Dans une déclaration officielle aussi symbolique que stratégique, le président de la République Kaïs Saïed a annoncé jeudi 15 mai 2025, lors de sa rencontre avec Li Shulei, membre du Bureau politique et du Comité central du Parti communiste chinois, l'adhésion officielle de la Tunisie à l'initiative chinoise "la Ceinture et la Route" (BRI). Cette annonce marque la première déclaration explicite au sommet de l'Etat tunisien à propos de cet alignement stratégique sur le vaste projet géoéconomique porté par Pékin. Elle pourrait avoir des répercussions profondes sur le positionnement international de la Tunisie. Une initiative mondiale portée par Pékin depuis 2013 Lancée par la Chine en 2013 sous l'impulsion du président Xi Jinping, l'initiative "la Ceinture et la Route" — ou "Belt and Road Initiative" (BRI) — vise à renforcer les liens commerciaux, infrastructurels et stratégiques entre la Chine et une centaine de pays répartis sur trois continents : l'Asie, l'Europe et l'Afrique. Inspirée de l'historique Route de la soie, la BRI repose sur deux grands axes : Le "ceinture économique" de la Route de la soie, un réseau terrestre reliant la Chine à l'Europe via l'Asie centrale ; La "Route de la soie maritime du XXIe siècle", un corridor maritime reliant les ports chinois à ceux d'Asie du Sud-Est, d'Afrique, du Moyen-Orient et d'Europe. Le projet s'articule autour de grands investissements dans les infrastructures : routes, voies ferrées, ports, énergie, télécommunications... et vise un achèvement progressif à l'horizon 2049, année symbolique marquant le centenaire de la République populaire de Chine. Une vision d'un nouvel ordre économique mondial Selon un communiqué de la présidence tunisienne, Kaïs Saïed a salué l'importance de cette initiative, soulignant qu'elle offre "de véritables opportunités de coopération et de partenariat", tout en s'inscrivant dans une vision "pour un monde plus humain". Plus encore, le chef de l'Etat a profité de cette annonce pour appeler à l'instauration d'un nouvel ordre économique mondial, plus juste, plus équitable, mettant fin aux inégalités et aux conflits qui ont longtemps freiné les aspirations légitimes des peuples en matière de développement, de souveraineté et de dignité. Un repositionnement stratégique dans un contexte de rivalité mondiale Cette décision tunisienne s'inscrit dans un contexte de forte polarisation géopolitique entre la Chine et les Etats-Unis, chacun cherchant à étendre son influence, notamment sur le continent africain. En rejoignant la BRI, la Tunisie se rapproche ainsi de la sphère d'influence économique chinoise, avec l'espoir de tirer profit des financements et des investissements liés au programme. Le rôle central du Parti communiste chinois dans la planification et la mise en œuvre de cette stratégie — constitutionnalisée depuis 2017 — montre bien à quel point la BRI est un instrument majeur de la diplomatie et de la projection de puissance chinoise. Quels enjeux pour la Tunisie ? L'adhésion à la BRI pourrait ouvrir à la Tunisie de nouvelles perspectives en matière d'investissement dans les infrastructures, de coopération technologique, d'accès à des financements préférentiels, voire de renforcement de sa position de carrefour régional. Reste à savoir dans quelle mesure Tunis saura négocier les termes de cette coopération pour défendre ses intérêts souverains tout en évitant les écueils de l'endettement ou de la dépendance stratégique, déjà reprochés à certains partenaires de la Chine. L'annonce du président Kaïs Saïed marque une étape stratégique dans la diplomatie économique tunisienne. En rejoignant l'initiative "la Ceinture et la Route", la Tunisie fait le pari d'un avenir de coopération avec Pékin, en espérant obtenir un levier de développement à long terme. Un choix qui pourrait aussi redessiner les équilibres géopolitiques de la région. Que se passe-t-il en Tunisie? Nous expliquons sur notre chaîne YouTube . Abonnez-vous!