de limiter la propagation de cette maladie. Malgré tout, la Tunisie ne peut pas échapper à un impact généralisé sur l'économie mondiale. Des estimations et des scénarios : Il est difficile d'évaluer l'impact de la grippe porcine sur l'économie mondiale à ce stade de son développement, vu que l'effet reste un peu confiné, et que les pays ont pris plusieurs mesures préventives depuis son déclenchement. Mais des scénarios, qui se sont basés sur une lecture des précédentes pandémies, ont été avancés récemment. En effet, selon une étude de Natixis, le coût économique de la grippe est de l'ordre de 0,002% du PIB mondial. Les américains s'attendent de leurs côtés à une baisse du PIB de l'ordre de 0.9% dans le cas d'une pandémie généralisée. D'autres scénarios encore plus pessimistes sont aussi élaborés et qui se basent sur une baisse considérable de l'activité touristique et du transport international ainsi qu'une baisse de la consommation qui cause une chute du commerce mondial. En effet, Oxford Economics, pense que si l'épidémie dure environ six mois, elle causerait une perte à l'économie mondiale d'environ 2.500 milliards de dollars, soit 3,5% du PIB mondial. « Dans ce cas, les Etats-Unis pourraient connaître des pertes équivalentes à 5% du PIB ». Selon ces mêmes estimations la pandémie pourrait repousser d'un à deux ans le redressement de l'économie mondiale. Ce scénario se base sur une hypothèse d'une contamination future de 30 % de la population mondiale. La Grande Bretagne qui a enregistré plus de 30 décès à cause de la grippe A, est le pays le plus touché d'Europe. Selon les prévisions d'Oxford Economics, le coût de cette grippe serait de l'ordre de 5% du PIB britannique. Selon des estimations un peu vagues de la Banque Mondiale une pandémie de la grippe A serait très dommageable à l'économie mondiale. Son coût varierait entre 0,7 % et 4,8 % du produit intérieur brut mondial. De son côté le FMI prévoit un impact économique fort d'une possible pandémie de grippe aviaire, et estime qu'il sera peu durable. La grippe A a touché plusieurs secteurs qui sont des moteurs de l'économie mondiale tel que le tourisme ou le transport aérien. Selon les prévisions, plusieurs entreprises fermeront à cause d'un taux d'absentéisme important. Les travailleurs sont soit touchés par la grippe, soit préfèrent rester chez eux pour ne pas être contaminés. Le rythme de la production baisserait dans plusieurs économies. La consommation quant à elle chuterait, puisque les consommateurs limiteraient leurs déplacements pour effectuer des achats. Plusieurs autres activités seront aussi totalement paralysés tel que le secteur des loisirs (théâtres, cinémas, grandes surfaces, parc d'attraction,….). Dans le cadre d'un tel scénario, l'activité de l'investissement connaîtrait une chute importante vu que les perspectives seront floues, et tout investissement serait risqué. C'est pour cela que les analystes prévoient une ruée des investisseurs vers l'or, les actions des sociétés pharmaceutiques et les bons du trésor, qui seront des valeurs refuges. Prévoir un impact économique sur la Tunisie : Sur le plan sanitaire la Tunisie a su mettre en place un dispositif préventif bien ficelé, et qui a permis de détecter quelques cas et de les traiter convenablement, et qui sont aux deux tiers des étrangers. La propagation de la grippe A sur notre sol est très limitée et reste dans des proportions insignifiantes en comparaison avec d'autres pays du Golfe tel que l'Arabie Saoudite ou le Koweït. Au Koweït, par exemple on vient de décider le report de la rentrée scolaire pour éviter la contamination, en Arabie Saoudite, une vague de vaccination contre la grippe sera déclenchée aux prochains jours. En Tunisie, on a décidé la suspension d'El Omra momentanément, et des mesures restrictives sont prévues pour le Hadj. Nous sommes déjà approvisionnés par le Tamiflu, médicament antigrippal, et l'Etat vient de commander 500.000 nouvelles doses livrables les prochaines semaines. Nous serons même producteur de notre propre médicament après l'obtention d'une licence. Sur le plan économique, la Tunisie doit aussi se préparer aux différents scénarios développés par les grandes institutions et les analystes, et juger des mesures économiques importantes à prendre en cas de généralisation de la Grippe sur le plan mondial et national. Une attitude proactive et préventive est nécessaire pour sauvegarder les équilibres économiques globaux. La Tunisie doit surtout s'attendre à une baisse considérable de l'activité touristique durant les prochains mois. En effet, les déplacements des personnes dans le monde seront limités et des décisions de vacances seront reportées. Il ne faut surtout pas s'attendre à un flux touristique important vu la peur de la grippe A. Des unités touristiques se trouveront même obligées d'arrêter leur activité avec tout ce qui se rapporte comme mise en chômage. Après une année 2009 difficile, les professionnels doivent s'attendre à une année 2010 encore plus difficile si la grippe se propage. Conséquence directe de la baisse de l'activité touristique, le transport aérien subira une chute de son activité. Après l'entrée en vigueur de l'Open Sky et la concurrence accrue sur le plan national, les compagnies tunisiennes doivent se préparer à une baisse de leur activité. La première conséquence économique déjà enregistrée en Tunisie a touché les agences de voyages, qui ont subi des pertes énormes à cause de la suspension de la Omra. Les professionnels chiffrent les pertes à 4 millions de dinars. Plusieurs agences sont spécialisées pour ce genre de voyages et cette décision de suspension les a frappé de plein fouet. Ces opérateurs demandent aujourd'hui une aide gouvernementale pour le maintien de leur activité, et les dédommager. Le commerce mondial subira aussi une chute de son rythme, et impactera l'évolution de nos échanges commerciaux, qui subissent déjà une baisse importante à cause de la crise économique et financière. Dans le cas d'un scénario très dramatique, les pouvoirs publics doivent s'attendre à un impact économique certain sur l'activité économique nationale. C'est pour cela qu'il faut anticiper et prévoir des mesures d'ordre économique pour soutenir certains secteurs qui risquent d'être affecté par la grippe A. Le caractère sanitaire de la grippe ne doit pas cacher son volet économique.