Une guerre civile, comme toute guerre, on sait quand et comment commence, mais on ne sait jamais quand et comment elle finit. Celle qui meurtrit actuellement la Somalie, dure depuis au moins deux décennies. En République Démocratique du Congo, les hostilités intestines qui ont laissé de profonds stigmates dans le pays pendant longtemps, se sont calmées. Mais tout le monde sait que la moindre étincelle pourrait, en un clin d'œil, réveiller les démons de la division. Bien entendu, ce pessimisme noir, la Tunisie en est encore loin. Mais on ne sait jamais. Qui a pu prévoir la longue séquence de violences religieuses qui ont ensanglanté l'Algérie, tout au long d'une décennie, violences que le pays aurait pu en faire l'économie? Il y a peu, donc, nombre d'incidents ont fait croire à une généralisation de la contestation, d'une colère sourde, du ressentiment et de l'incompréhension. Qui visait qui? Les questions vitales qui constituent les enjeux majeurs de la transition démocratique donnaient lieu à d'âpres débats, à des violences verbales, à la faillite du dialogue, au refus de l'écoute de l'Autre. Ce qui représente, bien entendu, l'esprit antidémocratique par excellence. Ce n'était donc pas la peine de se débarrasser de la dictature pour tomber dans une autre d'autant plus pernicieuse que l'on était bien en peine d'en identifier l'instigateur. Posez la question-clé aux journalistes et ils vous justifieraient leur désarroi par l'impossibilité d'accéder aux informations vraies. Bref, dans ce tumulte étendu à toutes les couches de la population régnait une atmosphère lourde d'inconnues et de mystérieuses alliances et mésalliances. Il y a, aujourd'hui, incontestablement, un léger mieux au niveau sécuritaire qui atténue du «capital» méfiance accumulé par le citoyen dans son for intérieur. Au niveau de la visibilité politique, on peut aussi parler d'un meilleur climat à condition que l'affaire du report de la date fatidique du 24 juillet, jour fixé pour la tenue de l'élection de la Constituante, ne donne pas lieu à des dérives susceptibles de bloquer le processus de la transition démocratique. Mais il semble que le spectre d'une telle césure à ce point névralgique de la transition ait été écarté des soucis des citoyens. L'attestent les réactions compréhensives et conciliantes de la part de ces derniers, désireux de maintenir une consensualité, dût-elle être superficielle, l'intérêt général primant sur l'intérêt partisan. Il n'y a donc pas à se faire du mouron à ce sujet. Et ce serait là une nouvelle victoire que la Tunisie aura remportée sur elle-même mais aussi sur les forces opérant en catimini. Il en est ainsi des dangers inhérents au conflit en Libye et que notre pays est en train de gérer avec assurance et lucidité. La Tunisie offre actuellement au monde l'image d'une nation sûre d'elle-même et confiante en ses potentialités. Peu de nations auraient obtenu des résultats aussi probants dans des conditions similaires.